MusiqueDans la peau de
Crédit photo : Gaëlle Leroyer
1. À en croire les premiers extraits de Loveshit II – Blondie & The Backstabberz, on s’éloigne un peu du son folk qu’on te connaissait. Peux-tu nous parler un peu de ce virage artistique?
«C’est drôle. Les deux derniers disques n’ont quasiment pas de guitares acoustiques. On a souvent qualifié Le résultat de mes bêtises et Volcano de planants. Il y avait du synthé mur à mur ainsi que des guitares électriques noyées dans les pédales chorus à fond. Et pourtant les gens m’associent étrangement au folk. À part Les jolies françaises, y’a pas eu de folk depuis quatre ans. On est loin de Philippe B. À la limite quelques chansons piano-voix mais sans plus.»
«Blondie est en effet un genre de virage lo-fi avec son beatbox vintage et je me permets de «crooner» un peu plus. J’ai toujours adoré la dégaine de Julian Casablancas et Iggy Pop. Il y a quelque chose de Sinatra dans leur façon de chanter. Je me suis permis de le faire. Ceci étant dit, «In What World Do You Savages Live Where You Thought I’d Be Cool?» ne pourrait pas plus être dans mes cordes, dans mon range de voix. Le revoilà ce folk dont tu me parlais.»
2. En 2017, un album de vingt chansons, comme celui que tu nous prépares, ça se voit très peu. Peux-tu nous raconter le processus qui t’a mené à vouloir faire un album double?
«L’album documente deux chapitres de ma vie. Deux histoires que je devais raconter, mais ne pas mélanger. J’avais trente-cinq chansons. Je n’ai jamais autant écrit en un an et demi, jamais été aussi fier de mon songwriting. Au moment où Volcano est sorti en février 2016, j’avais déjà dix chansons d’écrites.»
«J’avais délaissé l’anglo pendant cinq-six ans, en plus de vivre des traumatismes. J’avais trop à dire. Ça débordait de partout. L’album double faisait du sens. L’argument que les gens n’auraient pas la patience ou souffraient d’un déficit d’attention me servait. Je me disais que ça passerait mieux sous une bannière-collection qu’avec deux disques en deux ans. Là, je crois que les gens auraient été un peu blasés.»
3. La pièce «In What World Do You Savages Live Where You Thought I’d Be Cool?» est particulièrement émotive, avec des textes poignants qui font allusion au suicide. Est-ce que c’était important pour toi d’aborder ce sujet, assez personnel, sur ce nouvel album?
«En avril 2016, j’ai voulu mourir. J’ai voulu disparaître. C’était violent. L’hôpital. Des piliers dans ma vie se sont effondrés. Les gens sur qui je comptais le plus m’ont poignardé. Je ne savais plus où regarder. Je cherchais de l’air. Tout en portant des œillères. C’était deux mois après la sortie de Volcano. J’étais en plein élan promo. J’étais entouré de gens toxiques (que j’aimais de toutes mes tripes).»
«Cette chanson («Savages») s’est écrite toute seule. Je peux en parler aujourd’hui avec un certain détachement. J’ai remonté une sale pente. Je ne suis pas le premier à avoir vécu des moments sombres, et certainement pas le dernier. Mais bon, j’ai toujours écrit sur mes émotions; dans ce cas, les émotions étaient à turbo. Ce n’était pas «important» de l’écrire… ça allait de soi. Le beau dans tout ça, c’est que je n’ai jamais eu autant de plaisir à faire un disque. Je n’aurais pas pu le faire l’an dernier alors que j’étais au milieu de tout ce chaos.»
4. On pourrait croire que Loveshit II est un espèce de prolongement de l’un de tes premiers albums, Loveshit (2008). Est-ce qu’il y a effectivement certains parallèles à faire entre les deux, et si oui, lesquels?
«Le parallèle principal est que j’ai joué toutes les guitares et 85% des basses sur l’album. Loveshit II ne pourrait pas plus me ressembler. Sans prétention, j’ai un peu trop hâte que tout le monde entende l’œuvre. Drôlement, l’album est sûrement la suite logique à The Sound Your Life Makes. Il est varié, un peu plus salade de fruits. Tout mon amour de la musique y passe. Toutes mes influences.»
5. On a pu observer tes talents de réalisateurs avec le vidéoclip de «Blondie» paru il y a quelques semaines. Est-ce que c’est une avenue que tu aimerais explorer dans le futur pour tes propres pièces ou pour d’autres?
«Possiblement. Le concept est simple avec «Blondie». Kimberley Bittner Quinn fait fréquemment des vidéos de danse contemporaine et d’exploration de mouvements sur son compte Instagram. J’ai simplement voulu en faire un clip. Et, entre-temps, j’ai acheté un chaton (Bill Murray), et je me suis permis de lui faire boire de l’eau à l’écran pendant le solo. C’est léger, un peu niaiseux, et surtout c’est ce que j’avais envie de voir. J’ai beaucoup de respect pour les réalisateurs. On verra bien pour la suite.»