Programme double à Fantasia 2017: «Good Time» et «Fashionista»

«Good Time» de Benny et Joshua Safdie

Présent sur la croisette en mai dernier, Good Time a fait beaucoup parler de lui, et il s’est d’ailleurs mérité le prix de la meilleure musique originale. En Amérique, c’est le Festival international de films Fantasia qui a eu l’honneur de présenter la première nord-américaine du film. La présence des deux frères Safdie, ainsi que l’acteur Robert Pattinson à la projection présentée au festival, a fait de cette soirée un moment mémorable. Les spectateurs ont non seulement pu assister à une projection de qualité cinématographique exceptionnelle, mais ils ont surtout pu le faire en compagnie de ces êtres généreux et passionnés. Benny et Joshua semblaient très heureux de présenter leur production au public de Fantasia, et ils l’ont fait savoir à la foule. Ils se sont mérité une magnifique ovation de quelques minutes et ont donné de leur temps pour répondre à quelques questions.

Connie (Robert Pattinson) et Nick (Benny Safdie) sont deux frères. Le premier n’a pas de travail, fait à sa tête et crée des plans machiavéliques de braquage de banque pour subvenir à ses besoins. Le deuxième est handicapé mental; il vit avec sa grand-mère et se fait influencer par Connie, qui l’emmène faire des mauvais coups avec lui. Après un braquage de banque partiellement manqué, Nick se fait emprisonner alors que Connie réussit à semer la police. Au nom de l’amour (ou de la folie), Connie décidera de faire sortir son frère de prison coûte que coûte.

Majoritairement, le récit entier est basé sur Connie. Ce personnage est l’âme même du film et il n’y aurait pas pu avoir meilleur interprète que Robert Pattinson. Les choix effectués par Connie sont bien souvent les mauvais malheureusement. Ses péripéties font en sorte qu’il s’enfonce de plus en plus, sans qu’il ne s’en rende compte, et jusqu’à ce qu’il atteigne le point de non-retour. Le scénario est si bien écrit que les nombreuses actions se déroulent de façon très fluide et tout s’enchaîne parfaitement. Les personnages qui évoluent à ses côtés se font prendre par ses manipulations, et c’est en le voyant agir avec ceux-ci que l’on se rend compte qu’il pourrait être qualifié de sociopathe. À partir de ce moment, nous doutons qu’il éprouve un amour sain et réel envers son frère.

Les choix esthétiques du troisième long-métrage des deux frères Safdie concordent à merveille avec le récit. La caméra, manipulée par Sean Price Williams, demeure fixée sur les personnages, majoritairement en gros plans, nous imposant de vivre leur histoire avec eux. En ce qui concerne Nick et son handicap, la caméra ne nous laisse aucun espace, obligeant le spectateur à ressentir ce qu’il vit et à nous enfermer dans une bulle avec lui dans laquelle il est difficile de s’en sortir. C’est un très gros atout pour la production, car les sentiments des personnages sont facilement ressentis par les spectateurs. Les plans encadrant Connie nous accompagnent dans ses élans de folie et permettent ainsi de lire ses pensées (ou ses idées) à travers son visage. Le talent d’acteur de Pattinson y est aussi pour quelque chose. Il se présente dans Good Time avec un rôle bien différent de tous ses précédents. Sa performance est riche, déstabilisante et surtout, beaucoup plus mature que ses anciennes.

La musique originale vient mettre la barre encore plus haute et la dernière chanson interprétée par Iggy Pop vient clouer le spectateur sur son siège, l’obligeant ainsi à rester jusqu’à la toute fin du générique. Dans Good Time, aucun élément n’est mis de côté. Les acteurs, la caméra, la musique, le son, l’éclairage, les décors, les costumes, absolument tout est réfléchi et, surtout, maitrisé. C’est une œuvre unique, avec des inspirations allant de Martin Scorsese à William Friedkin. Avec un long-métrage marquant, riche et divertissant comme celui-ci, Benny et Joshua Safdie sont promis à de grandes choses, et c’est certain qu’ils reviendront bien vite à Fantasia ou qu’ils parcourront la croisette une autre fois.

Note: 3 étoiles et demie

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