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Crédit photo : Tous droits réservés, Chants Libres
Des chorales paroissiales aux planches des grandes scènes internationales
Originaire d’un petit village néo-brunswickois, Nathalie Paulin a grandi entourée de musique et de chant. Puisque le piano et les chorales constituaient visiblement une partie intégrante du quotidien de l’Acadienne, c’est tout naturellement qu’elle a complété un baccalauréat ainsi qu’une maîtrise en chant à l’Université de Montréal.
«Je n’avais pas la prétention de croire que j’en ferais une carrière, mais c’est quelque chose qui me passionnait à un point tel que je savais que je n’allais pas être prise de court, que j’allais trouver une avenue dans ce monde-là.» – Nathalie Paulin
De fil en aiguille, la soliste s’est dirigée vers le métier de soprano, notamment en se démarquant lors de sa participation à de nombreux concours. Sans aucune hésitation, Nathalie m’a confié que le concours de l’Orchestre symphonique de Montréal (OSM) qu’elle a remporté ex aequo avec Aline Kutan, en 1993, a joué un rôle majeur dans sa carrière. «Ça a été très important, pour moi, d’avoir la reconnaissance des artistes et des juges que j’admirais beaucoup. C’était fort d’être récompensée pour toutes ces heures de travail. J’ai des frissons en y repensant.»
Même si son occupation principale demeure l’enseignement du chant et de la mélodie française à l’Université de Toronto, Nathalie se réjouit de sa rigueur des dernières années qui la mènera la semaine prochaine sur les planches du Monument-National à incarner le personnage de Tamara dans l’opéra L’orangeraie.
Un prélude émouvant, qui a donné le ton à l’opéra durant la pandémie
Sous la direction de Pauline Vaillancourt, qui s’est alliée à la cheffe d’orchestre Lorraine Vaillancourt et aux musiciens du Nouvel Ensemble Moderne (NEM) pour monter cet opéra de toutes pièces, le spectacle a d’abord été adapté au contexte sanitaire, plus tôt en janvier, dans Prélude à l’opéra, une mise en bouche webdiffusée de l’œuvre alors en préparation.
N’ayant pas pu prendre part à l’aventure, Nathalie Paulin avait toutefois déjà été conquise par cet avant-goût. «C’est tragique, c’est beau. J’étais très émue, je l’ai reçu avec beaucoup d’émotions», m’a-t-elle confié.
Ce prélude a entre autres permis aux auditeurs de s’imbiber de l’environnement sonore et visuel de Pauline Vaillancourt et de son équipe, et a permis à la soliste de réfléchir davantage sur son personnage.
Notons que L’orangeraie, parue en 2013, est à la base un roman qui traite de l’enfance et de la guerre. Retravaillée par Larry Tremblay lui-même pour l’opéra, chaque scène nous amène donc à suivre le parcours tragique des jumeaux Amed et Aziz, deux enfants qui se retrouvent pris malgré eux dans l’engrenage de la guerre.
«L’orangeraie, je l’ai lu dès qu’on m’a choisie pour la production, et j’ai tout de suite compris pourquoi c’est une œuvre qui avait autant touché Pauline [Vaillancourt]. Ça m’a foudroyée, c’est très touchant».
Ayant été approchée par Pauline, fondatrice de la compagnie Chants Libres, Nathalie Paulin a d’emblée accepté de jouer le rôle de la mère des jumeaux.
Une mise en musique d’une grande richesse signée Zad Moultaka
Pour sa première adaptation à l’opéra, L’orangeraie sera mise en musique par le compositeur franco-libanais Zad Moultaka, reconnu pour la beauté de son écriture vocale et sa musique riche de l’esthétique de deux mondes, l’orient et l’occident. Nathalie Paulin m’a partagé son coup de cœur pour celui qui fera vibrer les voix et les instruments des artistes: «C’est un compositeur tellement ouvert, généreux et soucieux de trouver ce qui va donner aux voix le caractère qu’il entend.»
Sa musique, «très riche, très complexe, très troublante, très dense, mais tellement belle», aux dires de l’Acadienne, joue assurément un rôle clé dans la mise en place de cet opéra. D’ailleurs, la complexité de la musique a été un beau défi pour la soprano. «C’est un gros travail d’oreille de trouver où sont nos sons et de rendre le tout naturel et théâtral, de trouver une façon libre d’exprimer le texte derrière cette complexité-là».
Sous la direction musicale de la cheffe d’orchestre Lorraine Vaillancourt, l’opéra L’orangeraie promet d’être très puissant, tant sur le plan sonore qu’émotif.
La soliste a donné comme conseil aux spectateurs de rester ouverts et de se laisser imbiber par cet environnement sonore, par le traitement du texte, et par le traitement des événements tragiques qui sont imbriqués dans la partition. Elle suggère de laisser le message de paix et de liberté d’expression créatrice nous imprégner: «Il y a de très belles choses qui sortent de cette œuvre-là, qui est en essence très dense, mais où il y a beaucoup de beauté. Il faut être ouvert à la recevoir.»
Pour la suite des choses, Nathalie Paulin continue de s’impliquer dans divers projets à travers l’Amérique du Nord, et continuera de se concentrer à son métier d’enseignante à l’université. Elle célébrera notamment la Journée internationale de la Francophonie le 20 mars prochain en compagnie de ses élèves, car elle se donne aussi comme mission, en parallèle du chant, de faire vivre la langue de Molière à travers la musique.
«C’est très important, pour moi, de mettre du temps et de l’énergie pour aider à la dissémination du répertoire français et de célébrer notre langue», a-t-elle souligné en guise de mot de la fin.
C’est donc un rendez-vous au Monument-National les 19, 20 et 21 octobre ainsi qu’au Théâtre Le Diamant de Québec les 5 et 6 novembre prochains pour voir, sur scène, les chanteurs Nicholas Burns (Amed), Arthur Tanguay-Labrosse (Aziz), Dion Mazerolle (Soulayed), Alasdair Campbell (Halim), Stéphanie Pothier (Dalimah), Jacques Arseneault (Zahed), Simon Chaussé (Kamal), Nathalie Paulin (Tamara) ainsi que le comédien Jean Maheux (Mikaël) donner vie aux univers de Larry Tremblay et de Zad Moultaka!