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Crédit photo : David Wong
Suivant un petit cinq à sept pour souligner la première, on nous présente une courte performance des interprètes Marie-Ève Bernard et Martine Castera, nous permettant de nous rassembler près de l’entrée de la salle, et ce, cinq minutes avant d’y pénétrer. Une façon originale de nous donner encore l’eau à la bouche même après les quelques bouchées partagées.
Le public est nettement composé de plusieurs adeptes de la danse urbaine, de famille et d’amis, ainsi que de quelques curieux. Les habitués créent une ambiance qui leur ressemble et ne se gênent pas pour rire, parler et crier des mots et des sons d’encouragement aux danseurs qui performent, nous donnant l’impression de tous faire partie de cette grande famille de danses urbaines et de rues.
La soirée commence avec Escucha, un duo fraternel composé de Victor et Tito Sono, qui explorent la connexion entre leurs deux formes artistiques respectives: le break dance et la guitare acoustique. À la fois duo et duel, ici c’est le musicien qui suit le danseur et non l’inverse, et on peut le remarquer aux quelques moments de retards de la guitare sur les pas dansés. C’est toutefois une pièce pleine de personnalité qui nous fait esquisser plusieurs fois un sourire.
Doppelgänger par Mecdy Jean-Pierre nous propose de la fluidité et des effets de duos surprenants entre Marie-Ève Bernard et Martine Castera. Cette dernière offrant une performance physique remarquable, tel un serpent ondulant en courbes infinies puis en ondes de choc extrêmes!
En combinaison foncée et le visage couvert, tel un voleur, Kelvin Smoler prend parole et nous envoûte de sa voix pénétrante dans Face Value, accompagné par trois danseurs de Borealis Soul, tout autant accoutrés. Alex Robinson, Jordan Reti et Valérie Herdes s’expriment uniquement lorsque leur masque respectif tombe.
Démasqués, on goûte enfin à leur humanité, à leur vulnérabilité. Ce groupe de Whitehorse nous transporte au cœur même du côté sombre de la danse urbaine; c’est dur, c’est noir et intense, et on ne veut surtout pas que cela se termine.
Oui/Non; deux femmes, un seul corps, ou n’est-ce qu’illusion? Céline Richard-Robichon et Elie-Anne Ross nous éblouissent et nous font rire dans leur complicité palpable. S’est-on fait prendre dans la magie du spectacle, au final? Avons-nous vu ou été regardés?
Shanyça Elie-Leconte nous présente certainement la pièce la plus chargée en émotions de toute la soirée. Un bonhomme surpris, triste et heureux nous transporte dans les tréfonds de la schizophrénie provoquée par une psychose toxique. Cette œuvre nous révèle une interprète avec une présence forte et soutenue, une clarté du sujet et de l’exécution. C’est somme toute un bijou fascinant et angoissant.
Un décor presque circassien nous est suggéré dans Fil rouge, une chorégraphie d’Emmanuelle Lê Phan. Une très belle pièce de groupe dans laquelle évoluent Alexandre Wilhelm, Anthony Palomeque, Elie-Anne Ross, Kalliane Brémault, Samuel Cyr et Victoria Mackenzie, avec une agilité captivante.
Les tableaux sont créés dès le départ par les danseurs immobilisés dans l’action même de créer leur propre décor; les contre-jours, les couleurs et les formes, tout est là pour piquer notre curiosité et aiguiser notre intérêt. On veut savoir où cette ligne va nous mener, et les artistes nous permettent de la suivre aisément, tout en s’amusant, tout en se suivant l’un l’autre, comme notre œil les suit, eux. Parfois fluide et parfois très rythmé, l’ensemble penche vers la virtuosité à l’approche de la fin de la pièce avec quelques prouesses physiques qui viennent donner un avant-goût de l’aboutissement de la représentation.
Tout va bien dans le meilleur des chaos vient marquer la fin de la soirée de façon agréable et éducative en nous présentant ce qu’est l’esprit du house avec Eldridge Estinvil AKA <<DON BARBARINO>> accompagné à la danse sur scène et en vidéo par Achraf << EYWAA>> Terrab Junior, <<DJÜNGLE>> Dorsaint et, finalement, Magdalena Marszalek, qui signe la chorégraphie.
Cette Soirée 100Lux à laquelle nous avons assistée se termine dans une ambiance festive avec du groove! Pas une minute de fête n’est perdue et, dès le seul salut officiel de tous les artistes, les spectateurs sont invités à venir lâcher leur fou sur scène.
Un spectacle qui donne pleinement envie de découvrir plus avant ce monde des danses urbaines et de rues!
Les «Soirées 100Lux 2019» de Tangente en images
Par Frédéric Chais et David Wong
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de la rédaction