«TIERRA» de Ginette Laurin et Jens Van Daele à la Place des Arts

Le lever du soleil

On entend d’abord un chant qui vient de la scène. Le chant s’intensifie, un léger spectre de lumière éclaire la danseuse au micro. On dévoile ensuite la scène où une zone circulaire est tapissée de poudre blanche. Les danseuses entament la danse, formant une ligne qui s’adresse au public. La gestuelle s’agite graduellement et transmet tantôt de la force, tantôt une sorte de désespoir. La musique produite en live, ajoute une ambiance tribale. Un spot mobile se déplace au-dessus des danseuses, suivant le cercle tracé au sol. Cette lumière symbolise l’éclairage d’un astre comme la poudre au sol rappelle la terre, mais aussi la volatilité du passage de l’homme sur la planète.

La terre et ses symboles

Le thème de la pièce est cohérent avec ce que l’on perçoit. Que ce soit en terme de son ou de visuel, tout se lie à la terre. L’éclairage donne tantôt l’impression d’être la lune qui gravite autour de la Terre, tantôt imite le soleil lorsqu’il n’est pas en mouvement. On peut y voir l’enchaînement des jours, le côté éphémère des choses. Le cercle au sol, faisant office de planète ou d’habitat, prend parfois des allures d’arène de combat, de lutte contre le temps qui passe et l’impuissance de l’Homme. L’intervention d’un ventilateur à quelques moments crée une sorte de tempête, soulève la poussière du sol, offrant à la fois un beau paysage, mais aussi l’image de la résilience de l’homme devant les choses qu’il ne peut contrôler. Bref, la scénographie donne des référents terrestres, mais qu’en est-il de la danse?

Tout au long de la pièce, on traverse différents soli et parties de groupe. Les moments où les interprètes prennent la scène en même temps dégagent une aura puissante et laissent place à une gestuelle organique, fluide, où s’enchaînent travail de partenaire et moments de folie individuelle. On pense à une tribu ou une famille, car le contact est parfois fort et combattif, parfois doux et sensible. Les sections de soli quant à elles montrent des séquences de mouvements plus cassées, un bouger différent, moins naturel que ce qui se trouve quand le groupe se meut en même temps. Le côté plus mécanique des soli implique une sorte de contradiction avec tout le reste, mais peut-être est-ce voulu. Ou peut-être est-ce là une des traces du travail à deux têtes, un hoquet chorégraphique scindant la proposition des créateurs.

En bref

TIERRA présente de solides interprètes aux capacités impressionnantes qui bougent au son d’une musique vibrante et enveloppante. Cependant, la collaboration des deux chorégraphes a créé une pièce fort bavarde; on finit par s’y perdre dans une succession de mouvements formant un discours difficile à suivre. L’œuvre comporte un visuel attrayant, une gestuelle intéressante, mais une accumulation de tableaux dont la valeur, par moments, est discutable.

Les spectateurs gourmands y trouveront leur compte, alors que d’autres seront rassasiés avant la fin du spectacle.