LittératureDans la peau de
Crédit photo : Julie Artacho
Marianne, on est ravis de pouvoir échanger avec toi! Toi qui es «auteure de romans, d’histoires qui font rire, pleurer et réfléchir», voudrais-tu nous dire d’où t’est venue la piqûre pour la littérature?
«Probablement depuis que je sais écrire! Au primaire, je remplissais mes cahiers Canada d’histoires, j’en imaginais avant de m’endormir, je chérissais déjà le rêve d’écrire des romans quand on me demandait ce que je voulais faire plus tard.»
«J’ai grandi dans une famille où les sorties à la bibliothèque étaient sacrées, où on valorisait énormément la lecture. En vieillissant, j’ai été beaucoup inspirée par les autrices dont je dévorais les romans, j’étais du genre à dépasser du double le nombre de mots permis dans une composition écrite.»
«J’ai toujours été dans mon élément lorsque vient le temps de coucher mes inspirations sur papier. J’ai étudié en psychologie pour satisfaire ma curiosité envers l’humain, puis en communication pour retrouver mon goût de mettre les idées en mots sur le marché du travail, mais la dernière année m’a fait renouer avec mes premières amours pour les histoires intenses qui me font perdre la notion du temps, alors qu’elles prennent forme sur mon clavier. J’ai laissé tomber les cahiers Canada. :-)»
Il paraît que tu adores «débattre, discuter et refaire le monde». Peux-tu nous partager tes sujets de prédilection, et nous dire à quoi ressemblerait un monde meilleur, selon tes critères?
«Wow! C’est toute une question! Et je crois que la raison pour laquelle j’adore refaire le monde vient probablement du fait qu’on ne trouve jamais la réponse parfaite. On pourrait en débattre pendant six heures et encore trouver des nuances, des aspects inexplorés qui continueraient de nous animer le temps d’une prochaine bière.»
«C’est de loin mon activité préférée, surtout si la bière est bonne! J’ai travaillé quelques années dans le milieu communautaire, c’est certain que mes sujets de prédilection touchent souvent les sphères politiques et sociologiques pour un monde égalitaire, les luttes contre la pauvreté et l’exclusion sociale.»
«Je lis beaucoup d’essais féministes, j’adore les œuvres qui visent à déconstruire des modèles préétablis, qui nous présentent une pluralité de façons d’être en relation, qui viennent élargir nos horizons. Je suis toujours partante pour une discussion enflammée, et prête à ce qu’on vienne chambouler mes propres idées. J’aime aussi transposer cette propension au débat à mes personnages, et même leur attribuer des opinions qui ne sont pas nécessairement les miennes.»
Ton roman Sauf que Sam est mort est paru aux Éditions Hurtubise le 13 octobre dernier. Tu y abordes le thème du deuil et de la perte, puisque Sam, l’amoureux d’Alexandra et le meilleur ami de Jean-Thomas, meurt brusquement. Quelles ont été tes inspirations derrière cette histoire qui explore, entre autres, les relations amoureuses et amicales?
«Les inspirations et la création de toute pièce se sont beaucoup entremêlées, mais je dirais que ma propre vingtaine m’a donné envie de livrer un récit pour adulte qui explore différentes facettes de cette période de la vie, où on se remet souvent en question en comparant nos propres chemins à ceux des autres. Ce sont des années où la liberté est immense, mais où les choix qui encadreront la suite de nos vies se font pressentir.»
«Je me suis aussi laissé inspirer par les romans qui me captivaient quand j’étais adolescente, les grosses briques qui nous font oublier de voir la lumière du jour et qui nous transportent dans l’intensité. Je dis souvent que j’ai écrit un livre que j’aurais aimé lire, parce que j’étais à la recherche d’un roman pour adultes qui me donne le même effet, qui ne fait pas de compromis sur les émotions qu’on tente un peu de modérer en vieillissant.»
«J’ai voulu y aborder l’amour et l’amitié sans les édulcorer, un peu comme on le fait à l’adolescence en laissant nos émotions et nos relations prendre toute la place dans nos vies.»
Face à cette perte commune, Alexandra et Jean-Thomas décident d’unir leurs forces et d’affronter ensemble l’absence d’une personne qui était chère à leurs yeux. Quel genre de relation et quels liens vont-ils nouer, à travers ce défi de la vie?
«Au début du livre, on comprend qu’Alex et Jean-Thomas viennent de passer le premier mois suivant la mort de Sam à l’écart l’un de l’autre, bien qu’ils étaient complètement fusionnels tous les trois avant cet événement tragique. Chacun avait l’impression d’empiéter sur le deuil de l’autre, parce qu’il est difficile de dire lequel des deux l’aimait le plus.»
«En se réunissant aux funérailles, ils arrivent à retrouver un peu de lumière, à se reconnecter avec la beauté de leur passé et à se rappeler Sam sans avoir à cacher leur peine. Leur façon de vivre leur deuil se retrouve teintée de ce qu’ils étaient auparavant, dans une relation un peu coupée du monde, intense, émotive et encore une fois très fusionnelle.»
«On comprend à travers les retours dans le temps pourquoi Alex et Jean-Thomas en arrivent à se suffire à eux-mêmes, dans une période où leurs proches essaieront de les soutenir sans grande ouverture de leur part. De nombreux défis se présentent à eux, parce que Sam était le centre de leur vie. Trouver un équilibre, penser à l’avenir, entretenir d’autres relations leur apparaît impossible, et je crois qu’il est facile de se mettre à leur place.»
À court ou moyen terme, as-tu d’autres projets créatifs en lien avec l’écriture? On se demande si tu es déjà en cours de rédaction d’un nouveau livre, par exemple…
«J’ai énormément écrit dans la dernière année. Je dirais même que je ne me suis jamais arrêtée! Sauf que Sam est mort a ouvert la porte à mon processus créatif effréné, au plaisir que j’ai à écrire. Alors, oui, ce n’est vraiment pas le dernier. Quelque chose me dit qu’en 2022, l’automne sera encore ma saison préférée. ;)»