Crédit photo : Emmanuel Gagné
Habituellement, lorsque je prends des photos d’artistes en plein travail, je garde une certaine distance, question de ne pas perturber le voyage cathartique qu’ils ont peut-être entrepris à des années-lumière de notre réalité. Je me suis tout de même risqué un plan rapproché, pour ensuite me sauver rapidement.
Le lendemain, j’étais curieux de voir la progression de cette murale et c’est à ce moment précis que j’ai pu vraiment voir ce que ses coups de pinceau représentaient. Ce que j’ai vu ma évidemment plu et surtout intrigué. C’est donc après une courte recherche sur Internet que j’ai découvert l’artiste multidisciplinaire M’os Geez et son œuvre. Portraits difformes, accablés d’anatomies décadentes et de fluidité excessive. Impossible d’ignorer l’aura énigmatique qui plane au-dessus de telles allégories.
Depuis mon introduction à son travail, j’ai eu le plaisir de la rencontrer au vernissage d’une nouvelle murale et même de visiter son atelier. Souriante, joviale et chaleureuse, je ne dirais pas qu’elle est à l’extrême opposé de l’univers qu’elle propose à travers ses œuvres, mais qu’il serait trop facile de la qualifier d’artiste tourmentée, simplement parce qu’elle dépeint une brutalité assumée. Après tout, être honnête libère.
1) La dernière fois qu’on a été en contact, c’était au Fresh Paint Gallery pour Art Attack, qui était le vernissage de ta murale pour l’évènement. Parle-nous un peu de ton expérience avec cette création et raconte-nous dans tes mots ce qu’on peut voir à travers cette œuvre?
«Ouais, j’ai vraiment aimé l’expérience. C’était assez intense de vivre la progression de l’œuvre qui avançait tranquillement à travers les deux autres artistes, Ectoplasme et Pauline Heart. En soi, je voulais poursuivre mon travail à travers le bois et l’intégrer dans une sorte de forêt étrange. Tout s’est déroulé le dernier week-end dans un gros rush. Le personnage déambule inconsciemment dans sa forêt, sa profonde nature. Sleepwalking! Mais bon, celui qui l’a voit la perçoit à sa façon. ;)»
2) À quel moment l’art a-t-il fait son entrée dans ta vie?
«L’art, en général, a toujours fait partie de moi. C’est ma façon de m’exprimer et d’expulser le trop-plein. J’
feel le
beat avant mes premiers pas, la danse a été ma première expression. Par la suite, j’ai toujours dessiné, et la
musique a suivi. Mais bon, la peinture m’a frappé en 2005, aussitôt que j’y ai touché.
Bang! Comme un éclair! Ahah!»
3) Est-ce qu’à un certain moment tu t’es sentie déchirée entre la musique, la peinture et la danse, ou as-tu toujours senti que toutes ces formes d’expression étaient complémentaires?
«Oui, ça m’a pris du temps pour rassembler mes passions. Je veux toujours trop en faire, car j’ai trop d’idées. Au début, c’était rotatif et quand j’étais intense dans une de ces passions, c’est comme si les autres s’éteignaient un peu ou bien complètement. Je sautais d’une à l’autre. Maintenant, je me concentre vraiment sur la peinture, mais j’ai toujours de l’inspiration pour chacune d’elle… XD»
4) Quelles ont été tes premières inspirations artistiques et dirais-tu que leur influence se ressent dans ton travail aujourd’hui?
«Mon cerveau n’arrête jamais! Dali a été mon premier coup de foudre, mais en général il y a tellement d’artistes aujourd’hui que je dirais que c’est un surplus d’informations de toutes sortes d’artistes, de travail fou, complexes et autant naïfs que répétitifs. J’adore tout ce qui est étrange, extrême et un peu dérangeant. Ça me fascine. Je pense à Choi Xooang, Marina Abramovic, etc.). En général, ce sont mes états d’âme et mes émotions qui ressortent dans mon travail. Fragilité et profondeur. Le surréalisme m’a toujours fasciné pour la liberté d’expression de la place, l’endroit et pour l’espèce de symbolisme déformé de l’humain. Pour moi, ce style me permet de me situer dans ma tête et dans mon corps. Je crois que je reflète mes influences dans ma nature, mon langage propre à moi-même.»
5) Dans une de tes bios, on peut apercevoir le hashtag #fockingcrazyvisual. Es-tu une freak? Comment décrirais tu le style Mos Geez?
«Oui, freak, folle, mystérieuse, expressive, extrême. Mos Geez, c’est un peu comme sortir le mal de sa cage intérieure, s’extérioriser visuellement et brutalement. Même principe que le Krump: souffre d’un combat d’égalité, de liberté d’expression.»