La beauté de la filiation sur fond de drame social

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«Je suis un soldat» de Laurent Larivière dans le cadre de Cinemania 2015

«Je suis un soldat» de Laurent Larivière dans le cadre de Cinemania 2015

La beauté de la filiation sur fond de drame social

Publié le 21 novembre 2015 par Rachel Bergeron-Cyr

Crédit photo : www.fiff.be/fr/Presse

Ce premier film de Laurent Larivière met en scène deux situations bien différentes et de prime abord, incompatibles. Le combat d'une famille pour garder la tête haute face à l'adversité et la quête impitoyable de Sandrine, la fille aînée, qui fera tout pour se tailler une place dans un univers cruel et féroce: celui du trafic de chiens en Europe. Au fil que le film avance, des ramifications se font entre ces deux mondes que tout oppose.

Le film nous présente donc Sandrine (Louise Bourgouin, lumineuse), trentenaire sans emploi depuis plusieurs mois, qui se voit obligée de retourner vivre chez sa mère. Si le parallèle entre la difficulté de se trouver un emploi dans un monde en crise économique et le trafic de chiens est facile à faire, il n’en demeure pas moins efficace et présenté de façon intelligente, tout en demeurant «sensitif» autant qu’il est glaçant. Car c’est là que Sandrine trouvera sa porte de sortie: en allant donner un coup de main à son oncle qui gère un chenil de chiens. Sous des airs de drame social nous est livrée une véritable métaphore sur le milieu parfois sans pitié de l’emploi, tout en dressant le portrait d’une réalité trop méconnue sur le trafic de chiens en Europe.

Le résultat est une véritable descente aux enfers pour cette dernière, qui connaîtra de nombreux élans de fulgurance (bons comme mauvais, cela dit), magnifiés par l’interprétation très juste de Louise Bourgouin, habituée à des rôles avec moins de substance. Elle s’en sort très bien, il faut dire que la belle est non seulement belle, mais très naturelle et à l’aise devant une caméra. En bref, elle a du cran. Vous le verrez dans une scène en particulier: une vraie Vénus de Milo moderne, cette Louise.

Si on pense tout d’abord à des films comme White Dog (1982), de Samuel Fuller ou au plus récent White God (2014), de Kornél Mundruczò (qui déjà nous faisait penser au Fuller), celui de Larivière se démarque par une rupture de ton. En effet, l’importance accordée à la famille et au trafic de chiens est à proportion égale. Autant dire que l’un ne va pas sans l’autre, en fait.

Si la mère est celle qui rapporte l’argent à la maison, travaillant vaillamment et honnêtement au rayon boucherie d’une épicerie, quitte à se faire humilier, le frère de celle-ci, quant à lui (Jean-Hugues Anglade, sanguin et toujours aussi fougueux) se révèle être un criminel à la morale ambiguë qui tire les ficelles d’une entreprise sans pitié.

La force du film réside, encore une fois, dans le puissant mélange d’un portrait de famille lié dans l’adversité et la rudesse d’un milieu où règne la loi du plus fort. L’habileté du réalisateur se voit dans les magnifiques plans d’une Sandrine au café, perdue dans ses pensées, seule avec son ambivalence, prise dans une spirale infernale, contrôlée par un univers qui lui échappe, où personne n’en sortira indemne, spectateurs inclus.

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