Le Patin Libre a commencé sa série de spectacles à l’aréna Saint-Louis!

Un patinage rafraîchissant (sans jeu de mots)

Alors que le patinage traditionnel met parfois l’accent sur des figures imposées et connues (sauts, portés, tours…), le collectif du Patin Libre nous emmène vraiment ailleurs. D’abord, nous sommes sur la glace, notre vision est donc horizontale et à échelle humaine. Cette configuration apporte un nouveau regard sur la composition dans l’espace, mais aussi sur la vitesse. Lorsque les cinq interprètes tracent leur chemin d’une extrémité à une autre de la glace, la sensation de vitesse est palpable et assez jouissive quand la masse arrive vers nous et se détourne au dernier moment.

Rapidement, nous comprenons l’expérience sensible que propose cette nouvelle forme de patinage. L’accès aux expressions des visages est direct; les courants d’air provoqués par les corps qui nous frôlent viennent provoquer en nous de véritables frissons; et bien sûr, la fraîcheur de la glace même nous plonge dans le même milieu physique que les cinq protagonistes, à savoir Alexandre Hamel, Pascale Jodoin, Samory Ba, Jasmin Boivin et Taylor Dilley.

Le travail gestuel du corps 

Davantage proche du patinage de vitesse ou du corps de hockey, la recherche de mouvement est assez claire et solide. Le haut du corps est penché sur des genoux bien pliés, les bras sont placés pour accompagner à l’unisson le mouvement des jambes et lorsque le groupe joue sur des effets de pulsations, l’axe vertical s’accorde et s’ajuste pour trouver un pouls commun.

D’un point de vue spatial, étant donné le rapport au public – assis à chacune des extrémités de l’ovale -, la composition joue beaucoup sur la distance plus ou moins grande pour observer la danse. Parfois, certaines séquences sont répétées d’un bout à l’autre pour offrir à chaque spectateur la possibilité de voir le mouvement de près ou de loin. Cette perspective est très intéressante et Le Patin Libre n’hésite pas à jouer avec ces paramètres.

La musicalité de la glisse 

Accompagné par la trame musicale de Jasmin Boivin (l’un des patineurs), le quintette se livre à de beaux changements de rythme dans Threshold. Très à l’écoute les uns des autres, le groupe trouve dans plusieurs passages des moments de chorus. En jouant sur des suspensions d’avant en arrière, le collectif se balance et compose instantanément un effet visuel mais aussi auditif. Balancement méditatif qui nous fait du bien…

En lien avec le thème – trouver la ligne où tout bascule -, le jeu d’influences entre les corps se dessine dès le premier tableau. Comment l’approche d’un corps lancé sur la glace fait bouger le reste du groupe? Quel est le dernier moment pour se détourner et ne pas laisser les corps s’entrechoquer? Comment circuler en patinant à haute vitesse en groupe, en trouvant chacun sa trajectoire unique? Les réponses sont visuelles. Et c’est justement à l’intérieur de ces points d’interrogations que la matière et le fond du sujet se créent pour le collectif de patinage contemporain.

Un groupe émouvant

Si la notion de collectif ne peut se deviner sans le papier, ce groupe dégage une cohésion et une humilité très touchante. Chaque interprète prend sa place au sein de l’entité et glisse avec un respect de l’autre palpable. Ce qui n’empêche pas d’entrevoir des singularités et de très beaux abandons physiques, notamment dans le corps d’Alexandre Hamel, mais les rapports entre eux restent très simples et modestes. Et quel plaisir de regarder du patinage sans applaudissements attendus et convenus après chaque figure «difficile». Car Le Patin Libre est tout à fait virtuose dans son approche et dans sa façon de glisser ensemble dans la danse sur glace.

Pour l’harmonie de ce groupe et pour le balancement méditatif de Threshold, je recommande fortement d’aller vous habiller chaudement et de réserver votre siège/coussin sur la glace de l’aréna Saint-Louis.

Il reste encore plusieurs occasions jusqu’au 22 avril!