«Past Lives» de Celine Song: l’œuvre du destin

La scène d’ouverture montre deux hommes et une femme qui discutent autour d’un verre dans un bar branché. Les voix hors champ – des personnes assises au bar – s’interrogent sur leur histoire. Elles semblent croire que les deux personnes d’origine asiatique forment un couple; leur énergie dégage une attirance mutuelle, mais la réalité est tout autre.

Teo Yoo (Hae Sung), Greta Lee (Nora) et John Magaro (Arthur). Photo: Tous droits réservés

Un amour perdu

Lorsqu’elle n’avait que 12 ans, Nora (Greta Lee) se voyait déjà épouser Hae Sung (Teo Yoo), mais quand toute sa famille part vivre en Amérique, elle s’éloigne de son amour de jeunesse et perd tous ses repères. Quelques années plus tard, les deux amis se retrouvent grâce à internet, mais le moment n’est pas opportun et ils ne peuvent se réunir.

Ils se promettent de se retrouver dans quelques années encore…

Mais, entre-temps, Nora trouve l’amour auprès d’un Américain nommé Arthur (John Magaro) et, même si une partie d’elle est toujours attachée à Hae Sung, il lui semble désormais être un parfait étranger: Nora a abandonné son pays et ses coutumes lorsque sa famille et elle se sont établies en Amérique, et Hae Sung est encore «tellement coréen», comme elle l’indique à son mari lorsque Hae Sung – qui dit venir pour des vacances – lui rend visite à New York.

Cette distance éloigne désormais les deux amis autrefois inséparables.

Arthur semble réellement troublé par le fort lien qui unit sa femme à cet inconnu, qui vient bouleverser leur vie. Pour le rassurer, Nora lui explique que leur relation n’a pas été en mesure de s’épanouir depuis longtemps. «C’était juste un gamin dans ma tête pendant toutes ces années», lui confie-t-elle.

Une histoire atypique

Loin d’être une histoire d’amour traditionnelle, il s’agit plutôt d’une réflexion face au destin et à ce qui aurait pu être, si les circonstances avaient été différentes. Que se serait-il passé si Nora était restée en Corée du Sud?

Le thème de l’identité est également abordé. En quittant son pays à un jeune âge, les racines coréennes de Nora se sont rompues et elle s’est adaptée à un mode de vie américain. Elle est maintenant totalement différente de la jeune fille que Hae Sung a connue.

Les images – des paysages de New York et de Séoul – sont magnifiques et permettent de prendre conscience des deux univers bien différents dans lesquels évoluent les protagonistes.

Greta Lee dans le rôle de Nora. Photo: Tous droits réservés

Le film est profondément humain et la sensibilité avec laquelle le sujet est traité est admirable. Les acteurs réussissent bien à transmettre les émotions sans en faire trop.  L’histoire, qui est inspirée de celle vécue par la réalisatrice, est bien ficelée malgré les sauts dans le temps.

Les silences, qui sont présents à de nombreuses reprises, sont d’une grande importance. Ils permettent de ressentir la tension et laissent de la place aux émotions, qui submerge les personnages principaux tout au long du film.

Ne pas trouver les mots peut être très révélateur.

En somme, ce premier long métrage de Celine Song est bien réussi et vaut la peine d’être vu. Cependant, il est fortement suggéré d’utiliser des sous-titres, puisque les protagonistes communiquent entre eux uniquement en coréen.

Past Lives est accessible aux abonnés de Prime Video.