«Malaise dans la civilisation» d’Alix Dufresne et Étienne Lepage à La Chapelle Scènes Contemporaines – Bible urbaine

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«Malaise dans la civilisation» d’Alix Dufresne et Étienne Lepage à La Chapelle Scènes Contemporaines

«Malaise dans la civilisation» d’Alix Dufresne et Étienne Lepage à La Chapelle Scènes Contemporaines

Les invasions barbares

Publié le 21 novembre 2022 par Pierre-Alexandre Buisson

Crédit photo : Gunther Gamper

Chez le dramaturge Étienne Lepage, l’absurdité du propos est souvent accompagnée par la comédie physique. Il nous semblait donc tomber sous le sens qu’il s’allie à la metteure en scène Alix Dufresne, qui accorde toujours une importance capitale au mouvement du corps et à l’action scénique dans son travail. Le fruit de leur collaboration, présenté comme un «vivarium philosophique», aux frontières du vaudeville, soulève davantage de questions qu’il n’apporte de réponses.

Quatre amis entrent dans un théâtre, d’abord craintivement, et explorent les lieux avec une certaine curiosité. Après un moment de flottement et d’incertitude, ils commencent à se sentir comme chez eux. Les découvertes qu’ils effectuent sont accidentelles, et l’endroit est plein de dangers potentiels.

On s’interroge sur le lien qui unit les personnages; Renaud Lacelle-Bourdon étonne avec son look de rockeur décharné en lendemain de brosse, et Alice Moreault semble habillée en monitrice de camp de vacances. Lorsqu’on découvre l’ensemble des décors et des costumes, en fait, on pourrait croire qu’ils ont été achetés exclusivement au Village des Valeurs.

Pourtant, cet aspect kitsch et suranné est tout à fait approprié.

Car c’est à un âge de découvertes manifestes que nous renvoie l’ensemble de ce Malaise. Naïveté enfantine, querelles physiques, explorations émerveillées, blessures inattendues, boîtes à lunch où l’on découvre parfois de peu ragoûtantes surprises. Les personnages pourraient être des enfants, maladroits et impulsifs, qui philosophent avant l’âge.

Photo: Gunther Gamper

Il y a d’ailleurs un moment plutôt désarçonnant dont l’effet comique est décuplé par l’inattendu, où Renaud (la frontière entre l’interprète et le personnage est aussi mince que le prétexte de la prémisse) explique à Alice en quoi consiste le jeu qu’il a intitulé «La découverte de soi-même», et où il fait semblant d’être invincible.

Des enjeux nietzschéens apparaissent alors, ainsi qu’un bref discours sur l’imputabilité.

Les personnages, évidemment, finissent par perdre le contrôle, à la fois canidés dans une allée de quilles, et bovidés dans une boutique de fine porcelaine. En voulant bien faire, ils laissent derrière eux l’endroit dans un piteux état, et c’est au spectateur de faire un parallèle avec la métaphore de son choix.

Une conclusion surprenante, mais inévitable.

Cette pièce, créée au FTA en mai 2022 puis retravaillée lors de quelques laboratoires, offre des parallèles avec Logique du pire, un autre texte de Lepage qui a été créé en collaboration avec un chorégraphe (Frédérick Gravel) et diffusé au FTA (en 2016).

On croit un instant, au départ, être devant des situations purement improvisées, avant d’avoir une vue d’ensemble des engrenages parfaitement alignés et de conclure, en même temps que la représentation se clôt, qu’on a plutôt affaire à une production à la mécanique implacablement précise.

La magie d’Étienne Lepage, après un interlude qui nous a rendus perplexes, fonctionne encore.

La pièce «Malaise dans la civilisation» en images

Par Gunther Gamper

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