«ÉCHOS» des Grands Ballets présenté à la Salle Wilfrid Pelletier de la Place des Arts

La compagnie a offert une représentation de 70 minutes hors du commun, sans entracte. En effet, elle a opté pour une formule plutôt originale en imaginant un spectacle divisé en sept tableaux s’imbriquant les uns dans les autres. Un avant-goût de ce qui sera à l’affiche dans les prochains mois.

Une variété de styles et d’ambiances

Ce programme, bien que disparate, ne nous donnait pas l’impression d’assister à un collage mal ficelé, mais bien à un tout harmonieux. Cela n’a pas empêché les Grands Ballets d’offrir une variété de styles et d’ambiances à l’auditoire.

Ce spectacle a commencé sous le signe de la gaieté et de la prouesse avec la présentation de Majisimo du chorégraphe cubain Jorge García Pérez. Inspiré par la danse espagnole traditionnelle et du ballet classique, les nombreux danseurs ont su démontrer leur immense talent. Ce numéro, très vivant et tout en mouvements, a laissé place à une cadence soutenue et à une touche de romantisme.

Le public a été soufflé de voir autant de pas audacieux, dont plusieurs pirouettes sur un pied, en pointe. Les danseurs sont parvenus à maintenir une synchronisation qui ajoutait à la puissance de ce tableau. Les costumes, d’inspiration espagnole, étaient particulièrement seyants.

Une scène tirée de Spring Waters

Ensuite, nous avons eu droit à Spring Waters, une chorégraphie créée Asaf Messerer en 1959. Ce segment de la soirée était franchement impressionnant, de par sa nature athlétique. Le couple de danseurs a fait preuve d’une grande agilité et a réussi des pas athlétiques fort laborieux. Le duo a démontré une grande chimie et a su maintenir un rythme soutenu avec aise.

Si des artistes de cirque s’aventuraient dans le ballet, ça ressemblerait à ce tableau.

Puis, nous avons eu droit à Blushing du Canadien Peter Quanz. Anna Ishii et Célestin Boutin ont été magnifiques sur scène et dansaient à l’unisson. Un peu comme s’ils étaient excités; leur façon de bouger était captivante. La musique («Young and Beautiful» de Bryson Andres) complimentait parfaitement la chorégraphie. De plus, leur souplesse et leur maîtrise des pas plus sophistiqués étaient à couper le souffle.

Par la suite, ce sont les danseurs pour l’acte Fête Sauvage, volume 1 d’Hélène Blackburn qui ont ravi les spectateurs. À saveur résolument moderne, les pas étaient exécutés de manière fougueuse. De plus, il était spécialement agréable de voir les artistes être aussi expressifs dans leur performance; c’était beau de les voir jouer tout en dansant. Ce numéro donnait un peu l’impression de les avoir interceptés par hasard lors d’un rassemblement dans une ruelle sombre, la nuit.

Donnant libre cours à leurs envies, ils dansaient, se tortillaient et obéissaient à leurs fantaisies. L’esprit rebelle était palpable. Un délice à regarder!

Un changement de ton s’est imposé avec la présentation de Le Talisman du Russe Pyotr Gusev. Le couple, très fluide, a personnifié le romantisme et la douceur. Les pas de deux, bien que parfaitement réussis, sont un classique que l’on voit souvent lors d’une représentation. Bien que jolie, la chorégraphie n’apparaissait pas aussi originale que les segments présentés précédemment. Plus lent et délicat, ce tableau était intéressant, sans toutefois être rafraîchissant. Par contre, il a été très apprécié par le public. Le duo était spécialement gracieux.

Pour Solace, un nouveau couple a fait son apparition sur les planches afin d’interpréter une chorégraphie de Garrett Smith. Cet acte était enchanteur et unique. Bien que ce ballet soit classique, nous avions l’impression ici d’assister à un morceau très contemporain. De plus, il y avait un côté émotionnel aux mouvements; nous pouvions presque percevoir l’humanité des danseurs. Ces derniers ont illustré avec finesse une mélancolie réaliste dans laquelle les spectateurs ont pu s’identifier. Épatant!

Le romantisme est revenu au premier plan grâce à l’extrait de La Belle au bois dormant de Marcia Haydée. Plusieurs mouvements raffinés (de nombreuses pirouettes exécutées avec naturel) et ardus ont comblé l’auditoire, malgré quelques tremblements. Le couple a démontré une légèreté exquise et tout en souplesse, ce qui a été très apprécié par le public. Indéniablement, il s’agit d’une pièce d’une grande beauté. Mais elle n’était peut-être pas à sa place dans cet amalgame.

Une conclusion poignante avec le tableau Requiem d’Andrew Skeels

Pour conclure cette magnifique soirée, Requiem d’Andrew Skeels a été très poignant. Vêtus de gris, les danseurs masqués (c’est le seul numéro à en avoir) ont offert avec brio une chorégraphie bouleversante et ensorcelante. À l’exception d’un seul faux mouvement, la troupe était parfaitement synchronisée, conférant une solidité incroyable à cette pièce. La musique soulignait avec justesse l’aspect dramatique de ce segment. L’interprétation tonitruante des danseurs laissait transparaître une douleur très communicative. Ce fut grandiose, ahurissant et très prenant.

Un moment émouvant de Requiem

En somme, ce retour des Grands Ballets est un succès. ÉCHOS est un spectacle envoûtant, et le plaisir que semblaient éprouver les danseurs était partagé par l’auditoire présent. Celui-ci serait volontiers resté plus longtemps pour admirer le talent de ces artistes.

Ce fut une merveilleuse soirée!