Assister à la naissance de textes théâtraux: Festival du Jamais Lu Montréal du 3 au 11 mai 2024 – Bible urbaine

SortiesFestivals

Assister à la naissance de textes théâtraux: Festival du Jamais Lu Montréal du 3 au 11 mai 2024

Assister à la naissance de textes théâtraux: Festival du Jamais Lu Montréal du 3 au 11 mai 2024

«Attiser la lumière» pour écrire un nouveau chapitre de l’histoire

Publié le 24 avril 2024 par Jessica Samario

Crédit photo : Tous droits réservés @ David Ospina

Du 3 au 11 mai, le Théâtre Aux Écuries accueillera la 23e édition du Festival du Jamais Lu Montréal orchestrée par la directrice générale et artistique Marcelle Dubois accompagnée, cette fois, de l’acteur Lyndz Dantiste. Ce festival, qui a pour objectif de faire découvrir des textes de théâtre inédits au public, présente cette année des nouveautés autour de ce désir de solidarité, de douceur et de lumière. C’est lors d’un jovial entretien avec ces deux directeur·trices artistiques que nous en avons appris davantage sur cet événement incontournable de la dramaturgie francophone.

Entre passion et nécessité

Ayant grandi au Témiscamingue et ensuite à Mont-Tremblant, Marcelle Dubois nous a raconté que, très jeune, elle était plutôt éloignée de la culture. C’est à l’école secondaire qu’elle a eu un coup de foudre pour les arts, et plus particulièrement pour le théâtre. Tombée sous le charme de l’écriture de Michel Tremblay, elle avoue avoir pleuré d’empathie pour ses personnages de nombreuses fois.

Déjà une passionnée dans l’âme, elle a passé la majorité des fins de semaine de son adolescence à faire l’aller-retour en autobus pour pouvoir suivre des cours de théâtre à Montréal et ainsi élargir ses connaissances.

«C’était très clair que ce qui m’animait à ce moment-là, c’était de construire, d’agrandir la vie, que ce soit par les mots, par la mise en scène, par la création d’un festival ou d’un théâtre, bref, c’était de créer des espaces qui s’agrandissent davantage, plutôt que d’être en avant comme comédienne», a confié la cofondatrice du Jamais Lu et du Théâtre Aux Écuries.

Marcelle Dubois. Photo: David Ospina.

Lors de cet échange, elle a soulevé un point immensément important et parfois oublié, c’est-à-dire que, dans les idées préconçues, les artistes sont souvent vus comme des citoyen·nes vivant de leur passion pour s’amuser. Pourtant, leur réalité se voit parsemée d’embûches, puisqu’il est difficile de vivre de son art au Québec, bien que les arts soient nécessaires à l’avancement de la société.

«Quand tu choisis les arts, c’est parce que tu as vraiment cette envie de participer au discours ambiant de ta société en essayant de contribuer en créant des images et des personnages, avec ce désir d’agrandir le réel à travers la fiction. C’est tellement important, et d’ailleurs on le voit dans les yeux des spectateur·trices; ça crée non seulement du sens, mais ça devient méditatif. Ça calme les angoisses, et ça crée des espaces de discussion. […] Je pense qu’on arrive au théâtre souvent par passion, mais après, c’est important de le nommer comme un vrai apport à la société davantage qu’une passion personnelle», a souligné Marcelle Dubois, avec conviction.

De son côté, Lyndz Dantiste était tout aussi passionné de théâtre depuis longtemps, mais c’est grâce à des personnes qu’il a croisées sur sa route qu’il a décidé de réellement se lancer dans l’aventure et d’entrer à l’école de théâtre.

«On dirait que c’est plus que par passion; c’est par obligation, presque, ce qu’on fait. C’est malheureux de voir qu’on prend l’art pour quelque chose d’une certaine banalité ou en marge de la société, alors qu’on est justement en train d’écrire les générations futures. Je pense que si on est là-dedans, c’est parce qu’on a ce désir et ce besoin criant de faire partie du modelage de notre société», a poursuivi Lyndz dans la même direction que sa collègue.

Affiche de la 23e édition du Festival du Jamais Lu Montréal sous le thème «Attiser la lumière».

Reconstruire une identité collective

Chaque année, la directrice artistique et générale du Jamais Lu s’allie à un artiste pour l’appuyer dans l’élaboration du thème et de la programmation de sa prochaine édition. Ces décisions sont prises selon les besoins actuels du milieu, des messages et des émotions importantes à véhiculer à travers la société dans le moment.

«Cette année, pourquoi Lyndz? Parce qu’il a participé au Festival comme cabaretier, comédien et animateur; il a traversé trois éditions de différentes façons. Tout le monde a envie de donner le meilleur de soi en sa présence, parce qu’il a un regard critique et analytique, et il apporte beaucoup de joie. J’avais envie de nous tirer vers le haut, vers un certain plaisir d’être ensemble et de se raconter ensemble», a raconté Marcelle.

Lyndz Dantiste. Photo: David Ospina.

Tous les deux réunis, Marcelle et Lyndz proposent une 23e édition du Jamais Lu Montréal à la fois rayonnante et réconfortante. Dans la foulée des textes reçus, un désir brûlant de reconstruire la société vers un avenir plus positif et rassembleur s’est fait sentir.

«On était beaucoup dans une culture d’identité, mais je sentais qu’il y avait un changement. Un théâtre où l’on arrête de parler de qui nous sommes pour l’intégrer dans cette culture. On a vraiment été happés, Marcelle et moi, dans cette saison où il y avait beaucoup de textes au sein desquels c’était justement cette ligne-là qui était au cœur. On ne va pas se le cacher, on cherche ce que ça veut dire, collectivement, cette identité québécoise-là, et je trouve qu’en ce moment, c’est important d’essayer de trouver ensemble les réponses et de voir ce que ça va donner», a expliqué le codirecteur artistique de la saison.

Ainsi, une vague de changements s’annonce dans la dramaturgie des années futures pour reconnaître les revendications passées et pour ainsi créer de l’espace pour l’adaptation et la bienveillance au sein de notre société.

Participants de la 23e édition du Festival du Jamais Lu Montréal. Photo: David Ospina.

Au programme:

Lors de ces neuf jours de festival, 26 événements théâtraux marqueront l’esprit du public québécois d’aujourd’hui à travers les thèmes de jeunesse, d’environnement, de classe sociale, de quota ethnique, de trafic de drogue, de dénonciation, de transidentités, d’histoires d’amour et d’amitié et plus encore.

La soirée d’ouverture, intitulée Uasheiau: trouer les nuages, met en scène l’artiste innue Soleil Launière et ses belles-filles, Élodie, âgée de 12 ans, et Éléonore, âgée de 9 ans. Dans cette performance, les enfants prennent le pouvoir et transmettent une énergie positive pour l’avenir.

Le cœur de la programmation comprend neuf lectures théâtrales québécoises, dont deux dédiées au public jeunesse et trois francophones hors Québec. Parmi ces potentiels chefs-d’œuvre en devenir, on retrouve des textes inédits de certains dramaturges connus tels que Steve Gagnon, Micha Raoutenfeld, Tamara Nguyen et Carolanne Foucher, ainsi que de belles plumes à découvrir.

Le Festival du Jamais Lu s’est d’ailleurs élargi au fil des ans pour se déployer dans les provinces environnantes, avec en plus deux éditions, Jamais Lu Paris et Jamais Lu Caraïbe. Le public aura donc la chance de connaître Lac artificiel de l’autrice française Marine Chartrain, Embarquement immédiat! de l’autrice guyanaise Emmelyne Octavie, ainsi que La Détente de l’auteur français Raphaël Gautier, qui a été le coup de cœur du Jamais Lu Paris 2023.

«C’est rare qu’on ait la chance de découvrir ces dramaturgies-là! C’est de la belle visite! Ça fait élargir les horizons du Québec, pour qui la francophonie est tant importante. Il faut s’intéresser à ce qui s’écrit. Certains enjeux sont similaires, mais les langues, les sons et la poésie sont différents, et c’est vraiment chouette à découvrir», s’est exclamée Marcelle avec enthousiasme.

À tous ces beaux événements s’ajoutent les 6 à 7 performance 100% gratuits, mettant en vedette sept artistes ayant carte blanche pour épater le public. Théâtre, slam, poésie et danse seront au rendez-vous.

Comme nouveauté cette année, La Grande Dictée Baroque réunira ceux et celles qui sont intéressé·es à se prêter au jeu le dimanche 5 mai à 14 h. Tout en testant leurs notions de français, les participant·es courront la chance de remporter un prix lors de cette dictée humoristique.

Le Festival se terminera avec la Fête à Lyndz: Plaisirs luminescents, où le public est invité «dans son salon». Des artistes ayant marqué son parcours professionnel offriront des performances uniques pour exprimer ce qui est important et urgent pour eux·elles avec Lyndz. Puis, au cœur de cette soirée, une Andromaque créole fera son apparition pour incarner le personnage du texte écrit par Lyndz lui-même. La fête se poursuivra dans la salle une fois la prestation terminée!

Il sera difficile de faire des choix parmi cette riche programmation. Lyndz a tenté de nous faire quelques suggestions en soulignant la soirée d’ouverture, mais il a lui-même eu du mal à choisir: «Tous les textes qu’on a programmés parlent d’un désir criant de montrer le nouveau visage de notre société, pas nécessairement dans la confrontation ou dans la revendication, mais dans l’acceptation de qui on est maintenant. Je pense que dans chacun des textes, même si certains sujets sont sombres, il y a un côté lumineux. En fait, il faut tout venir voir!»

Lecture théâtrale d’une édition précédente du Festival du Jamais Lu Montréal. Photo: Kevin Calixte.

Un public actif au sein des prestations

Le Jamais Lu s’adresse à tous ceux et celles qui s’intéressent au théâtre et à la littérature, peu importe qu’ils fassent partie du milieu ou non. Différente d’un spectacle, la lecture théâtrale se donne sans décor ni costume, mais elle est interprétée par des acteur·trices qui ont préalablement répété leur rôle. Cet unique échange permet non seulement aux auteur·trices de roder leurs textes, mais aussi au public de vivre le théâtre avec plus de liberté, tout en ayant la chance de participer à la naissance d’un texte dramaturgique.

«Le public est inclus, il fait partie à part entière du festival. Sans lui, le festival n’existe pas. Ce ne sont pas juste les textes qui sont importants, mais aussi le retour et l’intervention avec le public pour ceux et celles qui ont le souhait de participer», a ajouté le codirecteur artistique.

D’ailleurs, cette année, des «stations retours» permettront aux festivaliers d’écrire leurs commentaires et leurs interrogations directement aux auteur·trices afin que ces derniers puissent retravailler leur texte ensuite.

Pour conclure, Marcelle Dubois nous a partagé ce à quoi elle aspire par le biais du festival: «Au Jamais Lu, c’est la pertinence qui nous guide et l’actualité de ce dialogue entre les mots et sa communauté. Quand on dit “attiser la lumière, c’est que, pour nous, il semble que dans cette époque-ci, ce qui est important, c’est de dire que le mot “attiser est un verbe d’action. Ça nous appartient. Et la lumière, elle est souvent cachée par l’ombre de notre monde. Remettons-la au centre et prenons possession de notre parole et de notre plaisir de se retrouver à travers ça. Le devoir d’un festival, c’est d’être représentatif de sa communauté».

Photo du «quartier général» d’une précédente édition du Festival du Jamais Lu Montréal. Photo: Kevin Calixte.

Alors, profitez donc de ce fabuleux festival pour découvrir le talent inestimable d’auteur·trices de pièces à venir, et ce, dans une ambiance chaleureuse et tout à fait accessible au grand public. Le café du Théâtre Aux Écuries ainsi qu’une librairie éphémère montée par Le Port de Tête viendront également égayer votre visite en toute convivialité.

Sans plus tarder, consultez la programmation du Festival du Jamais Lu Montréal et réservez vos billets pour les performances qui vous intéressent au tarif solidaire de 25 $ pour tous les événements, au tarif régulier de 22 $ pour les soirées d’ouverture et de clôture, au tarif régulier de 17 $ pour les lectures théâtrales ou au tarif étudiant·es de 15 $. Jetez aussi un œil aux 6 à 7 gratuits! Pour vous tenir à jour sur les nouveautés, abonnez-vous aux pages Facebook et Instagram du Jamais Lu. Osez faire le plein de découvertes!

*Cet article a été produit en collaboration avec le Festival du Jamais Lu Montréal.

Nos recommandations :

Vos commentaires

Revenir au début