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Crédit photo : HHQc.com
En réunissant ainsi ces valeurs sûres, avec juste ce qu’il faut de similarité entre les musicalités et quelques textes provocateurs, HHQc.com s’est donné toutes les chances de rejoindre autant les fidèles incontestés du genre que les nouveaux venus à la recherche de sensations fortes, et ainsi donner ou redonner un bon coup d’envoi à la visibilité de ces artistes. Mais l’album (qui s’autoproclame déjà rien de moins que l’album rap québécois de l’année) saura-t-il répondre pour autant à toutes les attentes? Certains titres, il est vrai, affichent une mûre réflexion, notamment «Le Rappel» de Manu Militari et Souldia, «Cicatrices» de Rymz, Karma Atchykah et Cyrus, et enfin «Avant mon dernier adieu» de Taktika et Farfadet, qui ont tous les trois été mis en valeur par des vidéos aussi léchées que leurs textes.
S’il fallait choisir ses armes pour assurer à l’album un lancement efficace, ces choix étaient incontournables, mais qu’en est-il de l’ensemble? Inégal, c’est le moins que l’on puisse dire! Certains rappeurs comme Kasper nous ont habitués à une arrogance d’une pertinence assez variable, mais de la part de grands noms comme Sans Pression et Dramatik, dont la richesse des textes a su hausser les attentes envers le hip-hop local durant des années, ces textes qui semblent écrits sur un coin de table sont quasi impardonnables.
Il aurait été plus satisfaisant de sentir dans les textes qu’après avoir tant parlé de l’hostilité du milieu, ces artistes démontrent qu’ils sont maintenant parvenus à un point de rencontre, non seulement entre eux et 44 autres coreligionnaires, mais aussi entre l’enfant rebelle qu’ils ont été et les créateurs accomplis qu’ils sont appelés à devenir, si enfin ils acceptent d’assumer leur «je» d’adulte. Après 30 ans, crier aussi fort sa propre adolescence et sa passion pour les excès commence à sonner faux. Est-ce dire qu’il faille radoucir ses propos? Pas nécessairement, mais seulement concrétiser un peu mieux la prétention que la colère, armée d’un stylo, peut révéler ses lettres de noblesse, comme le démontre si bien Souldia, lorsqu’il affirme:
«Le visage gris comme une journée d’automne
Chacun sa chute, chacun sa façon d’atterrir au sol
J’ai jamais eu la tête pour obéir aux ordres
J’avais les mains trop sales pour le transcrire au propre»
Toutefois, s’il faut croire qu’il s’agit de survivants et que ce qui ne les tue pas ne rend pas plus fort, oser dépasser l’image du mauvais garçon qui dédaigne l’espoir semble une marque de courage qui permet de continuer d’adhérer à cet univers poétique, même dans ses aspects sombres, ce à quoi nous ouvrent finalement les rappeurs du duo Taktika par les mots:
«Sur terre pas facile de trouver du bon
C’est ce que l’époque nous laisse croire
Moi j’ai divorcé de la déception
Pour me marier l’espoir»
Pour le reste, on repassera…
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de la rédaction