MusiqueLes albums sacrés
Crédit photo : Michael Doerksen et www.facebook.com/WolfParadeMusic
C’est que la mixture entre les guitares et les claviers de Wolf Parade peut à la fois être élégante et bizarroïde, le groupe empruntant une voie plutôt non orthodoxe. Plusieurs les comparaient à des groupes new wave tels Talking Heads et XTC, ce qui fait encore du sens aujourd’hui. Sauf qu’après la surprise des premières pièces, Boeckner et Krug se passent le relais en alternant pièce sidérante sur pièce sidérante, comme si les deux se regardaient du coin de l’œil en se disant: «Ouais, ta chanson était solide, mais écoute bien celle-là!». Plus Apologies to the Queen Mary progresse, plus la barre monte sur ce que l’on a entendu précédemment.
Et malgré leurs différences, les deux leaders sont capables d’écrire des pièces majestueusement intenses. Dan Boeckner livre la première avec «Same Ghost Every Night», dont le thème de la mort de sa mère rappelle le «Death Disco» de Public Image Ltd. Le groupe utilise même un thérémine afin d’ajouter à l’émotion déjà palpable de la chanson, qui se termine en sombrant dans une noirceur tranquille. «Shine A Light» refait immédiatement jaillir la lumière et prouve que le groupe pouvait aussi écrire de bons singles. Il s’agit probablement de deux des meilleures pièces jamais écrites par Boeckner, incluant ses projets Handsome Furs et Divine Fits.
La réplique de Krug vient aussitôt avec deux autres pièces exceptionnelles. «Dear Sons And Daughters Of Hungry Ghosts», autre renvoi aux fantômes, voit Spencer faire référence à la mythologie grecque et bouddhiste pour exprimer une insatisfaction générale qui se conclut avec une espèce de chorale digne d’un freakshow. Il pousse l’intensité également dans ses chansons d’amour, ainsi la remarquable «I’ll Believe In Anything» devient une trame obsessive et compulsive visiblement intarissable: «I could take away the salt from your eyes / And take away what’s been assaulting you / If I could take the fire out from the water / I’d take you where nobody knows you / And nobody gives a damn». Rien de moins.
Parmi les raisons qui font d’Apologies to the Queen Mary un album exceptionnel, les prestations de Dan Boeckner et de Spencer Krug se retrouvent au sommet de la pyramide. Les deux chanteurs sont tellement investis dans leurs chansons qu’on a l’impression qu’ils y laissent une partie d’eux-mêmes. Le groupe offrira deux autres albums, le cruellement sous-estime At Mount Zoomer en 2008 et Expo 86 deux ans plus tard avant d’annoncer une pause en 2011. Wolf Parade a annoncé son retour tout récemment, alors qu’une tournée verra le groupe s’arrêter à Montréal au Théâtre Corona le 29 juillet ainsi qu’au festival Osheaga. Un album serait aussi en préparation. Bien que l’on ait tous hâte d’entendre du nouveau matériel, une chose demeurera certaine: il sera quasiment impossible de recréer le sentiment d’urgence exprimé sur Apologies to the Queen Mary.
La prochaine chronique à surveiller le 31 mars prochain: l’album «Black Love» de The Afghan Whigs. Consultez toutes nos chroniques précédentes au labibleurbaine.com/Les+albums+sacrés.
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Par Michael Doerksen et www.facebook.com/WolfParadeMusic