LittératureL'entrevue éclair avec
Crédit photo : Lynn-Ernest Fournier
Marjolaine, nous sommes ravis d’engager la discussion avec vous! Vous qui êtes détentrice d’un baccalauréat ès arts en littératures française et anglaise et en philosophie, décerné par le Collègue universitaire de Saint-Boniface au Manitoba, vous avez entre autres travaillé à Radio-Canada et à Radio-Québec dans le secteur de la production et de la recherche. Et, depuis 1989, vous êtes écrivaine à plein temps. Parlez-nous brièvement de votre parcours professionnel et de ces passions qui font palpiter votre cœur!
«Mon rêve secret depuis l’adolescence a toujours été de devenir écrivaine. Ma formation universitaire et mes activités culturelles me dirigeaient tout naturellement vers les romans, et c’est un hasard (pour ne pas dire un échec) si je suis devenue biographe.»
«J’ai certainement essuyé une trentaine de refus de publication de mon premier roman sur un héros de guerre avant de tomber sur la bonne éditrice qui acceptait de risquer l’aventure avec une inconnue. Le hic, c’est qu’elle m’a demandé d’oublier le roman pour en faire une biographie historique.»
«J’ai accepté le défi et j’y ai trouvé ma vraie passion: celle de redonner une voix à de grands personnages qui ont marqué leur époque et que l’on a malheureusement oubliés.»
Avant de devenir, entre autres choses, une auteure de biographies accomplie, vous avez fait vos premiers pas, si on peut s’exprimer ainsi, au Cercle Molière, la plus vieille troupe francophone hors Québec, où vous avez travaillé pendant plus de dix ans. Vous avez également publié deux pièces de théâtre au sein du recueil Théâtre en pièces (Éditions du Blé, 2000). Qu’est-ce qui vous attirait tant dans les arts de la scène à cette époque?
«Je crois que j’avais un réel besoin de m’exprimer en français et de faire partie d’une équipe désireuse de créer quelque chose de vivant et d’emballant dans cette langue. S’amuser tout en apprenant une discipline de travail et en découvrant les œuvres de grands dramaturges, ainsi que la puissance de la parole.»
«Si je suis écrivaine francophone aujourd’hui, je le dois en grande partie à mes années d’apprentissage au Cercle Molière.»
On dit que vous êtes «une chercheuse passionnée qui se spécialise dans les biographies de remarquables oubliés», ces gens exceptionnels dont le parcours remarquable mérite d’être mis en lumière. À ce titre, vous avez publié les ouvrages Saint-Castin, baron français chef amérindien (1652-1707), Joseph-Elzéar Bernier, capitaine et coureur des mers (1852-1934), Lacorne Saint-Luc, l’odyssée d’un noble (1711-1784) ainsi que Louise Beaudet, de Lotbinière à Broadway (1859-1947), tous publiés aux éditions du Septentrion. Tout récemment, vous publiez Sir Hormisdas Laporte, homme d’affaires et maire de Montréal (1850-1934). Pourquoi avoir choisi de rendre hommage à ce Montréalais «qui a trouvé sa voix dans l’action et qui a su se tenir debout face à l’adversité»?
«Il y a peu de livres sur nos grands entrepreneurs qui ont tracé le chemin de la Révolution tranquille et de l’évolution de la société québécoise. Hormisdas était un homme engagé et un homme d’action qui croyait que ses concitoyens canadiens-français de la fin du XIXe siècle devaient agir pour se prendre en main, s’éduquer et s’organiser pour tenir tête à la supériorité anglo-saxonne dans tous les domaines.»
«Sa nation jadis conquise devait reconquérir le pouvoir économique et utiliser son capital pour le mettre au service des petites entreprises québécoises et des industries locales. Hormisdas n’avait pas peur des défis.»
«Il fut un prince du commerce international, un président de banque, un échevin et le 27e maire de Montréal engagé dans le mouvement réformiste qui voulait éliminer le favoritisme et la corruption à l’hôtel de ville de Montréal.»
«Il mérite qu’on se souvienne de lui.»
On est curieux de savoir: comment arrivez-vous à faire votre choix parmi toutes ces personnalités qui ont, chacun à leur façon, marqué l’Histoire? Dites-nous également comment vous orientez vos recherches pour aboutir, en fin de compte, à une biographie richement documentée!
«C’est souvent l’un de mes proches qui m’invite à découvrir un personnage d’exception. Parfois, c’est le hasard. Toujours, je dois m’assurer qu’il y a assez de documents d’archives pour alimenter mes années de recherches.»
«Je suis une grande fouilleuse. Je veux tout savoir sur le personnage qui m’intéresse. Il me faut ensuite structurer ces recherches par thèmes ou par époques. Lorsque le personnage m’habite, je peux commencer la rédaction.»
«Je préfère travailler chronologiquement pour ne pas perdre mes lecteurs. J’aime aussi utiliser des tableaux et beaucoup d’éléments visuels qui ajoutent à l’histoire.»
«Au bout du compte, j’attaque mes projets comme un casse-tête, un petit morceau à la fois.»
Et alors, avez-vous déjà une petite idée de cette personne d’exception qui brillera au sein de votre prochain ouvrage? En passant, si vous avez d’autres projets en cours, parlez-nous-en, on aimerait bien garder le contact avec vous dans le futur!
«La recherche de mon prochain personnage est terminée, mais je crois que j’ai encore plusieurs années de travail avant d’aboutir à la biographie du grand architecte montréalais Ernest Cormier (1885-1980).»
«On connaît ses grandes réalisations – Université de Montréal, Cour suprême à Ottawa, Université Laval, maison Cormier, Cour d’appel à Montréal, les portes de l’ONU, etc. –, mais on sait peu sur l’homme et ce qui l’a motivé ou influencé.»