«Dans la peau de…» Olivier Piton, avocat et essayiste fasciné par la politique américaine

Olivier, bienvenue à cette série d’entrevues! C’est un plaisir de jaser avec vous. Vous êtes avocat en droit public français, européen et américain, et, par le passé, vous avez collaboré auprès de trois ambassadeurs de France aux États-Unis sur les affaires publiques et les relations gouvernementales. Vous avez même, de 2005 à 2010, créé et dirigé la cellule de stratégie d’influence de l’ambassade de France à Washington D.C. Racontez-nous brièvement ce qui vous a mené vers cette carrière!

«J’ai occupé ce poste à l’époque où nous vivions, nous Français, des tensions avec les Américains à la suite de notre opposition à la guerre du Golfe. J’ai donc fait partie d’une équipe chargée de défendre les intérêts de la France. Ce fut une expérience très enrichissante.»

En 2016, aux éditions Plon, vous avez fait paraître La Nouvelle Révolution américaine, un ouvrage à travers lequel vous souleviez déjà, à cette époque pas si lointaine, diverses interrogations face au futur de l’Amérique. Vous y abordez, entre autres, «l’image ambiguë, ambivalente, désenchantée» des États-Unis, alors acculé entre un national populiste et une sociale-démocrate interventionniste. Dites-nous ce qui vous a donné l’élan d’écrire cet essai.

«Fasciné par les États-Unis et la politique américaine, j’ai assisté, comme beaucoup d’autres, à l’irruption de Donald Trump dans la campagne de 2015-2016 en éprouvant le besoin de comprendre ce qui était en train de se passer.»

«Il mettait fin à une forme de consensus qui datait des années 1960 entre Républicains et Démocrates. Il abordait des thématiques jusqu’ici ignorées, par exemple la question identitaire, disparue depuis la fin de la ségrégation.»

«D’un autre côté, j’observais la campagne de sa rivale, Hillary Clinton, et je retrouvais en écho des erreurs que les progressistes européens commettaient, notamment sur cette obsession de la segmentation des électeurs.»

Plus récemment, le 27 septembre, vous avez publié votre second ouvrage, Kamala Harris la conquérante, un livre de près de 400 pages au sein duquel vous consacrez une vitrine exceptionnelle à cette première femme vice-présidente des États-Unis qui a certes ses chances de devenir la toute première présidente de la première puissance mondiale. «Yes she can!», ont d’ailleurs affirmé Michelle et Barack Obama. Et vous, alors? Croyez-vous qu’elle a en elle la force et la volonté nécessaires pour «incarner le futur apaisé d’une Amérique au bord de l’implosion»?

«Je pense que le clivage au sein de la société américaine est tel que ni Kamala Harris ni n’importe qui d’autre n’apaisera l’Amérique. Une génération doit probablement passer; les deux camps doivent aller au bout de leurs radicalités respectives afin que le camp de la Raison ne l’emporte à nouveau.»

«La personne qui incarnera ce renouveau ne se trouve pour l’heure ni à droite ni à gauche, et même si Kamala Harris devient la première femme présidente des États-Unis, la haine qu’elle suscite (autant que Donald Trump chez les démocrates) ne règlera malheureusement pas le problème.»

«Le mal-être américain, cette forme larvée de guerre de Sécession, continuera de nombreuses années…»

Sans tout nous dévoiler, bien sûr – on se doute que nos lecteurs et lectrices se feront un plaisir de lire cet ouvrage en entier! – pouvez-vous nous glisser quelques mots sur Kamala Harris, cette femme de 59 ans sur laquelle Joe Biden a reposé toute sa confiance, cette pionnière, devrait-on dire, et les circonstances qui l’ont mené, aujourd’hui, «à bousculer toutes les certitudes»?

«Kamala Harris est une combattante. Cela a failli d’ailleurs être le titre de mon livre, mais les éditeurs ont préféré la «conquérante». Elle a conquis, une à une, toutes les places fortes qui mènent à cette possibilité qu’elle a aujourd’hui à devenir peut-être une figure historique de l’histoire de son pays.»

C’est d’ailleurs sa plus grande qualité. Elle n’abandonne jamais. Juriste, procureure, sénatrice, vice-présidente, son parcours si brillant n’a toutefois jamais été un lit de roses. Et pourtant, sa force de caractère lui a toujours permis de rebondir plus haut qu’on ne pouvait l’imaginer.»

«Reste la dernière marche à gravir. Mon livre s’efforce de retracer toutes les étapes de sa progression pour montrer ce parcours hors norme.»

Et si on prenait un temps de réflexion pour imaginer les scénarios possibles au lendemain des élections présidentielles américaines? D’après vous, qu’est-ce qui attend le peuple américain, et par ailleurs le monde entier!, si Kamala Harris gagne ses élections? Et si elle les perd?

«Si elle gagne les élections, paradoxalement, le monde ne va pas énormément changer. Kamala Harris maintiendra les fondamentaux de la politique américaine, les alliances, les valeurs consensuelles du pays.»

«Si Donald Trump l’emporte, tout est possible tant l’homme est insaisissable. Son éventuel second mandat n’aura rien de commun avec son premier.»

Kamala Harris la conquérante d‘Olivier Piton, publié aux éditions Plon, est présentement en vente dans une librairie près de chez vous au coût de 24,95 $ (papier). Pour lire nos précédents articles «L’entrevue éclair avec» et faire le plein de découvertes, consultez le labibleurbaine.com/nos-series/lentrevue-eclair-avec.

*Cet article a été produit en collaboration avec Interforum Canada.