«L'entrevue éclair avec...» Mélissa Perron, auteure dont le désir est de mettre en lumière les femmes autistes – Bible urbaine

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«L’entrevue éclair avec…» Mélissa Perron, auteure dont le désir est de mettre en lumière les femmes autistes

«L’entrevue éclair avec…» Mélissa Perron, auteure dont le désir est de mettre en lumière les femmes autistes

L'écriture, pour faire la paix avec son histoire et partager son vécu

Publié le 27 août 2021 par Éric Dumais

Crédit photo : Julie Artacho

Dans le cadre de «L’entrevue éclair avec…», Bible urbaine pose 5 questions à un artiste ou à un artisan de la culture afin d’en connaître un peu plus sur sa personne, sur son parcours professionnel, ses inspirations, et bien sûr l’œuvre qu’il révèle au grand public. Aujourd’hui, nous avons jasé avec l'auteure Mélissa Perron, qui a levé le voile, le 25 août dernier, sur son plus récent roman publié aux Éditions Hurtubise. Dans Belle comme le fleuve, la suite tant attendue de Promets-moi un printemps, le lecteur s'attachera d'autant plus à Fabienne, alors qu'elle reçoit un diagnostic d'autisme sur le tard. Découvrez un roman qui vous aidera assurément à mieux comprendre ce que les personnes atteintes d'autisme traversent au quotidien!

Mélissa, on est curieux de savoir: d’où t’est venue la piqûre pour la littérature?

«Je sais que c’est cliché, mais j’ai toujours voulu écrire des romans. Le problème, c’est que jusqu’à la fin de ma trentaine, je n’ai pas pu le faire. J’étais en perpétuelle quête pour me comprendre, savoir ce que j’avais, et surtout ce qui me différenciait des autres. J’avais une vision en tunnel qui m’empêchait de pouvoir m’asseoir et de vous raconter des histoires.»

«Or, j’ai lu beaucoup d’ouvrages sur le corps humain, dont des livres de médecine et de psychologie. Des auteurs qui font du bien, des recueils de poèmes aussi. Je cherchais partout un indice qui aurait pu m’aider à trouver ce que j’avais. Naturellement, ça m’a emmené à lire énormément et à aimer le contact avec les livres. J’ai appris à aimer aller à la bibliothèque et passer des heures dans les rayons.»

«J’ai souvent manqué des jours d’école parce que c’était anxiogène pour moi. Mais j’ai rarement manqué un cours de français! En secondaire deux, mon enseignante prenait du temps à la fin des cours pour lire mes rédactions aux élèves. C’était gênant, mais tellement gratifiant. C’est d’ailleurs à elle, Madame Savard, que j’ai dédié Promets-moi un printemps. Elle a vraiment su voir en moi la petite étincelle…»

À quoi ressemble ton quotidien en tant que femme qui cumule les chapeaux de maman, artiste qui peint la porcelaine et auteure? Tu dois être bien occupée, on suppose!

«Ce sont effectivement des journées très occupées, mais c’est surtout que, depuis un an et demi, c’est juste insatisfaisant et frustrant. Quand on fait beaucoup de chose en même temps, on les fait rarement parfaitement.»

«Quand je peins, j’ai besoin d’être dans ma bulle, de plonger dans ma création, d’être seule. C’est la même chose quand j’écris. Je dois m’asseoir toujours à la même place, avec la même musique dans mes écouteurs. Comme tout le monde, la pandémie a chamboulé mon horaire, ma routine. Je fais de mon mieux, mais j’aimerais souvent avoir le superpouvoir de ne pas dormir pour avancer dans mes projets.»

«Quant à mon rôle de maman, je le fais déjà depuis 18 ans, et c’est évidemment ma plus grande fierté. C’est vrai que je cumule les chapeaux, mais c’est un réel bonheur. Je me trouve chanceuse d’être remplie de projets et d’ambition. Je suis occupée mais heureuse!»

«Je répète souvent à mes lecteurs: merci de m’avoir lu. Avec la vie qu’on a, c’est souvent un luxe de se poser et de lire. Juste le fait de savoir qu’ils consacrent ce temps à mes romans, c’est un beau et grand compliment. J’en suis très reconnaissante. Un livre vit sous les yeux des lecteurs.»

Ce 25 août, tu as dévoilé ton nouveau roman Belle comme le fleuve aux Éditions Hurtubise. Dans ce livre – qui est la suite de Promets-moi un printemps paru en 2019 –, on retrouve le personnage de Fabienne, récemment diagnostiquée autiste et en pleine remise en question dans sa vie en général. Il semblerait que tu aies toi-même été diagnostiquée autiste sur le tard, à l’âge de 38 ans: est-ce un moyen de faire la paix avec ton histoire et de partager aux autres ce que tu as vécu?

«Lorsque celle qui m’a évalué m’a dit qu’elle n’avait pas de doute, que j’étais bien autiste (Asperger), j’étais déjà en paix avec le diagnostic, mais pas avec mon histoire. C’est une grande nuance.»

«J’ai eu rapidement ce grand désir de mettre en lumière les femmes autistes, mais pas nécessairement celui de partager tout ce que j’ai vécu. J’ai positionné Fabienne dans des situations où les lecteurs peuvent mieux comprendre comment elle se sent et comment elle réagit. Elle explique aussi tout ce qu’elle doit faire pour naviguer en société:

«En marchant vers le dépanneur, j’me suis rappelé les trucs de base quand on parle aux gens: – regarder dans les yeux; – attendre son tour pour parler; – me concentrer sur ce que l’autre dit, et non sur la texture de la couleur de ses cheveux.»

«On se rend compte à quel point une simple conversation peut devenir complexe, voire anxiogène. C’est rarement fait de façon naturelle. Fabienne revendique le fait qu’elle est libre et qu’elle veut enfin vivre comme elle est, mais l’autisme est là, et elle doit composer avec son lot de petits et grands défis au quotidien.»

Et alors, en quoi penses-tu que l’histoire de Fabienne interpellera tes lecteurs et lectrices, ainsi que leur entourage?

«Dans Promets-moi un printemps, Fabienne découvre qu’elle est en dépression. Ça fait deux ans que le livre est sorti et, chaque jour, depuis (et c’est vrai!), je reçois des messages de gens qui me remercient de l’avoir écrit, d’avoir traité de ce sujet aussi délicatement. Ils me disent que le livre est lumineux et que Fabienne est attachante.»

«Dans Belle comme le fleuve, Fabienne reçoit un diagnostic d’autisme tardivement. Je crois que beaucoup de femmes se reconnaîtront en elle. Je pense aussi que ça pourrait aider celles qui se posent des questions pour les aider à aller plus loin dans leur cheminement. Pour l’entourage de ces filles et de ces femmes autistes, Belle comme le fleuve contribuera probablement à leur permettre de mieux comprendre l’autisme. Et c’est en toute humilité que je vous le dit: si j’avais lu un roman semblable avant de recevoir mon diagnostic, ça m’aurait grandement aidé. Je me serais sentie moins seule, et j’aurais probablement fait des recherches spécifiques sur l’autisme Asperger au féminin.»

«C’est le temps de mettre en lumière cette partie du spectre, et j’espère que Belle comme le fleuve pourra y contribuer.»

À plus ou moins long terme, as-tu déjà d’autres projets d’écriture en tête? On aimerait beaucoup savoir si tu comptes rester dans la fiction ou te lancer dans un livre témoignage, peut-être?!

«C’est une bonne question! La magie avec l’écriture, c’est qu’on peut tricoter avec des vérités. Pour ce qui est d’un livre-témoignage, même si je considère que j’ai eu un parcours de combattante, je ne sais pas si j’ai envie de l’écrire. Peut-être plus tard? Peut-être si on me le demande…»

«Pour le moment, j’ai surtout envie d’inventer des histoires, de faire vivre de grandes choses à mes personnages: des voyages intérieurs, de grands bouleversements, et des petits miracles. J’aime décortiquer le quotidien, extirper ses beautés, mettre ses défauts sous la loupe.»

«J’ai commencé l’écriture de la suite de Belle comme le fleuve et je suis si heureuse de retrouver Fabienne!»

Pour lire nos précédents articles «L’entrevue éclair avec» et faire le plein de découvertes, consultez le labibleurbaine.com/nos-series/lentrevue-eclair-avec.

*Cet article a été produit en collaboration avec les Éditions Hurtubise.

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