Le classique «Vol au-dessus d’un nid de coucou» au Théâtre du Rideau Vert

Cette journée-là, avant le coup d’envoi du spectacle, le Théâtre du Rideau Vert a tenu à rendre hommage à madame Janine Sutto, en gardant une minute de silence pour souligner son apport important à la scène culturelle québécoise. Le public est demeuré dans cette atmosphère de respect, même lorsque la scène s’est remplie de comédiens pour donner le coup d’envoi. Ce respect a perduré jusqu’à la fin, et celui-ci a probablement permis au public d’apprécier davantage l’œuvre qui fut présentée devant lui.

Dans une mise en scène de Michel Monty, la pièce débute avec l’opportuniste anarchiste Randle McMurphy, tel qu’on le connaît dans le film original de Milos Forman, dont le scénario était basé sur le livre de Ken Kesey. Celui-ci voulant éviter à tout prix la prison, il se fait passer pour un aliéné mental et voit une fenêtre d’opportunités à l’idée d’être interné en asile avec les fous. Comble de malheur, il y restera, mais entre-temps de nombreuses péripéties se produiront, faisant ressortir tout l’enjeu du respect de l’autorité.

Avec un décor réaliste, signé Olivier Landreville, qui fait ressortir le goût amer des murs d’hôpitaux, la pièce avance sur un fil linéaire. On y voit défiler une ribambelle de comédiens respectant au doigt et à l’œil les personnages originaux. C’est d’ailleurs bien haut la main qu’ils leur ont rendu hommage!

McMurphy, personnifié par Mathieu Quesnel, qui réussi à prendre toute la place que le personnage lui permet d’avoir, tentera par de multiples moyens de désobéissance de faire avaler la pilule de travers «en une semaine», tel qu’il le gage avec les autres patients, à la garde Ratched. Celle-ci, jouée par une Julie Le Breton qui ne semblait pas toujours en symbiose avec l’attitude du personnage, incarne dans la pièce l’absolue domination, tout en utilisant des pouvoirs de manipulation pour faire respecter les lois.

C’est ainsi qu’on y retrouve alors des jeux d’insubordination intéressants qui passeront de la pression sociale où McMurphy emmène les autres internés dans ses mauvais coups, aux insultes répétées à l’égard des figures de l’autorité, aux malaises crées à l’aide des faiblesses d’autrui, puis finalement à l’excès de colère qui, indubitablement, se transformera en ses derniers gestes conscients.

La pièce en entier est un modèle ingénieux confrontant la force de la coercition à la force de la volonté de la rébellion et de la liberté (ici perçue comme de l’anarchisme).

La fin laisse perplexe et emplit d’une empathie mitigée. Incapable de voir son ami n’être que l’ombre de sa personne, un interné se faisant appeler chef Bromden, personnifié ici par Jacques Newashish, ferme le livre. D’ailleurs, le comédien permet de garder le spectateur en haleine jusqu’à la fin. D’une attitude placide et irréprochable, il permet à la pièce de terminer sur une scène marquante et toute en puissance.

C’est finalement dans un respect absolu de l’œuvre classique qu’est Vol au-dessus d’un nid de coucou que le metteur en scène Michel Monty et sa troupe ont su, avec brio, se l’approprier durant presque 1 heure et 45 minutes.

Une question reste pourtant sur les lèvres: «Est-ce qu’il s’agissait réellement de la fin ou pourrait-on croire à un coup monté?»