Littérature
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Étrange musique étrangère de Leonard Cohen (Éditions Typo, 2018) • 304 pages • 17,95 $
Ce livre au format poche offre une incursion totale dans l’univers et les inspirations de Leonard Cohen – tous textes confondus, de 1956 à 1993. Ainsi, d’un poème à l’autre, l’artiste fait aussi bien référence au trauma de la Seconde Guerre mondiale qu’il a vécue en tant que Juif, qu’à l’admiration et à l’amour profond qu’il porte à la femme.
Certes, ses pensées sont crues; ses paroles provocantes et sans filtre expriment les choses telles qu’elles lui passent par la tête, mais on découvre aussi des touches d’humour bien senties. Par exemple, on sourit en lisant le poème «La fenêtre», où il se moque d’un garçon un peu trop porté sur son apparence qui se refait une beauté devant une fenêtre… sans remarquer que Cohen l’observe de l’autre côté.
Enfin, au milieu d’une majorité de pensées directes et parfois tranchantes à couper au couteau, il est intéressant de noter que des petites pépites aux accents romantiques se cachent, dont «Chanson» qui a été pour moi un coup de cœur:
«J’ai failli me coucher
sans me rappeler
les quatre violettes blanches
que j’ai mises à la boutonnière
de ton chandail vert
et comment je t’ai alors embrassée
et tu m’as embrassé
timide comme si jamais
je n’avais été ton amant»
Appréciation: ⭐️⭐️⭐️
Deep Blues de Robert Palmer (Éditions Allia, 2021) • 448 pages • 48,95 $
Il aura fallu attendre près de 40 ans pour qu’une version traduite en français de Deep Blues voie le jour. Ce grand classique de la littérature musicale, et plus spécifiquement du genre blues, date de 1981 dans sa version originale. Il s’agit là d’un très beau livre, extrêmement bien documenté avec la présence de nombreuses archives, d’affiches de spectacles et de photos des musiciens.
Pour que l’immersion soit totale, je vous suggère de le lire en écoutant la discographie soigneusement préparée par Robert Palmer, chapitre après chapitre!
À noter, toutefois: ce livre est à ouvrir quand vous avez la disposition mentale et la concentration nécessaires. Il peut, par moments, être assez difficile d’accès – même en français –, car l’auteur est un musicologue qui s’adresse dans des termes destinés à ses confrères et collègues et on sent le caractère universitaire de son analyse.
«Avec leur présence, la soirée prenait vie: c’étaient les héros des quartiers mal famés. Ils avaient à disposition autant d’alcool et de femmes qu’ils le souhaitaient, parfois même un peu plus […] Pour ceux qui dansaient, buvaient, flirtaient ou faisaient la cour au son de leur musique, c’étaient des stars.»– Robert Palmer, au sujet des chanteurs de blues.
Appréciation: ⭐️⭐️⭐️⭐️1/2
Le classique fait pop! – Pluralité et décloisonnement des genres de Danick Trottier (Éditions XYZ, 2021) • 264 pages • 26,95 $
Cet essai se lit vraiment bien et comporte des explications claires, que l’on soit connaisseur ou non du domaine musicologique. Au fil des pages, Danick Trottier revient sur l’histoire et l’évolution de la musique des siècles passés: il s’attarde plus spécifiquement sur la mise en opposition de la musique sérieuse versus la musique légère, ainsi que sur la naissance de la musique populaire et la notion de hiérarchisation des genres musicaux.
S’ensuit une deuxième partie très bien menée sur l’avènement du numérique et le décloisonnement des genres, avec notamment l’hybridation de la création musicale et la nécessité de s’interroger sur la portée des étiquettes, qui sont peut-être devenues obsolètes dans une ère où la création dépasse les frontières musicales et s’affranchit des codes préétablis.
En somme, Le classique fait pop! rappelle que le fait de revenir à l’expérience musicale en tant que telle (où l’auditeur se contente d’ouvrir les oreilles en sortant de l’analyse et de la prise en compte du contexte socioculturel) peut être extrêmement satisfaisant!
Appréciation: ⭐️⭐️⭐️⭐️