Osheaga 2019, jour 1 avec: des Lumineers aériens, une Mitski envoûtante et une annulation qui fait mal!

St. Paul & The Broken Bones: une vieille âme funky

Les pauvres musiciens de Birmingham, en Alabama, se souviendront de l’édition 2019 d’Osheaga; leur compagnie aérienne a perdu leurs bagages! Qu’à cela ne tienne, ils arboraient tous un coupe-vent blanc identique, ce qui illustrait bien le sentiment d’unicité qui les lie. Sur scène, les huit membres ont offert une prestation solide et bien fignolée. Leur mélange de soul et de funk aux accents rock, voire blues par moments, a séduit les festivaliers qui étaient toutefois moins nombreux en début de journée. Qu’à cela ne tienne, leur bonne humeur contagieuse a fait dandiner le public.

Ils ont ouvert le bal avec «Flow With It (You Got Me Feeling Like)», un morceau très soul et rétro, bien exécuté. Le chanteur, Paul Janeway, possède une très bonne voix, bien qu’enrouée et nasillarde, et surtout un charisme incroyable. Sa joie, ses cris aigus et ses quelques pas de danse ont créé un engouement sur le parterre, comme lors d’un bain de foule. Ils ont enchaîné avec les titres «Like a Mighty River», avec ses sonorités blues, et la très funky «Grass Is Greener». Ils se sont permis d’improviser sur «Got It Bad», avant d’offrir une reprise de Tom Waits, «Make It Rain».

St. Paul & The Broken Bones a conclu son segment avec la séduisante «Call Me» et la ballade langoureuse «Broken Bones & Pocket Change».

Sharon Van Etten: présence délicate

Van Etten et ses quatre comparses ont fait une entrée discrète sur scène. Elle a amorcé son concert avec «Jupiter 4» et, très rapidement, elle s’est mise à s’animer. Le son, malheureusement, était mal balancé, étouffant légèrement sa jolie voix. À l’entendre, on soupçonne qu’elle a dû affectionner Tori Amos et PJ Harvey lorsqu’elle était adolescente, et ce, même si elle offre une musique plus folk et rock. Elle a poursuivi avec la rythmée «Comeback Kid», où son charme a opéré tout en délicatesse, tandis que ses musiciens se sont montrés davantage détachés. En fait, ils n’ont eu que très peu d’interactions entre eux ou avec Van Etten.

La pièce «No One’s Easy to Love», malgré qu’elle fut bien interprétée, a été reçue plutôt timidement, tandis que «One Day» a suscité une meilleure réaction de la part de la foule. Le morceau passif agressif «Hands» a été livré avec beaucoup d’énergie, un contraste avec sa voix très douce.

Les titres les plus marquants furent sans contredit «Seventeen» et «Serpents». Le public présent a apprécié la nature délicate et sensible de la chanteuse et musicienne du New Jersey, cependant, il était peu démonstratif.

Kodaline: recette éprouvée

Le groupe irlandais aux allures de boys band a offert un spectacle particulièrement apprécié par la foule. Le public, plutôt jeune, connaissait le répertoire de Kodaline et a chanté et dansé avec beaucoup d’entrain. Ils ont débuté tout en douceur avec le titre «Follow The Fire», aux touches électros, et «Brand New Day». Sans perdre un instant, ils ont enchaîné avec «Ready», ce qui a créé un émoi sur le parterre. Malgré sa mélodie entraînante, «Head Held High» est passée plutôt inaperçue.

La chanson «The One», pour sa part, a provoqué de fortes réactions, et ce, malgré le fait que le groupe s’est trompé dans la chanson. De vrais professionnels, ils se sont repris très rapidement et ont continué de jouer. Après ce titre, la foule, visiblement entichée de la formation, était conquise et a chanté les refrains. Il y a eu plusieurs moments forts lors de la dernière moitié de ce spectacle. Les musiciens ont su démontrer une aisance naturelle sur la scène, bien qu’un peu plus de spontanéité aurait dynamisé une prestation un peu trop polie.

Les deux dernières pièces, «All I Want» et «High Hopes» étaient une excellente façon de conclure, la foule était enchantée et avait le sourire aux lèvres.

Gucci Mane: écouter une cassette… 

La prestation de Gucci Mane a plutôt mal commencé. Il y a eu un léger retard et, surtout, des problèmes de son. Les sons graves étaient trop bas par moment et les micros fonctionnaient particulièrement mal. Ce concert laissait peu de place pour l’improvisation: le DJ qui accompagnait le MC d’Atlanta s’est contenté de faire défiler à toute vitesse les morceaux les uns après les autres, et j’avais l’impression d’entendre un mix digne d’un club plutôt que des chansons indépendantes.

Le rappeur, pour sa part, était à peine audible. Malgré son entrain, le fait que ce concert reposait davantage sur une bande sonore préenregistrée a éventuellement eu raison des spectateurs, qui quittaient peu à peu le parterre. En mode rafale, le public a eu droit à une multitude de pièces, dont «Bricks», «Lemonade», «Freaky Gurl», «Pillz», «Black Beatles», «Trap House», «Slippery», «Wasted,» «Wake Up In The Sky» et «Fresh Out».

C’est dommage, car les chansons de Gucci Mane ont du rythme. Si ce spectacle avait été mieux structuré, cela aurait pu être l’une des prestations les plus courues.

Mitski: magnétisme envoûtant 

La chanteuse a décidément offert l’un des spectacles les plus intéressants de cette première journée d’Osheaga.

Sur scène, sa présence est indéniablement forte. Elle a su conserver un visage stoïque et un regard perçant tout en chantant avec émotion ses chansons. La mise en scène, c’est-à-dire sa chorégraphie et ses accessoires (une table, une chaise et un pied de micro) servaient à merveille ses titres. Elle a su être dramatique grâce à ses pas de danse simples et efficaces; aucun mouvement n’était superflu. Sa voix était chaleureuse ou colérique, exactement lorsqu’il le fallait. La foule présente était visiblement familière avec le répertoire de la chanteuse nippo-américaine. Elle l’a encouragée et a chanté avec elle.

Dès le premier titre, «Why Didn’t You Stop Me?», le public était hypnotisé. Et le charme de Mitski n’a pas été rompu. Elle a poursuivi avec «Old Friend», «Francis Forever» et «Dan the Dancer». Mais lorsque «Washing Machine Heart» et «I Will» ont retenti, l’excitation a grimpé d’un cran. La guitare abrasive de «I Don’t Smoke» a certainement fait de l’effet, tandis que l’angoisse de  «First Love / Late Spring» était palpable. Le succès «Nobody» a ravi les admirateurs et elle a chanté, tel un crooner, de façon tout à fait exquise «Liquid Smooth». «Thursday Girl» et «Your Best American Girl» ont réellement plu aux festivaliers. Elle a promis de terminer avec un bang, et c’est exactement ce qu’elle a fait avec une interprétation explosive de «Drunk Walk Home». 

Ce concert, intense et sophistiqué, était un pur délice.

Découvrez les prestations de Tom Walker, Denzel Curry, Rosalia, Interpol, Kurt Vile et The Lumineers à la page suivante avec notre collaborateur Édouard Guay!