CinémaCritiques de films
Crédit photo : Immina Films
Nerveux comme pas un, Ricardo (Jean-Carl Boucher), maintenant âgé de 24 ans, se rend aux auditions de la désormais célèbre téléréalité diffusée sur les ondes de Radio-Canada. Après s’être qualifié pour l’aventure, il sent enfin qu’il est sur le point de devenir quelqu’un d’important.
Soudainement pris par un sentiment de supériorité, il se permet de botter le derrière de tous ceux et celles qui l’ont rejeté (incluant Marie-Ève Bernard, celle qui a fait battre son cœur dans 1991!), avant de s’envoler vers des pays éloignés dans le but de concevoir des courts métrages qui seront ensuite évalués par des professionnels du milieu du cinéma.
À la recherche de bons sujets de films, il fera la rencontre d’individus parfois intéressants et d’autres fois plutôt pénibles.
Des moments cocasses dignes de ses prédécesseurs
Le très comique Yunnis (Shadi Janho, une belle découverte), croyant que son histoire d’amour ferait un film palpitant, ne lâchera pas le jeune Québécois d’une semelle, allant jusqu’à maladroitement briser sa précieuse caméra. Désemparé, Ricardo devra se rendre aux douanes égyptiennes afin de mettre la main sur une nouvelle caméra envoyée par l’équipe de La Course, ce qui sera la source de bien des maux de tête pour lui.
Des formulaires de toutes sortes à remplir, des allers-retours à l’ambassade du Canada, et les fameuses étampes, toutes ces péripéties donneront naissance à un moment aussi drôle que décourageant.
Dans ce rôle qu’il reprend pour la quatrième fois au grand écran, Jean-Carl Boucher est toujours aussi touchant et dégage une belle authenticité. Les nombreuses anecdotes vécues par son personnage lui collent littéralement à la peau.
La mère de Ricardo, la charmante Claudette (interprétée de manière convaincante par la talentueuse Sandrine Bisson), ne tient pas en place tant elle est excitée de voir son fils à la télévision. Celle qui semble toujours être sur le point de faire une crise de nerfs arrive toujours à nous faire rigoler.
Une œuvre plus mature
Ce dernier film autobiographique se distingue des précédents par son ton plus sérieux. La vie d’adulte, avec son lot d’épreuves et de responsabilités, fait en sorte que Ricardo gagne progressivement en maturité au fil du temps.
Dans 1995, il est possible d’avoir un avant-goût de la relation avec son père Benito (Claudio Colangelo). Le patriarche italien, inquiet quant à l’avenir de son fils, arrive finalement à se rendre compte du talent de ce dernier.
Il finit par décrocher le téléphone pour l’appeler, alors que celui-ci se trouve à l’autre bout du monde, pour enfin lui dire à quel point il est fier de lui, ce qui donne lieu à un moment touchant entre les deux hommes.
La naïveté si caractéristique de Ricardo est cependant encore bien présente. Il s’agit sans contredit de l’un des éléments les plus attrayants de cette série de films.
Sa relation amoureuse – il envoie des cartes postales à sa belle Chantale partout où il va – témoigne assurément de cette belle candeur. Depuis que sa copine lui a avoué qu’elle croit que leur relation fait trop «chum-blonde», il ne cesse de se demander ce que ça peut bien vouloir dire.
Sacrifier les émotions au profit des rires
Le réalisateur a cependant privilégié les moments cocasses – qui sont racontés en long et en large – plutôt que d’accorder une plus grande importance aux émotions.
L’anecdote entourant l’obtention de la fameuse caméra aux douanes égyptiennes, qui occupe plusieurs minutes du film, aurait sans doute pu être raccourcie afin de nous permettre d’en découvrir davantage sur les courts métrages conçus lors de La Course.
Ses débuts en tant que réalisateur sont quand même censés être l’élément central du film après tout!
La relation entre Ricardo et sa figure paternelle aurait, elle aussi, pu bénéficier qu’on s’y attarde plus longuement. Le fait que le père du jeune homme, qui s’est toujours fait plus sérieux et plus discret, ose finalement se laisser aller à ses émotions, est attendrissant et aurait pu amener encore plus de profondeur à l’histoire.
On a parfois l’impression que le cinéaste n’ose pas inclure trop d’éléments plus personnels qui pourraient teinter son film d’une touche plus dramatique (peut-être parce qu’il s’agit à la base d’une comédie). La relation avec les membres de famille en est un bon exemple.
Le long métrage se termine d’ailleurs sur cette relation père-fils, avec les pensées les plus intimes de Ricardo, qui avoue s’ennuyer de son père (Benito Trogi est décédé en 2012).
Cependant, même si le réalisateur survole ses relations, préférant plutôt s’intéresser à sa formation professionnelle, le film est tout de même très divertissant.
Il va sans dire que Ricardo Trogi est un conteur né et que l’on est privilégié∙e d’être témoins de certains épisodes de sa vie qu’il veut bien nous faire découvrir, toujours avec une bonne dose d’auto-dérision.
Bien que 1995 n’arrive pas à surpasser les films précédents en termes d’humour, il arrivera tout de même a décrocher des sourires et quelques rires au passage, en plus de toucher une corde sensible chez certain∙e∙s. De quoi nous faire espérer une suite des folles aventures de Ricardo. Il plaira assurément à ceux et celles qui ont apprécié 1981, 1987 et 1991. Sur ce, bon cinéma!
L'avis
de la rédaction