«Dans la peau de...» Simon Predj, véritable conteur d'histoires à glacer le sang – Bible urbaine

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«Dans la peau de…» Simon Predj, véritable conteur d’histoires à glacer le sang

«Dans la peau de…» Simon Predj, véritable conteur d’histoires à glacer le sang

Ars Moriendi, du balado au livre

Publié le 11 décembre 2020 par Mathilde Recly

Crédit photo : Lawrence Côté-Collins

Chaque semaine, tous les vendredis, Bible urbaine pose 5 questions à un artiste ou à un artisan de la culture afin d’en connaître un peu plus sur la personne interviewée et de permettre au lecteur d’être dans sa peau, l’espace d’un instant. Cette semaine, nous avons interviewé Simon Predj, un passionné d'horreur qui vient tout juste de faire paraître son livre La mort en héritage: Histoires vraies et insolites de meurtres en famille aux Éditions de l'Homme.

Simon, à quand remonte ta fascination pour le cinéma d’horreur et les histoires à glacer le sang? On est curieux de savoir pourquoi tu es accro aux sueurs froides et à la chair de poule!

«Tout ce qu’on découvre – et qu’on vit – dans notre enfance semble nous marquer au fer rouge. Je pense que c’est ce qui m’est arrivé. J’ai vu le vidéoclip et court-métrage «Thriller» de Michael Jackson alors que j’avais à peine 4 ou 5 ans. Mon amour des monstres a été instantané. La même année, j’ai vu A Nightmare on Elm Street, donnant ainsi naissance au premier cauchemar dont je me souvienne.»

«Ma passion première, c’est le cinéma d’horreur. En grandissant, je voulais devenir concepteur d’effets spéciaux. En 2014, j’ai lancé un podcast, Les oubliettes, pour parler de cinéma de genre avec mon comparse Olivier Bigonesse. J’aimais beaucoup raconter des morceaux d’histoires ainsi que l’origine des films d’horreur.»

«C’est là que j’ai ouvert la boîte de Pandore en me plongeant dans le true crime: j’ai ainsi constaté que les histoires vraies avaient inspiré les films et qu’elles étaient bien pires que la fiction qui en découlait. Ça a insufflé un second souffle à mon excitation qui accompagne la peur. Parce que c’est ce qui plaît lorsque l’on regarde un film d’horreur: l’adrénaline de la peur. Comme quand on va faire des manèges. J’aime tout de l’horreur, son design, son art, ses émotions fortes, son originalité et les réflexions que ça m’apporte sur qui nous sommes.»

Actuellement, on te sait très actif avec ton projet de balados, dans lequel tu racontes une série de cas réels sur les meurtres les plus insolites de l’histoire. Pourquoi avoir choisi ce médium et que signifie exactement Ars Moriendi, le titre que tu lui as donné?

«Ars Moriendi, qui se traduit du latin par «l’art de mourir» ou «l’art de la mort» est un texte publié après la peste noire pour aider les gens à apprivoiser leur mort et celle de leurs proches, depuis qu’il n’était plus possible pour les prêtres de venir donner les derniers sacrements, les rangs étant décimés.»

«Le message de ces écrits était simple: «La mort est inévitable, préparez-vous à mourir au lieu d’en avoir peur». C’est le propos que je voulais mettre en avant. Si j’ai choisi le podcast comme médium, c’est parce que je trouve que, sans support visuel, une histoire d’horreur est beaucoup plus terrifiante. Si on regarde un film, par exemple, notre imagination n’est pas active. Nous sommes esclaves des images qui se déroulent devant nos yeux. Mais si nous n’avons que l’audio, là, notre imagination se met au travail pour créer l’univers dans notre tête.»

«Les peurs, quoique similaires, diffèrent d’une personne à l’autre. Donc, chacun se forme sa propre image de la scène, agrémentée de ses anxiétés personnelles et de sa vision de ce qui est terrifiant. Je trouve très intéressant que l’auditeur recrée la scène que je raconte dans son imaginaire, à sa manière, avec son propre bagage.»

«La peur que l’histoire crée a alors beaucoup plus d’impact sur l’auditeur, car elle est à l’image des cauchemars de celui-ci, inconsciemment. En prime, le podcast m’offre toute la liberté dont j’ai besoin pour raconter tous les détails d’une affaire, aussi morbides soient-ils. Pour ça, je dois remercier la station qui me diffuse, CHOQ.ca, pour leur confiance.»

Ton livre La mort en héritage: Histoires vraies et insolites de meurtres en famille est paru ce mois de novembre aux Éditions de l’Homme. Au fil des pages, on y découvre «quelques-unes des histoires les plus effroyables de meurtres intrafamiliaux». Dis-nous tout: où es-tu allé chercher tous ces faits divers aussi incroyables que sordides?

«J’ai pour mon dire: «Si vous pouvez l’imaginer, ça a déjà eu lieu, et probablement de façon pire que ce que vous croyez». Il suffit de «déterrer l’histoire». Dès que j’ai choisi mon thème, je connais les sujets que je souhaite traiter et me mets à leur recherche. Je creuse, encore et encore, pour trouver des histoires qui me parlent et me touchent, dans les livres, sur internet, dans les articles de journaux d’époque… L’inspiration est omniprésente, mais il faut savoir où chercher.»

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En fait, au-delà d’une simple remémoration des faits, tu tiens à offrir à tes auditeurs et à tes lecteurs une certaine analyse – ou piste de réflexion – pour tenter de mieux comprendre les motivations du criminel. Comment décortiques-tu chacune de ces affaires, et comment arrives-tu à tirer des leçons de ces histoires qui montrent le côté le plus sombre de l’humain?

«Je pense qu’il faut regarder au-delà des mots. Quand je lis sur une affaire, je m’en imprègne et m’y plonge tête première. Quand un point de l’affaire attire mon attention, je suis sa trace le plus loin possible pour en trouver son origine. C’est généralement là que se terre ce que je cherche, et quand je mets la main dessus, la bête émaciée est généralement en boule dans les ténèbres, à frissonner et gémir.»

«Suffit d’être un peu curieux. Il faut regarder plus loin que l’acte en soi. Derrière chacun de nos gestes se cache tout un univers, un algorithme complexe expliquant ce que nous sommes. C’est un labyrinthe fascinant. Je n’ai pas la prétention de posséder la moindre réponse à toutes ces réflexions sur la violence de l’humain. Je ne donne pas de conclusion précise, je n’ai pas la science infuse. Je préfère plutôt semer des pistes de réflexion.»

«À chacun la liberté de tirer ses propres conclusions. Ce qui est difficile à accepter, c’est que ce côté sombre de la nature humaine, nous l’avons tous. Mais une fois que c’est compris et assimilé, je crois qu’il est ensuite plus facile de se regarder dans la glace et de s’analyser avec plus de justesse. L’important dans ces réflexions, est d’apprendre à gérer sa noirceur pour ne pas qu’elle prenne le dessus sur nous.» 

Si tu avais carte blanche et que tu pouvais réaliser LE projet dont tu as toujours rêvé en lien avec l’horreur ou l’effroi, à quoi ça ressemblerait? Lâche-toi lousse, on jase là! 

«Oh! Ça, c’est une question difficile. Je suis un touche-à-tout. J’aime tout faire, tout voir et rien ne m’arrête. En général, quand je veux créer un projet, je ne me demande pas si je peux ou si je devrais. Je le fais, c’est tout. Je fais le maximum avec ce qui m’est accessible. C’est bien sûr plus de travail, mais c’est comme ça que j’ai appris tout ce que je sais faire. Alors, il ne me reste pas tant de choses que je n’ai pas encore déjà réussi à faire.»

«J’opterais pour du dispendieux, quelque chose que mon budget d’indépendant ne me permet pas. J’aimerais beaucoup avoir ma propre série télé basée sur Ars Moriendi, un peu comme les classiques des années 50 et 60 tels qu’Alfred Hitchcock présente ou The Twilight Zone. Une histoire de meurtre différente à chaque épisode. Ça me plairait bien. Sinon, je mijote l’idée depuis longtemps de monter un épisode d’Ars Moriendi pour la scène, avec des comédiens, des musiciens… mais dans ce cas-ci, c’est surtout le temps qui me manque. Je me suis promis qu’un jour, j’y arriverais.» 

Pour découvrir nos précédentes chroniques «Dans la peau de…», visitez le labibleurbaine.com/nos-series/dans-la-peau-de.

*Cet article a été produit en collaboration avec les Éditions de l’Homme.

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