LittératurePolars et romans policiers
Crédit photo : Tous droits réservés @ Montage: Éric Dumais
«Le suspect» de Fiona Barton · Fleuve Éditions, collections Fleuve Noir
Pour moi, un bon auteur n’est pas forcément celui qui peut se vanter d’avoir à son actif une bonne dizaine de romans, voire plus. Parfois, il suffit d’une étincelle, d’un jet diablement inspiré, et le tour est joué.
C’est l’impression, en tout cas, que m’a laissée Fiona Barton après ma lecture de son premier roman intitulé La veuve. Derrière ce drame familial où une femme finit par douter des bonnes intentions de son mari se cache une auteure qui sait comment captiver et maintenir l’attention de son lecteur, à l’instar de Shari Lapena ou Paula Hawkins, notamment.
Avec Le suspect, qui suit de près l’excellent La coupure, Fiona Barton m’a une fois de plus maintenu en haleine avec ce troisième roman où l’on suit les aléas d’une enquête corsée qui n’est pas évidente à démêler: celle qui tente de faire la lumière sur le décès tragique d’Alexandra O’Connor et de Rosie Shaw, deux adolescentes britanniques retrouvées mortes en Thaïlande, où elles étaient allées passer des vacances loin des tracas de leur quotidien.
Qu’a-t-il bien pu leur arriver? Et surtout, est-ce une mort accidentelle, ou pire encore: un assassinat?
Vous l’aurez deviné, le doute plane longtemps dans cette histoire où l’ombre de la tragédie survole chacun des chapitres.
Et là où l’auteure excelle à mon avis, c’est au niveau de l’imbrication et de l’alternance des voix narratives. Dans cette histoire, la progression de l’enquête se fait au compte-goutte, et Dieu merci, pas uniquement à travers les yeux d’un unique enquêteur. Ici, on suit le déroulement du récit à travers différentes paires d’yeux: celles de la journaliste (Kate Waters), de la mère (Lesley Shaw), de l’inspecteur (Zara Salmond), et même à travers les confidences d’Alex, qui a tenu un journal intime de son vivant.
Voilà une façon efficace de rythmer une histoire et de semer le doute dans l’esprit d’un lecteur.
Alors, qui est ce fameux suspect? Je n’en dis pas plus!
Appréciation: ⭐⭐⭐⭐
«Retrouve-moi» de Lisa Gardner · Albin Michel
J’ai fait la connaissance de l’écrivaine Lisa Gardner il y a quelques années déjà avec Arrêtez-moi (2014), où une femme, Charlie Grant, est certaine de connaître l’heure et la date exacte de sa mort. L’intuition féminine, je suppose!
C’est à partir de ce jour-là que j’ai fait la rencontre de la détective D.D. Warren, dont l’intelligence et le sens de la déduction l’ont toujours aidée à résoudre des crimes par moments complexes. Avec Retrouve-moi, elle se remet en selle pour une huitième enquête et pas des plus aisées: les membres de la famille Baez sont retrouvés morts, criblés de balles. Dans ce récit, il n’y a qu’une survivante, Roxanna, âgée de 16 ans, qui a eu la vie sauve parce qu’elle est sortie promener ses deux chiens au moment où la tragédie se déroulait chez elle. Mais elle n’est jamais rentrée depuis…
A-t-elle quelque chose à se reprocher, ou tente-t-elle de fuir celui ou celle qui a commis l’irréparable?
En toute transparence, j’ai eu un peu de mal à rentrer dans cette histoire, même si la résolution de l’enquête, qui finit par révéler quelques détails croustillants, m’a permis de me réconcilier avec ses petits défauts.
Après un prologue nébuleux qui a soulevé quelques questionnements dans mon esprit et des chapitres qui se succèdent, mais sans nécessairement assouvir ma soif de coups de théâtre, j’ai finalement trouvé le bon rythme, celui que j’attendais depuis une bonne centaine de pages, comme un marathonien qui a trouvé la bonne cadence après s’être essoufflé trop vite.
Lisa Gardner est une auteure américaine qui n’a plus besoin de faire ses preuves, cela ne fait aucun doute, je lui avais même consacré un dossier «Dans la tête de…» en novembre 2018, tellement elle est devenue une auteure de thrillers incontournable. Avec Retrouve-moi, on se retrouve à deux carrefours, avec deux grandes questions au bord des lèvres: où se cache Roxanna Baez et qui a assassiné sa famille?
S’il y a bien une dernière raison qui m’a poussé à regretter d’autres romans de la même auteure, c’est la présence un brin envahissante de Flora Dane, une femme qui a été séquestrée de force par un psychopathe et qui souhaite se rendre utile en investiguant aux côtés des autorités. Pourquoi avoir accordé autant de crédit à une détective en herbe qui fait autant d’ombrage à son détective?
J’ai trouvé que ce choix narratif manquait de cohérence et qu’elle ne méritait pas d’avoir autant les rênes de l’enquête. Et vous, qu’en avez-vous pensé?
Appréciation: ⭐⭐⭐
«Feu follet» de Patrícia Melo · Actes Sud, collection Actes Noirs
C’était là ma toute première immersion dans l’univers flyé de la dramaturge et romancière brésilienne Patrícia Melo, qui livre avec Feu follet une satire grinçante du showbizz, des reality shows et des travers de la justice, et ce, à travers les yeux d’Azucena, la responsable du service de la police scientifique, dont le nom est inspiré de l’un des opéras de Verdi!
Avant même que j’aie eu le temps de cligner deux-trois fois des yeux, un événement tragique vient faire basculer ce récit pourtant teinté d’un humour noir, mais singulier: Fábbio Cássio, un acteur imbu de lui-même, narcissique pathologique de surcroît, reçoit une balle dans la tête en pleine représentation du Feu follet, alors qu’il était seul sur scène, en train de déclamer son texte devant un public tout ouïe.
Mais qu’est-il arrivé pour que ce richissime beau gosse en vienne à vouloir mettre un trait sur sa vie «de rêve» d’une façon aussi tragique? Était-ce un suicide, un accident ou un homicide, peut-être? La question plane et demeure toutefois sans réponse. Sauf qu’Azucena compte bien faire la lumière sur cet événement qui a chamboulé les proches de Fábbio et ses fans.
À l’instar d’un théâtre qui se vide d’un coup alors qu’une foule en délire vient d’assister à un événement qui dépasse l’entendement, l’intrigue de ce roman part dans tous les sens au moment où tous les proches du défunt deviennent des suspects potentiels.
Et c’est peut-être ce que je reprocherais à ce huitième roman de l’auteure: l’histoire possède toutes les qualités d’un suspense bien dosé, mais l’intrigue va dans tous les sens au rythme où une multitude de personnages font leur entrée en scène.
Mais l’auteure réussit à reprendre les rênes de son intrigue en pleine course, et au final, on arrive à la ligne d’arrivée presque aussi essoufflé.e que la protagoniste, mais avec cette satisfaction d’avoir au moins assisté à une finale imprévisible et qui a du punch. Fiou.
Appréciation: ⭐⭐1/2
«Vongozero» de Yana Vagner · Pocket
Je suis récemment tombé sur ce roman au format poche qui décorait l’une de mes bibliothèques depuis sa parution en 2016 chez Pocket. En réalité, il est sorti initialement en 2011 et a été traduit en français en 2014 chez Mirobole.
Dire qu’au moment où je le recevais, l’auteure faisait paraître sa suite, Le lac (2017). J’ai du rattrapage à faire!
Dès les premières pages, je n’ai pas pu m’empêcher d’avoir la sensation de vivre une forte impression de déjà-vu tellement l’histoire semble être prémonitoire de ce que nous vivons avec la COVID-19 depuis 2020. Heureusement pour nous, nous avons réussi à plus ou moins maîtriser le chaos; ce n’est pas trop le cas ici.
L’auteure russo-tchèque Yana Vagner nous emmène à Moscou, capitale de la Russie, où une terrible épidémie de grippe fait rage. Résultat, la ville est en quarantaine, les morts s’entassent par milliers, et les villageois en périphérie craignent le pire. Très vite, Anna, son mari Sergueï et leur fils Micha se préparent à quitter leur demeure pour aller là où l’épidémie ne les atteindra pas: au lac Vongozero, situé au nord de Saint-Pétersbourg et à l’est de la Finlande. En chemin, ils rencontreront des survivants, comme eux, et ensemble, ils tenteront de fuir cette catastrophe qui menace la survie de l’humanité.
Honnêtement, je m’attendais à être davantage sur l’adrénaline, plus les péripéties s’emboîtaient. Bien sûr, la peur de rencontrer des pilleurs et l’inquiétude de manquer de vivres, ou même d’essence, sont au cœur des préoccupations de ce groupe de survivants, mais en tant que lecteur, je m’attendais à ce qu’il y ait plus d’embûches majeures pour que cette odyssée nordique me maintienne en haleine.
La plume de l’auteure est certes habile, mais il est évident qu’elle maîtrise beaucoup moins les ficelles d’un suspense à donner le frisson. Qu’à cela ne tienne, l’intrigue se déguste aussi bien qu’un pain sorti du four, mais on ne peut s’empêcher d’avoir eu l’impression que la majorité des péripéties tombaient à plat.
On verra bien si leur arrivée au lac Vongozero se déroulera sans anicroche. À suivre dans un prochain dossier!
Appréciation: ⭐⭐⭐1/2
«Sous protection» de Viveca Sten · Albin Michel
C’est possiblement le meilleur thriller que j’ai eu la chance de lire, et c’est en plus la première fois que je fais la rencontre de Viveca Sten, une auteure suédoise qui n’a rien à envier à Camilla Läckberg ou à Camilla Grebe.
La force de l’écriture de Sten réside principalement dans sa construction d’un récit qui déterre les traumatismes du passé pour mieux explorer les séquelles du présent, de même que dans sa facilité à manier des histoires trépidantes qui évoluent en parallèle pour mieux se confronter lors d’un coup de théâtre qui, inéluctablement, frappe fort!
Sous protection, son neuvième roman à paraître aux Éditions Albin Michel, est un thriller saisissant sur l’origine du mal et les stigmates causés par une enfance traumatisante. À travers cette histoire qui a captivé mon attention du début à la fin, et où j’ai retenu mon souffle à de nombreuses reprises, on y fait la rencontre d’Andreis Kovač, un réfugié de la guerre de Bosnie, qui est devenu au fil des ans un baron de la drogue et l’un des hommes les plus puissants de tout Stockholm.
Le hic, c’est qu’il a du mal à contrôler son agressivité, et lorsqu’il se met en colère, il a souvent tendance à jeter son dévolu sur sa femme Mina, qui redoute maintenant chaque jour passé en sa compagnie. C’est qu’elle ne reconnaît plus l’homme qu’elle a épousé et qui est devenu méprisant, imprévisible et violent. Et même si elle fait tous les efforts possibles pour que la maison soit en ordre et que les repas soient prêts à son arrivée, s’il y a un détail de travers, un seul, il cogne. Et il ne manque jamais sa cible.
Un beau jour, Andreis Kovač lève la main une fois de trop sur Mina, et pour la procureure Nora Linde, qui est obsédée à l’idée de coffrer ce dernier, cet incident est la goutte qui fait déborder le vase, et aussi le parfait moment pour contrecarrer les activités illicites d’Andreis. Ainsi, elle mettra tout en œuvre pour que Mina soit placée sous protection avec son bébé dans une villa sécuritaire de l’archipel, en espérant que cette dernière se confiera à elle pour qu’elle puisse atteindre Andreis de la façon la plus sécuritaire possible: le coincer pour fraude fiscale, comme il est intouchable autrement.
Je vous laisse imaginer la réaction d’Andreis Kovač lorsqu’il apprendra que sa femme Mina, ainsi que leur poupon, lui ont été arrachés à la suite de son dernier esclandre! Évidemment, il entrera dans une telle rage qu’il tentera tout pour retrouver sa trace, et lui faire payer cette trahison.
Nul besoin de vous en révéler davantage: vous savez ce qu’il vous reste à faire. Rarement une romancière a réussi à me faire plonger dans son univers d’une manière aussi vibrante et réaliste que cette dernière.
La recette du parfait thriller? C’est Viveca Sten qui la connaît!
Appréciation: ⭐⭐⭐⭐⭐
«Premier sang» d’Amélie Nothomb · Albin Michel
Je poursuis ce dossier de suggestions de lectures au féminin avec une écrivaine prolifique que j’ai eu le bonheur de croiser aux Galeries Lafayette, à Paris, à l’occasion d’une dédicace au moment de la parution de Frappe-toi le cœur, mon tout premier Amélie Nothomb, en plus!
J’ai alors découvert une plume comme je les aime: franche, directe, concise. Pour moi, j’avais enfin découvert, et avec beaucoup de retard, la version féminine de David Foenkinos, qui a ce pouvoir de glacer rien qu’avec les mots.
Avec ce 30e roman en 30 ans de carrière, l’écrivaine belge délaisse pour un temps l’espace de la fiction pour «s’attaquer» à un pan plus intime de son arbre généalogique, comme elle l’a fait pour Soifs: le récit d’apprentissage de Patrick Nothomb, son père, celui qu’on décrivait comme «le militaire de la famille», qui a vu la mort de près à plus d’une reprise, en plus de l’avoir côtoyée dès son plus jeune âge avec la perte de son propre père, André.
Ainsi, on vogue de souvenir en souvenir, au cœur du récit d’une vie qui défile au rythme d’ellipses généreuses: notre protagoniste n’a que huit mois à l’ouverture du roman, quelque part en 1937, quatre ans, lorsque la guerre éclate, et vingt-huit ans, lorsqu’il se rend au Congo à titre de diplomate pour le ministère des Affaires étrangères, à l’aube de «la plus grande prise d’otage du vingtième siècle».
J’ai particulièrement aimé le récit «éducatif» des vacances de Patrick Nothomb au Pont d’Oye, au château des Ardennes, là où il fait la rencontre de l’aristocratie «nothombesque»! Et c’est d’ailleurs là qu’il apprendra à la dure comment on devient un vrai Nothomb dans ce monde!
«Le voici enfin aguerri pour la rentrée des classes», s’exclame à un moment le baron Pierre Nothomb, celui qu’on surnomme Grand-Père. Ça donne le ton, n’est-ce pas?
Ce qui rend ce récit aussi vibrant de réalisme, c’est bien le fait qu’Amélie Nothomb ait su reconstituer avec justesse les moments charnières de la vie de son père, en plus de dresser un portrait vivant du jeune homme qu’il était avant de devenir l’homme qu’il a été.
Après cette lecture, vous voudrez sans doute lire Dans Stanleyville: journal d’une prise d’otage, histoire de prolonger votre immersion à travers l’autobiographie de Patrick Nothomb, des mémoires publiées chez Duculot en 1993.
Appréciation: ⭐⭐⭐⭐
«Farouches» de Fanny Taillandier · Éditions du Seuil (Fiction & Cie)
«Chaque endroit est un autre endroit», disait Jorge Luis Borges, et cette citation, l’écrivaine française Fanny Taillandier se l’est appropriée en l’insérant en exergue de son plus récent roman, Farouches, le second tome de son cycle Empires qu’elle poursuit ici avec beaucoup de doigté. Et en effet, au fil des pages, on ressent vite cette impression étrange d’être quelque part et ailleurs en même temps.
Avec cette plus récente fiction publiée chez Seuil, l’auteure étend son terrain de jeux en brouillant consciemment les frontières du réel pour nous faire pénétrer, subtilement, comme à pas feutrés, dans un univers dystopique où elle fait fi des codes pour mieux nous berner.
Et c’est là qu’à mon sens elle réussit haut la main son exploit, puisque j’ai vite perdu mes repères, avec cette impression de voir le monde, celui que je croyais connaître en tout cas, m’échapper tranquillement…
C’est principalement ce qui m’a le plus dérouté – et surpris – lors de ma lecture, car a priori, rien ne laissait présager que le quotidien en apparence banal de Jean et Baya, ce couple amoureux récemment installé dans une villa ligurienne au bord de la Méditerranée, serait à ce point perturbé par leur environnement et les espèces qui cohabitent. De fait, des sangliers viennent piétiner leur jardin durant la nuit en laissant des traces de sabots dans l’herbe, au grand dam des propriétaires qui réagissent vivement à cette intrusion, comme si elle remettait en cause leur droit d’exister et de vivre sereinement, en tant qu’êtres humains.
Au fil des jours qui passent et des rencontres inusitées qui ponctuent leur existence ordinaire, on sent un point de bascule, ce point de non-retour qu’Haruki Murakami aurait eu, lui aussi, l’audace de faire vivre à ses personnages dans l’une de ses fictions. Et plus la présence des sangliers se fait sentir, plus les personnages perdent pied, en plus de perdre l’essence même qui les constituait fondamentalement.
Je dois avouer que l’auteure a fait preuve de finesse d’esprit et d’intelligence, car à travers cette histoire d’amour qui n’en est pas une, à travers cette histoire réaliste qui n’en est pas une, elle a fait le pari de placer l’humain, «ce drôle d’animal», sur le même piédestal que les animaux et les végétaux, afin de mieux rendre compte de ses nombreuses imperfections et contradictions.
Je n’en dis pas plus: je vous laisse à votre tour savourer cette drôle de fiction qui m’a diverti et fait réfléchir à la fois, avec son vocabulaire riche à souhait, gorgé d’allusions comiques et de clins d’œil qui mettent bien en évidence les contradictions d’une société et des êtres qui la peuplent.
Appréciation: ⭐⭐⭐⭐1/2
«Le Créateur de poupées» de Nina Allan · Éditions Tristram
J’ai choisi délibérément de clore ce dossier de lectures au féminin avec le petit ovni de cette sélection, Le Créateur de poupée de l’écrivaine écossaise Nina Allan, un roman étrange qui m’a à la fois déstabilisé et ensorcelé, rendu perplexe et fait sourire, car son histoire est tellement flyée et remplie d’inventivité que j’ai fini par m’attacher à ses petits personnages plus grands que nature et à leur passion commune… pour le moins insolite!
Dès le lever du rideau, on nous présente Andrew, un quadragénaire de très petite taille, un grand solitaire depuis l’enfance. Ce dernier aurait pu être un vrai de vrai nain s’il n’avait pas ces quelques pouces qui le rendent juste… plus petit que la normale.
S’il est devenu un créateur de poupées de renommée internationale, c’est parce qu’un beau jour, il a été marqué par la beauté d’une poupée en vitrine. Depuis ce jour-là, il se passionne pour ces êtres de petite taille, au point d’être abonné à des revues spécialisées, d’en confectionner lui-même, et d’échanger avec d’autres passionnés comme lui, dont Bramber Winters, une Anglaise avec qui il alimentera une correspondance épistolaire pour le moins ardente durant plus d’un an.
À un point tel que leurs échanges deviendront vite de plus en plus intimes, et intenses.
Andrew, qui croit avoir trouvé l’âme sœur en la personne de Bramber – on la devine de nature farouche, refusant tout prétexte pour entrer en contact direct avec son correspondant – décide, sur un coup de tête, de partir à l’aventure pour se rendre à West Edge House, dans les Cornouailles, là où réside sa bien-aimée.
Car il a une idée derrière la tête: lui faire une petite visite surprise, rien que ça. Mais vous vous doutez bien que l’arrivée d’Andrew n’aura pas l’effet de surprise désiré!
Je l’avoue, j’ai été vite conquis par l’étrangeté de ce récit, où réalisme et fantasy se côtoient pour mieux brouiller nos perspectives et nous faire plonger dans un univers singulier où les poupées parlent et où les fées existent.
Nina Allan maîtrise indubitablement l’art de raconter des histoires étranges et inquiétantes. Certains y sont habitués depuis La Fracture (2019), que je n’ai toutefois pas encore lu. Mais là où elle a le plus excellé, à mon avis, c’est au niveau de sa trame narrative, qu’elle a finement découpée en trois voies, avec l’ajout de nouvelles signées par Ewa Chaplin, une artiste polonaise de grande renommée qui s’est fait connaître du monde entier par ses poupées uniques.
Ainsi, à travers ces histoires de nains et de fées qui nous éloignent du récit initial, on se prend à reconnaître ici et là des situations qu’Andrew et Bramber semblent avoir vécu…
En fermant ce livre, j’ai eu l’impression qu’on m’avait jeté un sort; je vous laisse imaginer à quel point ce livre est singulier. Préparez-vous à un voyage pas comme les autres!