Entrevue avec Isabelle Boulanger de La Grande Fente pour son spectacle «Sans Lactose»

Rejointe au bout du fil, Isabelle semblait étonnamment zen, elle qui va présenter son troisième spectacle devant une salle comble le 4 décembre prochain. «Bien (rires)», nous a-t-elle répondu simplement et sans ambages, lorsqu’on lui a demandé si elle se sentait fébrile à l’idée d’enfin dévoiler sa nouvelle création devant public. «Fébrile? Pas encore. C’est un peu irréel en fait. C’est gros parce que c’est la première soirée d’une heure qu’on présente. Le spectacle est un peu attendu et je sens qu’en même temps ça va être un gros test», a-t-elle affirmé, tout d’un coup plus fébrile qu’elle ne l’était une minute plus tôt. Il fallait bien sûr aborder le sujet Sans Lactose pour lui faire réaliser que le jour J, il s’en vient.

Sa passion de la danse lui coule dans les veines depuis qu’elle est toute jeune fille, alors que ses parents l’emmenaient voir les spectacles à grand déploiement du Cirque du Soleil. Elle ne fut pas très longue à avoir des étoiles dans les yeux et des démangeaisons dans le bas ventre. «Déjà, je me disais que je voulais faire quelque chose de même. Être sur scène moi aussi. Travailler avec mon corps et être repue de fatigue». À sa sortie de l’École de danse contemporaine de Montréal, Isabelle s’est lancée dans l’entrepreneuriat avec La Grande Fente, sa compagnie de danse qu’elle a créée en 2011, pour accoucher de ses propres créations où elle apposerait sa signature gestuelle.

«Sans Lactose, c’est un spectacle inscrit dans la tendance populaire, bien de notre génération, très actuel. Je m’inspire de mon vécu, sans uniquement me baser sur ma vie personnelle, en utilisant des thèmes universels que Monsieur et Madame Tout-le-Monde reconnaîtront. Tout est dans la manière dont je les aborde.», nous a-t-elle confiés, sans vouloir trop en dévoiler en même temps. Six danseuses s’offriront tout entière au public durant une heure, sans aucun décor mais entourée de plein d’accessoires, dévoilant une signature gestuelle teintée d’autodérision, d’humour, d’audace et de légèreté, sous fond de musique populaire. «Ce n’est pas un spectacle narratif; il y a une trame dramaturgique, et le ton réside dans les mouvements. Certains pourront paraître disgracieux, laids même, mais vu qu’ils sont bien assumés, ça devient vite le style. Et on s’y habitue», a-t-elle complété, nous laissant du coup un peu sur notre faim.

Lorsqu’on lui a demandé d’où venait ce drôle de nom, Sans Lactose, Isabelle s’est contentée d’éclater de rire, affirmant d’emblée: «C’est parce que je suis intolérante au lactose! (Rires). Oui, je trouvais ça niaiseux au début, mais je trouve toujours le titre de mes créations avant de mettre sur pied la pièce. Ça m’aide à garder le cap sur la vision que je souhaite montrer. Plus précisément, le lactose peut être un synonyme des hommes, puisque c’est une pièce sans hommes que je présenterai.» Ode à la féminité, donc, à la beauté et à l’intégrité, Sans Lactose promet de vous en mettre plein la vue et de vous laisser un goût tout sauf amer en bouche.

Comme une image vaut mille mots et qu’un tel travail mérite d’être vu avant d’être jugé, c’est donc un rendez-vous d’une heure les 4, 5, 6 et 7 décembre prochains au Monument-National pour un spectacle qui promet de faire une légère entorse aux conventions de la danse contemporaine? La différence n’a jamais fait de tort à personne, au contraire, elle permet souvent l’embellissement, le perfectionnement et l’aboutissement d’un courant artistique.