«Roméo et Juliette» à la Place des Arts: un spectacle romantique et tragique des Grands Ballets

L’apport du chorégraphe à l’histoire

La mise en scène est signée par le directeur artistique des Grands Ballets, Ivan Cavallari. Ce dernier a décidé de revisiter le récit, puisant son inspiration de Shakespeare, de Dante et de la littérature italienne.

Néanmoins, il a opté pour un ton plus moderne. Il a en effet ajouté quelques intrigues dramatiques au récit. Ainsi, l’histoire ne se concentre pas uniquement autour des deux jeunes amants. Il a introduit un nouveau personnage, celui de la Comtesse Guelfi, mère de Pâris et maîtresse de Lord Montaigu. Et il a même poussé l’audace en agrémentant la fiction d’une liaison entre Lady Montaigu et Lord Capulet! Une relation qui se terminera de façon effroyable…

Cavallari voulait de cette façon que l’histoire de Roméo et Juliette soit intemporelle, qu’elle ne cadre pas avec une époque en particulier. Pour cette raison, il a créé un décor et des costumes plutôt minimalistes.

Photo: Sasha Onyshchenko

Une vision colorée

Les costumes, imaginés par le chorégraphe, se distinguent autant par leurs couleurs que par leurs coupes contemporaines. Le brun, le vert, le jaune et l’orange sont ainsi à l’honneur, et certaines tenues sont à motifs géométriques, ce qui leur confère un certain esprit enfantin qui ne sied pas nécessairement à un ballet «adulte».

Les vêtements, pour leur part, sont surprenants et colorés! Une fois le choc initial passé, on apprécie la fluidité des robes. Nous aurions pu croire que cela aurait affecté l’aspect romantique de la pièce, mais les costumes deviennent rapidement secondaires.

En ce qui a trait au décor, inventé par Cavallari également, celui-ci est étonnant par sa simplicité: quelques arbres, une rivière et un ciel. Il n’y a aucun changement de décor. Il est vrai que ce type d’environnement est propice pour nous faire oublier toute référence au temps.

Et la magnifique musique de Sergueï Prokofiev a été interprétée avec passion et finesse par l’Orchestre des Grands Ballets, sous la direction de Jean-Claude Picard.

Les interprètes

Bien exécuté, ce ballet a toutefois connu quelques moments plus faibles. L’auditoire a pu remarquer que les danseurs éprouvaient des difficultés à soulever les danseuses et à les maintenir dans les airs. 

Ceci dit, les artistes de la troupe étaient pour la plupart extraordinaires. Kiara Felder était une Juliette tout à fait éblouissante; ses pas légers et joyeux ont séduit le public. Son sourire était lumineux et enchanteur. Elle a dansé avec délicatesse et confiance.

Malheureusement, le danseur qui a interprété Roméo était moins expressif et moins convaincant. Il semblait avoir une meilleure chimie avec ses deux amis trouble-fêtes…

Vanesa G. R. Montoya, qui personnifie la mère de Juliette, a été fantastique. Elle joue son rôle avec émotions et conviction. J’ai ressenti sa douleur dans les moments les plus poignants.

Célestin Boutin, qui interprète Mercutio, et André Santos, qui adopte les traits de Benvolio, ont tous deux été exceptionnels. Ils sont parvenus à éveiller un sentiment de sympathie auprès de la foule, qui a été autant impressionnée par leurs habiletés techniques que par leur sens de l’humour.

Maude Sabourin, quant à elle, a su tirer son épingle du jeu en offrant une prestation juste et réussie de la Comtesse Guelfi.

Une soirée captivante

Il y a eu plusieurs moments forts durant le spectacle! Entre autres, la scène où Mercutio se fait assassiner est saisissante, et elle n’a laissé personne indifférent. Le dernier tableau, où les jeunes amoureux se retrouvent dans la mort, est particulièrement touchant.

Ce fut réellement une soirée merveilleuse. La magie de Roméo et Juliette fascine, les nouvelles intrigues ont tenu les spectateurs en haleine et ont même revitalisé ce grand classique. Le ballet était captivant du début à la fin.