«Le magasin» d’Odile Gamache au Théâtre Prospero – Bible urbaine

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«Le magasin» d’Odile Gamache au Théâtre Prospero

«Le magasin» d’Odile Gamache au Théâtre Prospero

Vie et mort d’une vitrine

Publié le 22 avril 2024 par Pierre-Alexandre Buisson

Crédit photo : David Wong

Vous marchez sur une artère commerciale quand la vitrine d’un magasin attire votre attention. Vous y entrez, happés par les objets scintillants et les tissus vaporeux qui s’y trouvent. Le bal de la séduction commence. Quelques objets sur les tablettes vous semblent un peu poussiéreux. Vous aimez l’ambiance de l’endroit, le son de vos pas dans les allées, le tintement de la clochette qui vous annonce un nouveau visiteur.

Le magasin, c’est la première œuvre de la scénographe Odile Gamache en tant que créatrice, du théâtre d’objets qui laisse pantois et qui a été préalablement testé en 2022 lors du OFFTA.

Tout comme Marie Darsigny avec son puissant recueil Filles, paru aux défuntes Éditions de l’Écrou, elle se laisse inspirer par le faux glamour de la Plaza St-Hubert, et l’émoi suscité par un espace qui manque d’amour a rarement été aussi prenant.

Photo: David Wong

Avec une mise en scène très immersive, qui se passe entièrement de verbe (pas un seul mot n’est prononcé pendant la petite heure que dure l’expérience), Gamache nous invite dans un splendide voyage astral au cœur du commerce de détail, des étoffes, des façades et de la mythologie du magasinage.

Des rideaux se déploient, des tissus fusent de partout et s’empilent avec poésie, on passe de la beauté et la grâce aérienne d’un ballet à l’univers tonitruant d’un concert chiptune en quelques instants, parfois pour célébrer les soldes, parfois pour célébrer la vie.

C’est comme si, entre chien et loup, à un moment de la nuit où personne ne déambule sur les trottoirs, on avait droit à un regard exclusif dans les coulisses du magasin, où s’agitent de manière festive des objets, loin des regards. Les mouvements, qu’ils soient mécanisés ou provoqués par un vent artificiel, nous appellent à rêver de cette réalité parallèle.

Photo: David Wong

Odile Gamache est une marionnettiste, et elle contrôle la scène de main de maître.

C’est, vous l’aurez deviné, un show comme on en voit peu, un bref instant de splendeur qui prend, paradoxalement, un endroit un peu glauque et désespérant comme matériel source. La suspension de l’incrédulité est due en grande partie aux éléments du décor qui dansent sous nos yeux, mais aussi à l’incroyable trame musicale de Christophe Lamarche-Ledoux, qui a entre autres récemment signé la bande-son des films Chien Blanc et Viking, qui ne serait pas déplacée lors d’une soirée à MUTEK.

Le pouvoir d’évocation des images est tel que le spectateur se raconte de multiples petites histoires, tout en étant partiellement hypnotisé, mais entièrement impressionné.

Dans la boutique hantée, les nuages de barbe à papa côtoient les robes de mariée délaissées, et malgré la réjouissante absence de mots ou de phrases, tout est (majestueusement) dit.

La pièce «Le magasin» d’Odile Gamache en images

Par David Wong

  • «Le magasin» d’Odile Gamache au Théâtre Prospero
  • «Le magasin» d’Odile Gamache au Théâtre Prospero
    Photo: David Wong
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    Photo: David Wong

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