ThéâtreEntrevues
Crédit photo : Yves Renaud
Depuis plusieurs siècles, les mots de Molière guident et inspirent les artisans du théâtre.
Cette fois, c’est à Florent Siaud, metteur en scène de renommée internationale, que l’on connaît entre autres pour son adaptation de Don Juan revient de la guerre d’Ödön von Horváth, ou encore pour sa flamboyante mise en scène de Britannicus de Racine en 2019, que l’équipe du Théâtre du Nouveau Monde a confié le défi de donner vie au Misanthrope.
Pour l’artiste, cette opportunité s’est présenté comme une chance extraordinaire d’explorer l’œuvre du géant qu’était Jean-Baptiste Poquelin, dit Molière.
«J’ai consacré plus de trois ans à la recherche pour cette mise en scène. Je voulais comprendre l’époque, ainsi que le contexte sociopolitique et culturel dans lequel l’œuvre a été écrite», raconte le metteur en scène. «J’ai rapidement réalisé qu’il y avait d’innombrables messages et réflexions très avant-gardistes dans son travail. Je pense notamment à une perspective féministe fascinante sur le statut des veuves à l’époque, de même qu’à des réflexions sur le polyamour qui résonnent encore aujourd’hui.»
Rappelons ici l’histoire de cette comédie en cinq actes
Alceste est un homme constamment indigné; à ses yeux, tout le monde se comporte de manière hypocrite, soit par intérêt ou par crainte de déplaire. Ce dernier tolère à peine son ami Philinte qui tente inlassablement, en vain, de l’empêcher de se mettre dans des situations délicates.
Malgré ses réticences, Alceste s’éprend d’une jeune veuve redoutablement brillante, mais qui incarne tout ce qu’il rejette d’emblée. En effet, Célimène est coquette, ostensiblement superficielle, douée pour la médisance et experte en double jeu. Surtout, elle réussit haut la main le défi de maintenir l’intérêt des quatre prétendants qui gravitent autour d’elle, parmi lesquels se trouve le brave Alceste, déterminé à contraindre Célimène à se déclarer avec honnêteté.
Évidemment, rien ne se déroulera comme prévu…
Comme vous le voyez, c’est aux côtés d’une impressionnante distribution que Florent Siaud donne vie à cette grande œuvre théâtrale sur les planches du TNM!
De fait, vous pourrez voir briller sur scène Francis Ducharme, Alice Pascual et Evelyne Rompré, qui forment à eux trois le fameux trio moliéresque par excellence, à savoir Alceste, Célimène et Arsinoé, aux côtés de Dany Boudreault (Oronte), Mounia Zahzam (Eliante), Alex Bergeron (Philinte) et plusieurs autres.
Le Misanthrope figure depuis longtemps sur la liste des pièces que le metteur en scène rêvait d’explorer dans le cadre de son travail. Selon lui, les pièces classiques possèdent une essence fondamentale qui peut nous éclairer sur notre réalité contemporaine.
Une œuvre qui transcende les siècles
Florent Siaud, pour sa mise en scène du Misanthrope, s’est donné pour mission de disséquer l’œuvre de Molière afin d’en extraire les thèmes qui résonnent encore en 2024. Une tâche partagée avec enthousiasme par sa complice Alice Pascual, talentueuse comédienne qui incarne le rôle de Célimène.
«Les recherches de Florent ont véritablement enrichi notre expérience en tant que comédiens», explique-t-elle. «Lorsqu’on interprète du Molière, on peut facilement adopter une vision préconçue de ce à quoi doivent ressembler les personnages. Avec Florent, nous avons déconstruit cela immédiatement pour apporter notre propre couleur à chaque personnage, et ainsi les rendre uniques.»
La comédienne, qu’on a vue notamment à la télévision dans des séries telles que Trop, Épidémie, Prémonitions et Nouvelle adresse, avoue être particulièrement enchantée par son rôle de Célimène, un personnage qui l’accompagne depuis l’enfance. Son grand-père, jadis instituteur en France, était un passionné des pièces de Molière.
Durant notre entretien, elle s’est d’ailleurs remémoré, avec tendresse, les moments où il lui faisait lire les répliques de Célimène. Et elle aime à croire, encore aujourd’hui, que c’est ce personnage qui a éveillé sa vocation d’actrice!
Une adaptation prometteuse!
Sur scène, le public peut donc s’attendre à une mise en scène à la fois simple mais efficace, qui marie avec brio le classique et l’onirique.
Ah! Et comme mot de la fin, Florent Siaud, en riant, précise: «C’est le XVIIe siècle qui rencontre David Lynch par moments!» Ça promet, n’est-ce pas?