LittératureL'entrevue éclair avec
Crédit photo : Julia Marois
Camille, Élizabeth, comment allez-vous? On vous souhaite la bienvenue à cette série d’entrevues éclairs! Alors, vous travaillez toutes les deux comme cheffes au sein du Journal 24 heures, section Politique et société, pour toi, Camille, et section Urgence climat, pour toi, Élizabeth. D’où vient-elle cette étincelle pour le journalisme et l’écriture, dans votre cas?
C.D-P. : «Depuis que je suis toute jeune, lire les nouvelles a toujours fait partie de mon quotidien. J’aime savoir ce qui se passe autour de moi, comprendre la société dans laquelle je vis, lire des chroniques d’opinion et des analyses pour me faire une tête sur un sujet…»
«Ç’a donc été naturel, pour moi, et après avoir étudié en communication, de me tourner vers le journalisme. J’ai eu mon premier emploi dans le domaine à 21 ans pour le journal La Tribune, à Sherbrooke. Et depuis, je n’ai plus jamais arrêté d’écrire!»
«Mon métier fait en sorte que j’apprends de nouvelles choses chaque jour. Je découvre des histoires intéressantes; c’est vraiment un domaine que j’adore.»
É.M. «Avant d’arriver à 24 heures, j’ai eu une belle carrière de journaliste culturelle au Journal de Montréal. C’est ma passion pour la culture qui m’a menée en journalisme. J’ai réalisé mon rêve! Mais après 10 ans dans ce domaine, j’avais l’impression d’avoir fait le tour. J’avais besoin de me sentir utile.»
«En couvrant les enjeux climatiques pour 24 heures, je me suis rapidement rendu compte que ce mandat était très stimulant intellectuellement et répondait à mon besoin d’aller au fond des choses. Il y a beaucoup de désinformation au sujet des enjeux climatiques.»
«Je crois que mon travail de rapporter les faits et données scientifiques peut faire une réelle différence.»
Le 1er novembre, les Éditions du Journal ont fait paraître votre livre réfléchi à deux têtes, Vivre avec une seule planète – Guide pour diminuer son empreinte écologique au quotidien, un ouvrage de près de 250 pages à travers lequel vous brossez «un portrait d’un mode de vie écoconscient et écoresponsable, et [où vous] présentez des gestes simples qui permettent de réduire sa consommation afin de mieux préserver les ressources naturelles». Expliquez-nous la genèse de cet ouvrage, et dites-nous aussi ce qui vous a donné l’envie d’accorder vos deux voix vers un même sujet.
C.D-P. : «On entend souvent dire que si tout le monde vivait comme le Canadien moyen, ça prendrait 3,7 planètes pour soutenir notre consommation de ressources. C’est une donnée très préoccupante, et qui me fait toujours me demander: “De quoi aurait l’air notre vie si on vivait avec les ressources d’une seule planète?”»
«En poussant mes recherches sur cette question, j’ai trouvé que la majorité de la réponse était déjà connue, mais qu’il n’existait pas d’ouvrage qui proposait un récapitulatif grand public complet sur le sujet, rempli de conseils concrets et adapté à la réalité québécoise. Pourtant, si j’en crois les discussions dans mon entourage, plusieurs personnes se posent la question, parce qu’ils veulent changer leur mode de vie, mais qu’ils ne savent pas trop par où commencer. Le livre vise à répondre à ce besoin d’information.»
É.M. : «Le livre découle d’un reportage que Camille a réalisé en 2021. Elle m’avait approchée pour me proposer un sujet en lien avec le Jour du dépassement et mettre en lumière notre surconsommation. À l’époque, je n’étais pas enthousiaste à l’idée, parce que je craignais qu’on mette le fardeau du changement sur les épaules des individus et que ce soit culpabilisant. Mais Camille m’a convaincue de l’importance des changements individuels. Elle m’a fait voir les nombreux bénéfices personnels qu’on peut tirer d’un mode de vie sobre sur notre santé physique et mentale, et notre portefeuille, entre autres.»
«Son reportage était excellent et a beaucoup résonné chez nos lecteurs. Pour plusieurs, moi y compris, c’était la première fois qu’on pouvait se projeter concrètement dans un avenir carboneutre. Loin d’être culpabilisant, il était plutôt enhardissant et porteur d’espoir.»
Sur le quatrième de couverture, il est écrit, et on cite, «Nous, les humains, épuisons les ressources naturelles de la planète de plus en plus rapidement. En 2023, le Canada a atteint son Jour du dépassement le 13 mars, et chaque année, il arrive de plus en plus tôt». On file droit vers la catastrophe à ce rythme! Rappelons que cette journée symbolique est tombée le 2 août cette année, soit cinq jours plus tard qu’en 2022. Et comme si ce n’était pas assez, il semblerait que le Canada soit l’un des pays ayant consommé ses ressources le plus rapidement. Quel est votre point de vue sur cette observation, ma foi, dramatique?
C.D-P. : «C’est effectivement un phénomène préoccupant. Il laisse entrevoir sans l’ombre d’un doute que le mode de vie du Canadien moyen est insoutenable à long terme et qu’il faut changer la façon dont on vit si on veut que les humains puissent continuer de s’épanouir sur Terre dans les prochaines décennies.»
«La bonne nouvelle, c’est que des données scientifiques démontrent que même avec huit milliards de personnes sur Terre, il est possible d’avoir un rythme de vie décent qui respecte les limites de la planète. Et que ce mode de vie peut nous rendre heureux, notamment, car il peut impliquer moins de dépenses financières, moins de stress, des rapprochements avec sa communauté, une meilleure santé physique et mentale, et plus de résilience par rapport aux changements climatiques.»
«C’est là-dessus qu’on se concentre tout au long du livre!»
É.M. : «Des données qui démontrent que notre rythme de consommation s’accélère, il n’en manque pas. Je crois même qu’à force de les voir au quotidien, nous y sommes devenus quelque peu imperméables. Plusieurs se sentent impuissants devant cette destruction de notre planète.»
«Ce livre vise à redonner à toutes les personnes qui sont préoccupées par les changements climatiques le pouvoir de vivre en cohérence avec leurs valeurs. Parce que, non, il n’est pas trop tard. La science nous dit que nous avons encore une fenêtre d’action pour changer le cours des choses et garantir un avenir viable et plus juste à nos enfants.»
Une chose est sûre, il y a urgence d’agir, et il n’est jamais trop tard pour passer à l’action et diminuer son empreinte écologique individuellement et collectivement. Parlez-nous de votre livre: quels grands thèmes abordez-vous, et également, qu’auriez-vous envie de dire à nos lecteurs et lectrices pour qu’ils s’empressent de se le procurer?
C.D-P. : «Notre livre est rempli de conseils concrets pour rendre son mode de vie plus écolo au Québec dans six facettes de la vie: la consommation d’objets, l’alimentation, les transports, le logement, les voyages/activités, ainsi que la gestion des déchets.»
«Je pense que les lecteurs et lectrices vont se sentir beaucoup plus outillés pour prendre des décisions qui conviennent à leur situation grâce aux informations qui sont présentées dans le livre. On y a aussi intégré un système de classement qui permet de repérer, par exemple, tous les conseils qui permettent d’économiser de l’argent, ceux qui permettent d’améliorer sa santé, ceux qui sont applicables du jour au lendemain, de même que ceux qui ont le plus gros impact.»
«Les gens peuvent donc choisir les gestes qu’ils veulent poser en priorité en fonction de ce classement.»
É.M. : «C’est un livre très accessible qui n’est pas réservé à ceux qui visent un changement radical. Tout le monde qui lira cet ouvrage ressortira de sa lecture avec au moins un truc (et sûrement plus!) qu’il ou elle peut appliquer.»
«Si vous voulez vous assurer que les quelques gestes que vous poserez seront significatifs, vous n’avez qu’à suivre les conseils étiquetés «Gros impact». Si vous voulez plutôt commencer doucement en appliquant ce qui est le plus facile, on a aussi une étiquette pour ça!»
«Changer son mode de vie, c’est un processus, pas une finalité, et j’invite les lecteurs à l’aborder ainsi.»
Vous croyez aux pouvoirs mystiques, vous? Nous oui! Imaginez qu’il soit en votre pouvoir de vous glisser dans la peau de Justin Trudeau et de prendre possession de ses commandes! C’est tentant, avouez! Allez, dites-nous donc quelles seraient les grandes décisions que vous adopteriez en son nom, le temps que l’effet magique dure… Si ça se trouve, grâce à vous, le Canada pourrait peut-être rattraper son retard, qui sait!
C.D-P. : «Eh bien, comme journaliste, il est toujours délicat de répondre à ce genre de question, puisque nous devons conserver une neutralité politique, donc je vais reprendre les propos des experts que nous avons consultés lors de la rédaction de la conclusion du livre, qui portent sur les solutions qui pourraient être mises en place au niveau collectif.»
«Selon eux, on pourrait taxer davantage les fortunes des ultrariches (qui polluent de façon démesurée), ainsi que les investissements dans les industries polluantes. Mettre en place un système efficace de transport en commun à la grandeur du pays. Favoriser le développement de quartiers denses, promouvoir l’écoconception et subventionner le passage vers des modes de vie plus écolo.»
É.M. : «Camille a résumé parfaitement le tout!»