ThéâtreCritiques de théâtre
Crédit photo : Danny Taillon
Tout comme dans Manuel de la vie sauvage, qui a tout d’abord existé sous forme de roman avant d’être adapté pour la scène du Duceppe en 2021, on suit dans l’adaptation de Royal les déboires d’un antihéros antipathique qui est né avec une cuiller dorée à la bouche et qui frétille pour se distinguer du groupe, et tenter de se hisser au sommet de façon plus ou moins éthique.
Ici, c’est le microcosme des étudiants en droit de l’Université de Montréal qui est scruté à la loupe, et plus particulièrement la légendaire course au stage.
Adapter un roman en entier pour la scène et en condenser l’esprit en 90 minutes comporte son lot de défis. Le rythme, qui est une des grandes qualités du livre, devient ici un obstacle à l’empathie. À trop vouloir enchaîner les scènes percutantes et les moments forts, on en oublie de bien définir la psychologie des personnages et de laisser le temps aux spectateurs et spectatrices de souffler un peu, et de s’y attacher.
Les dix interprètes qui se trouvent sur scène offrent pourtant des performances absolument énergiques, incarnant jusqu’à l’obsession leurs personnages, en maintenant le niveau d’intensité physique à 11/10 du début à la fin de l’œuvre.
Certaines scènes plus controversées du roman sont présentées sous forme de danse interprétative, ce qui est aussi surprenant que rafraîchissant.
La mise en scène conjointe de Virginie Brunelle et Jean-Simon Traversy est au service de cette énergie et nous montre habilement des moments plus intimes par le biais de gigantesques projections sur un rideau composé de lamelles métalliques, qui se déplace de temps à autre pour alterner l’espace scénique.
Le mouvement des interprètes évoque parfois un ballet, où les cordes de Tchaïkovski seraient remplacées par les pulsations techno de la musique de Nicolas Basque.
Il y a un admirable travail esthétique dans cette production, et la beauté de la jeunesse est mise de l’avant, avec son énergie et ses idéaux dénués de nuances, sa soif de vaincre et sa grande naïveté.
Dommage, toutefois, qu’on demeure perpétuellement en surface, préférant l’esbroufe à la finesse, et les boutades provocantes aux réelles émotions.
La pièce «Royal» de Jean-Philippe Baril-Guérard en images
Par Danny Taillon
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