LittératurePolars et romans policiers
Crédit photo : Actes Sud
En ouvrant le livre, je n’avais aucune attente, vous vous en doutez! Ma flamme pour cette saga n’avait plus la même vigueur qu’à l’époque, comme si la cendre, liquéfiée, l’avait éteinte pour de bon. Mais dès les premières pages, j’ai été happé par l’écriture de cette Suédoise qui reprend les rênes avec aplomb et qui redonne un souffle de vitalité à ces personnages que je croyais éteints à jamais.
On va se le dire, Mikael et Lisbeth n’ont jamais réellement eu d’atomes crochus, et pourtant ils sont devenus assez intimes, du moins assez pour développer, entre eux, des sentiments qui, sans être un amour pur et véritable, ont fait naître un désir qu’on n’aurait jamais cru possible!
Si vous avez une bonne mémoire, vous vous rappellerez, toutefois, qu’ils ne sont pas restés en très bons termes; Mikael étant maladroit à ses heures, et Lisbeth étant… d’une froideur incarnée lorsque l’envie lui prend de prendre ses distances.
Mais qui aurait cru qu’un jour leur chemin se croiserait à nouveau? Sûrement pas Michael Blomkvist, lui qui n’a même pas obtenu de réponse à son texto lorsqu’il lui a souhaité un joyeux Noël en fin d’année dernière…
Sauf que la vie réserve parfois son lot de surprises.
Dans ce tome 7, la fille de Mikael, Pernilla, a prévu se marier avec Henry Salo, gérant municipal de Glasskas, «beau gosse, peut-être un peu trop» à la grande gueule et qui n’hésite pas à tremper dans de sales affaires. Et comme Blomkvist n’a pas toujours été un père exemplaire, disons qu’il n’a pas intérêt à se défiler sur ce coup-là. Surtout depuis qu’il est en froid avec Erika et qu’il est incapable d’accepter l’idée que la revue Millénium, «le sang qui coule dans ses veines», soit devenue un balado, disons qu’il n’a plus l’excuse du «trop de boulot» maintenant.
C’est pourquoi il se rendra, le ventre noué par ce sentiment nouveau de se sentir si seul, à Gasskas, «nouvel eldorado de l’énergie verte», mais aussi repaire de gangsters situé au nord de la Suède, où Lisbeth se rendra également, sans savoir que Blomkvist y sera lui aussi. Sauf qu’elle, elle servira de tutrice à sa nièce Svala, livrée à elle-même depuis la disparition de sa mère. Vous vous imaginez qu’en bonne solitaire comme elle est, cette bad luck ne fait vraiment pas plaisir à Salander…
Entre Maman-Märta, qui est partie sans laisser de traces; Svala, qui se retrouve orpheline d’une mère disparue; Lisbeth, qui n’a aucune envie de partager son quotidien avec sa jeune ado de nièce; Mikael, qui se retrouve à un carrefour dans sa vie de journaliste sans attache; Erika, qui est littéralement absente de la trame; et Henry, qui se met les deux pieds au cœur de la tourmente avec un gang de criminels qui ont l’air bien décidés à répandre le mal autour d’eux, vous l’aurez compris, toutes ces fondations branlantes vont faire osciller le récit d’un côté et de l’autre, comme un voilier sur une mer agitée.
Or, Karin Smirnoff a le sens du suspense, et elle a le flair pour bâtir une histoire qui se tient droite, c’est moi qui vous le dis.
Avec, en fond, l’urgence d’agir au service de l’environnement – un projet de rouvrir une vieille mine de minerais est dans l’air, ce qui aurait pour effets de détruire les lacs, de rendre l’eau non potable –, et la personne d’Henry Salo, qui ne pense qu’à sa fortune et qui souhaite plus que tout ouvrir le plus grand parc éolien d’Europe, rien que ça, et raser tout ce qui se trouve sur le chemin afin de transformer le paysage en terrain industriel, l’heure est au désastre environnemental.
Je préfère m’arrêter ici, car comme vous le voyez, Karin Smirnoff, auteure de la Trilogie de Jana qui a été vendue à plus de 800 exemplaires en Suède, juste en Suède!, a de la suite dans les idées et le sens de la théâtralité. Et je ne voudrais surtout pas gâcher votre plaisir.
Avec une plume qui va droit au but, auréolée de mystères pour nous laisser dans le brouillard, des trames en parallèle qui créent un rythme haletant, il y a fort à parier que vous vous rendrez en bout de piste avec, comme moi, un sourire de satisfaction.
Comme dans le bon vieux temps.
L'avis
de la rédaction