«Le ravissement» d’Étienne Lepage au Théâtre de Quat’Sous – Bible urbaine

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«Le ravissement» d’Étienne Lepage au Théâtre de Quat’Sous

«Le ravissement» d’Étienne Lepage au Théâtre de Quat’Sous

Révolte neurasthénique

Publié le 1 novembre 2019 par Pierre-Alexandre Buisson

Crédit photo : Yanick Macdonald

Arielle, une jeune femme profondément apathique, à la limite de la catatonie, décide un jour, sans élément déclencheur autre que son anniversaire de 18 ans, qu’elle ne répondra plus aux attentes de son entourage. Sa mère a prévu une fête pour célébrer son passage à la majorité? Tant pis, elle ira voir son copain. Son copain se sent soudainement frivole et prend les devants pour initier une relation sexuelle. Elle refuse. Les conventions des hommes ne l’intéressent plus, comme si elle avait sans crier gare décidé de faire uniquement des choses dont elle a envie.

Mais de quoi a-t-elle envie, au juste? C’est une question que n’élucide pas le dramaturge Étienne Lepage, dont le précédent texte produit, Toccate et fugue, remonte à 2017 au Théâtre d’Aujourd’hui. Réunion avec Claude Poissant, qui avait signé la mise en scène de sa première production (Rouge gueule) il y a dix ans, Le ravissement se veut un conte philosophique sur l’émancipation. Les intentions sont nobles, mais le résultat final l’est un peu moins.

La pression de ses pairs, le conformisme, entrer dans le rang, correspondre aux attentes de son prochain… voilà des petites violences auxquelles fait face Arielle, interprétée par Laetitia Isambert. Jusqu’au jour où elle décide abruptement de ne plus s’y plier. Son entourage semble être composé de psychopathes, car aucun des personnages ne propose une réaction tempérée ou empathique, et la violence semble être la norme. Veut-on ici condamner la masculinité toxique? Rien n’est moins clair.

La mère, interprétée par Nathalie Mallette, vocifère ses ultimatums et passe d’une émotion à l’autre; le copain, personnifié par le souvent fort intense Simon Landry-Désy, la diminue et laisse planer la possibilité d’une rupture; et son patron (Étienne Pilon, en grande forme), d’un immense narcissisme, perd son aplomb en quelques minutes devant le laconique objet de son désir. Les réactions de tous les personnages sont impulsives et primaires, ne cadrant guère avec leurs (brefs) portraits psychologiques.

Il serait dommage d’éventer ici les rebondissements de l’intrigue, mais nous nous contenterons de déplorer qu’ils soient aussi improbables qu’agaçants.

Trop réaliste pour être grand-guignolesque, le ton clinique de l’ensemble s’apparente tout de même au cinéma de David Lynch, sans cependant en offrir l’esthétisme. L’ambiance que l’on associe habituellement à l’inventif réalisateur fait cependant défaut à la pièce, et outre les quelques rares répliques qui suscitent des rires francs, on passe la durée de la production à se demander s’il y a un niveau de lecture qui nous échappe.

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