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Crédit photo : Emmanuel Gagné
1- Peux-tu nous décrire ton rôle dans l’exposition Artflip et ce qui a mené à ta rencontre avec Clôde Beaupré?
«Ma rencontre avec Clôde Beaupré date de plusieurs années lors d’une première exposition au Centre communautaire Françoise-Dunn à Sherbrooke sous le thème de l’art urbain. À ce moment, le format d’exposition était bien différent et se transforma en 2014 pour laisser la place à la première édition d’Artflip à Sherbrooke. Étant une référence à propos de l’art urbain dans la communauté sherbrookoise, nous avons rapidement travaillé avec Clôde Beaupré. Mon rôle lors de la première année était surtout la sélection et le suivi avec les artistes et la promotion sur les réseaux sociaux. Cette année, mon rôle était beaucoup plus important et, avec l’aide de bénévoles, de Clément Subarte et de la galerie Fresh Paint, nous avons mis sur pied la nouvelle édition à Sherbrooke et à Montréal.»
2- L’exposition regroupe une cinquantaine d’artistes de différents domaines tels que l’illustration, le graphisme, le tatouage et le street art. Comment as-tu procédé à la sélection et, selon toi, qu’est-ce qui unit tous les participants dans une telle diversité?
«Le lien entre les artistes est ni plus ni moins le skate comme forme de support artistique. Ces différentes sphères sont rarement mélangées et l’un des buts de l’exposition est de créer des liens entre les différentes formes d’expressions visuelles. Par exemple, une personne visitant l’exposition pour aller voir un tatoueur en particulier peut découvrir finalement un illustrateur. La sélection a été réalisée afin de regrouper des personnes qui se démarquent dans leurs pratiques artistiques. De plus, la version à Sherbrooke a donné la chance à plusieurs artistes de se démarquer et d’être exposé par la suite à Montréal.»
3- Quel était le mandat de chaque artiste?
«Le mandat pour chaque artiste est simple, c’est-à-dire celui d’utiliser le skate en tant que support. Par la suite, il n’y a aucune contrainte en tant que telle. Les règles sont davantage liées à leurs approches de cette même liberté. Par exemple, plusieurs illustrateurs ont préféré utiliser un skate neuf, certains tatoueurs ont collé un papier aquarelle sur le skate, tandis que les graphistes ont une approche plus conceptuelle envers la planche de skate, etc.»
4- Qu’est-ce que représente le skateboard pour toi?
«C’est un peu paradoxal, mais personnellement je n’ai jamais skaté de ma vie. Cependant, le skate est selon moi un sport qui fut longtemps en marge de la société, un peu comme l’art urbain. Vu les origines de l’exposition étant davantage axées vers l’art urbain, ce mélange était naturel.»
5- La semaine dernière avait lieu une conférence sur les lieux de l’exposition à propos de la relation entre l’art et le skateboard. Que penses-tu de l’évolution de cette relation qui a maintenant quitté les rues et se retrouve à un niveau très commercial?
«Je crois que le skate et l’art urbain ont changé beaucoup ces dernières années. Néanmoins, ce changement est un couteau à double tranchant. C’est-à-dire qu’il y a une partie de moi qui a l’impression que les bonnes années sont derrière nous. Par exemple, le graffiti a complètement changé avec les médias sociaux et le skate est désormais facilement filmé avec l’accessibilité de la vidéo. Il ne faut surtout pas oublier que, tout ça vient de la rue, et que le «vrai» graffiti et le «vrai» skate resteront toujours dans la rue.»
6- Les oeuvres exposés à la galerie sont en vente et tous les profits seront remis à un programme de skate-étude en place à une école secondaire de Sherbrooke. Peux-tu nous en parler et est-ce qu’il serait possible de voir un tel programme apparaître dans d’autres écoles au Québec?
«Une partie des ventes des oeuvres sera remise au programme skate-étude de l’école secondaire du Triolet. Le but premier de l’exposition est avant tout de donner une visibilité aux artistes en créant une exposition de qualité et par la suite faire un don au programme skate-étude. L’exposition est créée de façon complètement bénévole, mais certaines dépenses sont inévitables. Notre but est de faire un don significatif afin de créer un nouveau skatepark à Sherbrooke. En ayant parlé à des skateurs originaires de Sherbrooke, j’ai l’impression qu’il y a une certaine jalousie face aux possibilités que ce programme offre aux jeunes skateurs. Ceux-ci deviennent inévitablement des skateurs de haut niveau, en plus de motiver ces derniers à se forcer du côté académique afin de demeurer dans le programme. Je crois profondément que ce programme est un modèle pour les autres écoles et également pour d’autres sports ou domaines artistiques qui sont encore à ce jour en marge. Les écoles ont une responsabilité de changer et évoluer afin d’être en réaction avec les demandes des futures générations.»
7- Tu oeuvres dans le domaine de l’art visuel depuis plus d’une dizaine d’années et tu touches autant au street art qu’à l’illustration. Raconte-nous ton parcours, des ruelles de Sherbrooke à celles de Montréal.
«En 2004, j’ai commencé mon parcours post-secondaire au Champlain Regional College à Lennoxville en Fine Arts. En même temps, j’ai découvert la canette d’aérosol en marge des classes. Par la suite, la passion des lettres m’a amené vers le Cégep de Sherbrooke en graphisme. Finalement, j’ai complété un baccalauréat en design graphique à l’UQÀM. La scène du graffiti à Sherbrooke était très peu active lorsqu’on a commencé à peindre sur les murs. On savait que d’autres avaient laissé leurs marques sur les murs avant nous, mais on avait l’impression d’être seul. Nous avons alors évolué loin des normes d’une scène aussi forte que Montréal. Lorsque j’ai déménagé à Montréal, mes lettres ont rapidement changé; elles devinrent beaucoup plus grosses en terme de superficie, avec plus d’impact, une meilleure méthodologie, plus influencé, etc. Avant, j’étais très conscient de la scène à Sherbrooke, mais outre cette scène, mes influences venaient principalement du site Internet Art crimes, Hip Hop Franco, Meeting of Styles, Bombing Science, Under Pressure, Visual Orgasm, etc. Désormais, c’est vraiment facile avec Instagram d’être conscient des nouveaux styles d’un peu partout dans le monde, et cela de chez soi.»
8- Quels sont tes projets pour 2016 et pense- tu t’impliquer dans de futurs évènements qui impliqueraient le skateboard?
«Je serais content de participer à d’autres évènements reliés au skate, mais je n’ai aucun plan de ce côté pour l’instant. Avec le beau temps qui est arrivé, mes projets sont surtout de me concentrer sur mon travail de muraliste. Néanmoins, je vais continuer à passer beaucoup de temps dans mon studio afin de créer des visuels qui me plaisent et poursuivre ma recherche personnelle.»
L’exposition «Artflip» est en cours jusqu’au 30 avril 2016 à la Fresh Pain Gallery.
- Site internet: www.freshpaintgallery.ca
- Site internet: www.arnoldvincent.com
- FB: www.facebook.com/arnold.artiste
- IG: www.instagram.com/arnold_artist