«En vogue avec…» Emma Guitton, co-créatrice et designer de la compagnie montréalaise Beurd

Emma, on a récemment découvert ta marque en surfant sur le web! On aimerait que tu nous parles de ton parcours. Plus spécifiquement,  quand as-tu eu le déclic pour la mode, la création et la couture? On est curieux!

«Pas de déclic, pas de prise de conscience! Quand j’étais petite, j’aspirais à devenir designer de mode ou éleveuse de loups. Mais je n‘étais pas douée dans les matières scientifiques, et j’ai vite compris que tenir un loup en vie nécessitait des aptitudes. Je me suis donc dirigée naturellement vers la mode.»

«Je n’ai pas suivi un cursus classique. J’ai étudié les arts appliqués et la communication visuelle, puis j’ai travaillé dans des maisons de mode, tout en apprenant à coudre pendant mes heures de lunch! À la place de manger, je fabriquais des sacs (à ne pas prendre en exemple!).»

Tu as créé Beurd en collaboration avec Thibault Bicchieray, un collègue que tu décris comme étant «capable de vendre sa mère au marché noir si on lui lançait le défi»! Comment êtes-vous devenus partenaires d’affaires dans cette aventure, et quel est son rôle au sein de la compagnie?

«Thibault et moi sommes un couple au travail comme dans la vie! Il y a des siècles, je lui ai dit vouloir créer une marque de vêtements. Thibault, qui possède une formation en marketing, voulait se lancer en affaires. Beurd est alors né!»

«Il gère maintenant tout ce que je ne sais pas faire, c’est-à-dire la relation avec nos clients directs et indirects, la sérigraphie, le service après-vente, la gestion des litiges, etc. Il sait porter les choses lourdes (il sera content de m’entendre dire ça…), ce qui nous rend très complémentaires!»

Beurd est une compagnie fièrement montréalaise… et toi et ton collaborateur, vous êtes les deux originaires de France! Vous semblez avoir à cœur la promotion de la culture d’ici et vous privilégiez le savoir-faire québécois et la conception montréalaise. Parle-nous un peu de votre histoire d’amour avec le Québec!

«Depuis 2009 maintenant, Montréal nous a adoptés. Nous sommes tombés amoureux de la ville et nous avons eu à cœur de promouvoir une partie de sa culture. Nous sommes certes Français, mais la marque Beurd est purement montréalaise. En commençant par son nom, qui souligne l’emploi des deux langues nationales: c’est une transformation du mot «oiseau» en anglais, donc bird, et dite selon une phonétique à la française.»

«Puis, nos influences ont beau être internationales, notre clientèle cible est ici, ainsi que notre siège social et nos sous-traitants. Il me plaît de faire des allers-retours plusieurs fois par semaine pour aller voir l’atelier de coupe avec qui nous collaborons dans Ahuntsic, pour discuter avec ma couturière à Longueuil ou encore pour visiter ma patronnière à Chambly.»

Photo: Marie-Laure Buisson

Votre marque de vêtements met de l’avant des pièces de streetwear funky et rétro toujours à prix abordables. En tant que designer, où trouves-tu tes idées, et comment passes-tu de tes premières esquisses à la finalisation d’une collection?

«Évidemment, j’essaie de me tenir à l’affut des tendances du streetwear dans le monde et de manière plus ciblée en Amérique du Nord. Les inspirations viennent ensuite presque de manière inconsciente, devant un film d’époque, une vieille série, en découvrant un nouveau pays (quand c’est possible), ou encore en tombant sur un tissu particulier…»

«Il faut savoir que Beurd ne se veut pas une marque engagée, mais si on voulait promulguer un message, ce serait que, devant le sérieux de la vie, il faut laisser place à l’humour. C’est donc notre spécialité qui fait parler de nous: le print all-over.»

«Nous imaginons et dessinons tous les motifs, puis nous faisons imprimer nos designs sur des rouleaux de coton, et nous travaillons avec plusieurs petites compagnies familiales, à Montréal, pour couper et assembler le produit.»

«C’est de cette manière que des Montréalais peuvent se vêtir d’un Merman en embonpoint assumé, d’une féministe qui mange du Tim Hortons, d’un sketch de Ryan Gosling rappelant que l’acteur est Made in Canada.»

«On cache des blagues “tu préfères” à l’arrière des étiquettes et on insère des pénis cachés sur des motifs saturés. Nous réalisons ainsi du linge urbain qui se démarque!»

Qu’est-ce qui te rend le plus fière en tant que créatrice et co-fondatrice de ta propre marque, et quels projets rêves-tu de réaliser dans le futur?

«D’une part, je suis fière d’avoir réalisé mon rêve de petite fille. Je gagne ma vie en dessinant des vêtements. De l’autre, je suis ravie d’avoir réalisé mon rêve d’adulte: je suis mon propre boss! Bien sûr, notre entreprise n’est pas “accomplie”, on a plein de projets pour Beurd, et on espère vivement que la marque connaîtra un bel avenir.»

Photo: Beurd

Vous avez récemment présenté une collaboration avec l’équipe du film La déesse des mouches à feu, une œuvre réalisée par Anaïs Barbeau-Lavalette d’après le roman à succès de Geneviève Pettersen. Parle-nous brièvement de ce projet, et y-a-t-il autre chose qui se profile à l’horizon pour Beurd?

«Dans La déesse des mouches à feu, on rencontre Catherine, qui vit une entrée fulgurante et bouleversante dans l’adolescence. Ancrée dans l’univers grunge des années 90, l’exploration mouvementée de Catherine fait de ce film une œuvre aussi émouvante qu’intense. Nous avons créé deux items illustrant des scènes iconiques du film et où se déploie le caractère libre et explosif du personnage principal, celui de Catherine.»

«Face aux enjeux que le film suscite, l’équipe de La déesse des mouches à feu et nous-mêmes nous sommes associés à La Fondation Tel-jeunes, qui assure la continuité de Tel-jeunes et de LigneParents. Ces services d’intervention offrent, à toute heure du jour et de la nuit, une oreille professionnelle, un soutien, un cœur à l’écoute. Une superbe collaboration que nous avons pris plaisir à vivre»

«Et, en plus de notre sortie de collection SS 2021 sortie en avril dernier, oui, il y a des choses qui se profilent pour Beurd, mais ça, vous le saurez bien assez vite…»

Pour découvrir nos précédentes chroniques «En vogue avec…», visitez le labibleurbaine.com/En+vogue+avec…