Musique
Crédit photo : Montage: Isabelle Lareau
Les découvertes et les nouveautés
Donzelle – Presse-jus
La seule et unique Donzelle lance, enfin!, de nouvelles chansons à se mettre sous l’oreille. En effet, Parle parle, jase jase est paru il y a (déjà) dix ans. L’attente en valait certes la peine; les paroles sont toujours aussi incisives, et le rythme, sournois, nous donne indéniablement l’envie de bouger.
Son univers est à la fois kitsch et moderne, puisant son inspiration dans la musique des années 90, tout en offrant une sonorité propre à l’artiste. Ce son si distinctif transpire à travers les collaborations qui constituent Presse-jus; la chanteuse a en effet travaillé avec un beat maker différent pour chacune de ses pièces (Numéro#, Stéphane Lafleur (Avec pas d’casque), LOULOUXIV (Lust), Fabrizia Difruscia (Random Recipe), Philippe Brault et Cerne (Bronswick)).
Étant donné que Donzelle est également une artiste qui accorde une place de choix à l’identité visuelle, elle présentera un vidéoclip pour chacun des dix titres. Le disque est, par ailleurs, très varié; nous avons apprécié des morceaux comme «Génie» dont le rythme est lent et électro, et d’autres comme «Sticky Boy», aux saveurs dancehall, qui est d’ailleurs très intéressante. «Jalousie», avec son petit côté jungle, est particulièrement entraînante.
Alfa Rococo – L’amour et le chaos
Cette nouvelle galette s’inscrit dans le style du duo, mais semble, cette fois, plus lumineuse et électro que les efforts précédents. Surtout, l’auditeur remarquera que les textures sont plus sophistiquées et plus riches. L’ambiance qui en émane est joyeuse; pourtant, Justine Laberge et David Bussières explorent des thématiques parfois lourdes telles que le bonheur entaché par les aléas de la vie, l’individualité (la très bonne «Danser dans l’ombre»), l’authenticité à notre époque, la dépendance et la relation que nous avons avec le temps.
Le résultat est surprenant: on y découvre une très belle progression par le biais de jolies pièces aux accents pop. Le titre «Incendie», malgré ses paroles dramatiques et imagées, est un petit bijou aux sonorités hop la vie!, et elle est particulièrement pétillante. Bien que légèrement obscur, «Le temps qu’il faut I» est un extrait dansant, autant organique que techno. Les admirateurs de la formation seront ravis de ce nouvel opus qui est disponible depuis le 1er mai.
Kandle – Damned If I Do
Nous connaissons et aimons Kandle pour sa noirceur poétique et enchanteresse, une identité musicale qu’elle assume et utilise à plein escient. Sur Damned If I Do, le rythme est ici plus entraînant et davantage rétro, une nouvelle ambiance qui illustre à merveille son don pour la musique accessible et ténébreuse. De plus, l’offrande est musicalement riche et chaleureuse, bien que toujours aussi sombre que sa parution précédente, In Flames (2014). Affligée de violentes migraines, la musicienne a décidé d’utiliser sa douleur chronique comme source d’inspiration, de transformer une situation pénible en art.
La chanson «When My Body Breaks» en est un excellent exemple. Il s’agit une collaboration sur laquelle on peut entendre la voix très rauque et ô combien réconfortante de Peter Dreimanis (de la formation canadienne July Talk) ainsi que Sam Goldberg de Broken Social Scene, un allié de longue date. Ce titre est sans contredit l’une des pièces de résistance de ce mini-album de cinq chansons. «Bender», avec son aspect sale et vieux jeu, offre une ligne de basse digne de la chanson «I Put a Spell on You» de Screamin’ Jay Hawkins. Le maxi sera disponible dès le 11 mai.
Les revenants d’entre les morts
A Perfect Circle – Eat The Elephant
Les attentes étaient spécialement hautes, peut-être trop, envers le groupe qui n’avait pas lancé de disque depuis quatorze ans. Et malheureusement, ce nouvel opus nous laisse sur notre faim. Très mélodique, avec beaucoup de piano, et très lyrique, l’album déstabilise. Si ce n’était pas de la voix de Maynard James Keenan, on ne reconnaitrait pas la formation de Los Angeles.
La hargne a laissé place à une désolation qui frôle le cliché face au contexte sociopolitique. Le sujet est pertinent, mais la passion n’y est pas, même que la guitare a perdu de son mordant. Par moments, on entend l’influence de Tool dans la musique de cette autre incarnation de Keenan, qui délaisse le chant, c’est-à-dire qu’il met moins en relief les variations émotives vocales auxquelles il nous a habitués, et détache les mots comme s’il récitait un texte.
Les paroles sont moins personnelles, poursuivant ainsi dans une tangente déjà amorcée, mais les commentaires sociaux ont un petit quelque chose qui sonne faux.
À surveiller ce mois-ci:
Cœur de pirate – En cas de tempête, ce jardin sera fermé
Béatrice Martin est de retour et nous offre une visite de son jardin intérieur qui a, visiblement, souffert de plusieurs tempêtes déchirantes. Sa vie personnelle ayant été relatée dans les médias à maintes reprises, et étant très honnête dans le cadre de ses entrevues, on comprend rapidement qu’il s’agit, pour Coeur de pirate, d’un album très intime. Viol conjugal, regrets amoureux et contraintes d’une relation de couple peu réconfortante, la pianiste exprime avec poésie le mal qui la ronge. En cas de tempête, ce jardin sera fermé sera disponible à compter du 1er juin.
Chromeo – «Bad Decision»
Le pauvre Dave 1 tombe pour une femme qui l’encourage à prendre une succession de mauvaises décisions ayant des répercussions dangereuses sur le portefeuille de ce dernier. Chanson rigolote grâce aux rythmes funk à saveur rétro de P-Thugg, elle sera sur le disque qui n’est pas sans nous rappeler Prince, Funkadelic et Parliament.
Très accrocheuse, cette pièce a été lancée afin de nous faire patienter jusqu’à la sortie du prochain album, Head Over Heels, qui sera dans les bacs des disquaires le 15 juin.
Beat Market – «All Good»
Le duo électro instrumental montréalais est de retour! Il nous présente un avant-goût, l’extrait «All Good», tiré du maxi qui paraîtra cet été. Un nouvel album complet verra le jour en 2019.
Pour le moment, «All Good», un titre joyeux et délicat, est une ode sympathique aux premiers rayons de soleil d’une saison chaude que se fait encore attendre: