ThéâtreL'entrevue éclair avec
Crédit photo : Arach'Pictures - Najim Chaoui
Annie, bienvenue! Comment allez-vous? Ou plutôt, comment allez-vous pour vrai? Si on vous pose cette question d’emblée, c’est que les arts, et leurs talentueux∙ses créateurs et créatrices, sont frappés par une espèce de tempête de morosité qui «semble surgir de tous les côtés, asphyxiant l’énergie vitale, tirant fort vers le bas» et qui prend de l’ampleur au fil des ans, comme vous le précisez dans votre introduction de saison. La question qui tue: comment faites-vous pour garder ce sourire contagieux en ces temps difficiles, dites-nous?
«C’est une belle question. En s’écoutant, je dirais. En acceptant qu’il y ait des jours meilleurs que d’autres et que ce soit normal. Le métier d’acteur·trice est souvent comparé à celui d’un athlète. On s’attend à une performance de haut niveau. Le théâtre, et les arts en général, c’est un milieu où on a l’impression de devoir toujours prouver sa place.»
«Résister avec le contexte économique, c’est de plus en plus exigeant et épuisant. Mais étonnement, alors que les fonds sont insuffisants, que les théâtres sont en évaluation aux Conseils des arts du Canada, la compétition est remplacée par la solidarité et l’entraide.»
«L’art et la poésie sont essentiels pour garder l’équilibre dans le monde d’aujourd’hui, tout le monde sait ça. Celles et ceux qui veulent faire croire le contraire servent un programme politique; ils se trompent. Ce qu’on défend est noble et bon, alors le sourire n’est jamais bien loin.»
Le 21 mai, c’est une date charnière pour vous (et pour nos lecteurs et lectrices!), car le Théâtre Aux Écuries, ce sympathique théâtre de quartier qui présente chaque année «des démarches audacieuses qui ne reposent pas sur un système de vedettariat, mais bien sur l’originalité et la diversité de ses propositions», dévoile sa saison 2024-2025! On l’attendait celle-là! Quel est votre mot d’ordre, alors? Dites-nous ce qui vous occupe l’esprit en ces temps de soulèvement.
«Oui, le Collectif de direction artistique tient le cap et sélectionne d’abord et avant tout des démarches. On veut faire une longue balade avec nos spectateur·trice·s, créer une véritable conversation sur plusieurs années.»
«En accompagnant les artistes sur une longue période, il·elle·s se sentent à la maison et beaucoup de nos spectateur·trice·s ont aussi ce sentiment, même si les œuvres parfois décoiffent! Performances, paroles autochtones, propositions interdisciplinaires mariant le théâtre avec la vidéo, les objets, la musique ou le mouvement, on ne s’ennuiera pas! Faire de la place à toutes ces voix et ces formes pour faire briller notre humanité, faire vibrer le “nous”.»
«Avec tou·te·s les artistes qui passent en nos murs, ça bouillonne fort. Aux Écuries, c’est aussi un lieu d’échange où l’on s’indigne, où l’on crée des slogans et des pancartes. Le Théâtre Aux Écuries doit garder cette souplesse, il sert à tout ça.»
Dès le 24 septembre, votre saison s’ouvrira sur le spectacle Manège mou de la compagnie Mammifères et se clôturera le 26 avril 2025 avec Entre nous sommes pris entre nous de Mille Feux. En tout, ce sont 10 spectacles originaux de 9 compagnies théâtrales qui ont du talent à revendre – Collectif Feuille déchirée, Théâtre de la Pire Espèce, Les Productions Menuentakuan, Théâtre I.N.K., Théâtre des Trompes, Système Kangourou, L’eau du bain et Mille feux – et qui feront voyager et réfléchir nos spectateurs et spectatrices. Parlez-nous brièvement de votre programmation, et dites-nous en quoi c’est un incontournable!
«La musique prendra une place toute particulière cette saison, d’abord avec la nouvelle création de Karine Sauvé, Manège mou, et aussi avec H¡T! du Théâtre I.N.K., une histoire qui s’inspire des codes du hip-hop.»
«On se reconnectera à la famille aussi, où plusieurs artistes de théâtre souhaitent partager la scène avec toutes les générations, que ce soit via une tasse de thé, une robe de bois, une rivière à Wendake, un salon-vivarium, des clous ou une rencontre en quadriporteur, ces histoires nous feront entendre toutes ces humanités aux âges variés pour mieux accueillir, avec plus de sagesse –peut-être–, les bouleversements du monde actuel. S’ajoutent à tout ça nos événements chouchous, le Jamais Lu Montréal, Vous êtes ici, le OFFTA et le Festival international de Casteliers.»
«Beaucoup, beaucoup de femmes créatrices occupent les Écuries cette saison, c’est réjouissant. Venir voir leur travail, c’est un incontournable!»
Le théâtre, et plus largement les arts de la scène, c’est en quelque sorte une alliance: les artistes et les citoyen∙ne∙s s’unissent, tous ensemble, pour suspendre le temps, faire le point sur leur vie, construire du sens et y trouver de la poésie. Vous dites, et on vous cite, que «les propositions de cette année tendent justement vers ce désir puissant de communauté, en questionnant et en soignant les relations sur scène et au-dehors». Parlez-nous de cette envie irrépressible de “vivre ensemble” qui est si chère à vos yeux.
«Cette saison, c’est Système Kangourou et leurs acolytes qui accaparent le théâtre avec le micro-festival Filer doux. Performances, installations et réflexions autour de la famille viendront déplier de multiples façons ce fameux “vivre ensemble”. Comme avec Le Collectif Feuille déchirée, qui proposera, avec Avant que la dernière feuille ne tombe, un dispositif tout en rond: sans être un spectacle participatif, on deviendra toutes et tous des spectateur·trice·s très actif·ve·s par notre présence et notre écoute. C’est réconfortant.»
«À l’inverse, dans H¡T!, deux adolescents développeront une relation artistique via les réseaux sociaux qui sera bien confrontante. Mais le vivre ensemble, c’est aussi apprendre à vivre avec soi, pour vrai, et ce n’est pas toujours une tâche simple. Le théâtre reste un des rares endroits où l’on met son téléphone de côté, le temps d’écouter, de s’écouter. C’est reposant.»
«Visitez les lieux d’arts vivants, ça permet une sorte de reconnexion à soi et aux autres.»
Pour lutter contre l’injustice, il faut se lever et se mobiliser. Pour trouver de la reconnaissance, il faut que les voix s’unissent. De quelles manières le Théâtre Aux Écuries espère-t-il travailler mieux, jouer collectivement et s’organiser autrement?
«Il faut revenir à l’écoute. Le Théâtre Aux Écuries, c’est une expérience de mutualisation. On travaille en horizontalité. Toute l’équipe d’Aux Écuries, ainsi que nos bénévoles, font de leur mieux pour servir les projets artistiques et pour que la rencontre avec les spectateur·trice·s soit toujours une véritable célébration. Chaque fois, c’est un petit miracle!»
«Cette saison, on offre toujours le Forfait crinqué (à partir de 3 spectacles achetés, tous les billets du forfait passent à 22 $ par spectacle) et le Vendredi-dis-ton-prix (les billets pour les représentations des vendredis soirs à venir sont disponibles au tarif de votre choix!) On croit toujours et encore que l’art doit être accessible à tou·te·s. Que les artistes et les spectateur·trice·s se côtoient autour d’œuvres actuelles devient un véritable carrefour d’idées.»
«Ça permet d’être sensible aux réalités des uns et des autres et de construire, ensemble, le “demain”».
Pour en savoir plus sur la programmation 2024-2025 du Théâtre Aux Écuries, c’est par ici, et pour profiter du Forfait crinqué et du Vendredi-dis-ton-prix, c’est ici. Et pour lire nos précédents articles «L’entrevue éclair avec» et faire le plein de découvertes, consultez le labibleurbaine.com/nos-series/lentrevue-eclair-avec.
*Cet article a été produit en collaboration avec Théâtre Aux Écuries.
La saison 2024-2025 du Théâtre Aux Écuries est lancée!
Par Tous droits réservés @ Théâtre Aux Écuries