«Conte à rendre» au Théâtre Espace Libre – Bible urbaine

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«Conte à rendre» au Théâtre Espace Libre

«Conte à rendre» au Théâtre Espace Libre

Mon père chantait toujours

Publié le 20 septembre 2017 par Pierre-Alexandre Buisson

Crédit photo : Catherine Asselin-Boulanger

Alice a été élevée seule par son père, qui lui a aussi servi de mère suite au décès de cette dernière. Il ne s’est jamais remarié et il est donc devenu le «Père-Mère», faisant l’éducation de sa fille avec l’aide de sa mère à la langue bien pendue, elle aussi veuve, et elle aussi nommée Alice. Pendant qu’elle subit un interrogatoire pour un homicide qui a toutes les apparences de l’auto-défense, elle se remémore des segments de sa jeunesse et de la force de caractère familiale qui l’a forgée.

Dans ce très touchant ode à la monoparentalité du Théâtre Omnibus, dont la mise en scène est signée des six mains de Réal Bossé, Sylvie Moreau et Jean Asselin, l’univers parental est feutré, chaleureux et chantant. Le père (solide Jean Asselin) a toujours au bout des lèvres de joyeux odes à la vie et a sacrifié toute possibilité de vie sentimentale pour s’occuper de sa progéniture.

Ça commence avec un poêlon en fonte, une métaphore, on s’en doute bien, un objet en apparence anodin mais qui, dans cette famille, revêt l’aspect du sacré. Il est légué de mère en fille depuis plusieurs générations et devient l’arme du «crime» avec laquelle Alice empêche un drame conjugal de mal finir. Mais cette intrigue policière n’est qu’une trame de fond pour la vraie matière à penser dont l’habile trio de metteurs en scène nous nourrit.

La transmission des valeurs et le don de soi sont au cœur du récit, qui s’attarde aussi à l’individualité dans une société où tout le monde calque sa façon d’être sur des modèles Instagram.

Le spectre de la grand-mère plane constamment sur les pérégrinations de ce duo familial, la voix de Sylvie Moreau se lançant dans de touchants monologues dans un langage du terroir très cru, comme on en entend fort peu de nos jours. Le vocabulaire d’une grand-mère peu éduquée mais pourtant pleine de sagesse, qui ne fait pas de détours et qui parle avec son cœur.

Charles Préfontaine, dans la peau de l’enquêteur, fait ce qu’il peut avec un rôle surtout statique et secondaire. Andréanne Théberge, dans le rôle d’Alice, est une réelle révélation. La justesse de son ton et le niveau d’intensité avec lequel elle habite son personnage nous aide, en tant que spectateur,  à plonger entièrement dans l’action.

Et ce, malgré le décor minimaliste dans lequel se déroule la pièce, qui a parfois recours à une lente danse des comédiens, un enchevêtrement des corps qui ressemble à un état de grâce, et qui n’a rien d’incestueux – que la démonstration, avec de très belles images, de l’amour sincère que se portent un père et sa fille.

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Par Catherine Asselin-Boulanger

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