3 essais littéraires qui nous invitent à repenser notre époque – Bible urbaine

LittératurePoésie et essais

3 essais littéraires qui nous invitent à repenser notre époque

3 essais littéraires qui nous invitent à repenser notre époque

Faire un pas en arrière pour mieux avancer

Publié le 24 mai 2021 par Clara Mercier

Crédit photo : Tous droits réservés @ Unsplash

Ce mois-ci, je vous présente trois essais littéraires qui nous invitent à aborder notre époque sous un tout nouvel angle. Ainsi, par la découverte de trois perspectives, vous apprivoiserez trois plumes différentes, tantôt poétiques, tantôt lapidaires et tantôt humoristiques. Qu'ont-elles en commun, vous demandez-vous? Elles constituent un signal d'alarme. En effet, ces trois œuvres nous convient à l’immobilité, le temps de faire le point sur le monde et de nous attarder sur les défis qui compromettent notre humanité.

«L’art presque perdu de ne rien faire» de Dany Laferrière · Le livre de poche 

À travers de courts chapitres qui font l’éloge de la lenteur et de l’art de ne rien faire, Dany Laferrière aborde divers enjeux existentiels tels que la vitesse, le temps, l’aventure humaine, l’amour, la culture, le voyage et plus encore. Par-dessus tout, il s’agit d’une exploration, celle d’une posture qui permet «de saisir autrement la vie». Il la nomme «l’art de rester immobile».

J’ai été particulièrement touchée par la plume de Laferrière, qui dépeint ses réflexions philosophiques d’images poétiques: «La misère ne fleurit, croit-on, que dans le tiers-monde. […] Comme si l’amour venait d’un milieu pauvre où on avait toujours faim. Comme si l’amour venait du sud de la vie. […] Pour tous c’est la même aventure. Une aventure humaine qui commence par la naissance, et finit par la mort. La vie, c’est ce qui se passe entre les deux. Et personne ne peut la mesurer.»

Lorsqu’on referme ce livre, on est pris d’une véritable faim de contemplation.

Afin d’agrémenter votre plaisir de lecture, je vous recommande une bonne mangue fraîche et juteuse, une chaise à l’ombre d’un arbre ou près de la fenêtre, et la mise en arrêt du temps.

«Camarade, ferme ton poste» de Bernard Émond · Lux Éditeur 

Camarade, ferme ton poste est un essai qui ne ménage pas la nostalgie et le découragement vis-à-vis du «monde comme il va». Mais attention! La nostalgie de l’auteur n’enjoint point à la réhabilitation du passé ni à son retour complet. Il traduit plutôt un manque: «Il me semble parfois que nous sommes nostalgiques de choses que nous n’avons pas vécues»

À travers ces essais préalablement publiés dans différents contextes (colloques, conférences, revues…), on y retrouve l’idée de responsabilité, du «sens de la dette» que nous aurions perdu. Bernard Émond déplore la disparition progressive (et terriblement rapide) du sens commun et de l’héritage. En somme, il s’inquiète de cet oubli collectif au profit d’une liberté dérisoire: «Nous sommes libres, mais pour quoi faire ? […] Nous sommes libres pour rien: il nous faut réapprendre à être libres pour quelque chose […]: des principes, des valeurs auxquelles nous obéirons librement…»

En somme, l’auteur nous invite à reconsidérer notre rapport au passé, à prendre conscience que «quelque chose nous a fait»: «Nous sommes le produit d’une histoire, d’une langue, d’une culture […]. L’oubli n’abolit pas le passé et l’Histoire continue son travail souterrain.»

Je recommande ce livre à qui se sent nostalgique d’un monde qu’il n’a pas connu, à qui se sent impuissant, mais surtout, à qui voit le monde comme il va de soi…

«Survivre au XXIe siècle» de Stéphane Garneau · Les Éditions de l’Homme 

Dans ce guide de survie, l’animateur de radio, chroniqueur et auteur Stéphane Garneau nous expose son avis à l’égard des technologies qui abondent en ce siècle et de notre relation à celles-ci. Il ne s’agit pas de leur condamnation, mais plutôt d’une invitation à se positionner face à celles qui sont de plus en plus omniprésentes dans notre quotidien et sans quoi nous aurons tôt fait de perdre la maîtrise de notre vie, voire «de notre avenir tout court».

Les réflexions et les observations de Stéphane Garneau sont couronnées d’humour vis-à-vis d’une problématique qui n’a pourtant rien de comique: «Il n’y a pas si longtemps, nous avions des rendez-vous fixes avec l’actualité […]. Je vais y revenir dans un instant, mais d’abord, une petite minute d’histoire (commanditée par ma maman qui a tenté tout à l’heure de changer les postes de la télé en soulevant la souris de l’ordinateur pour la pointer vers l’appareil).» 

«On a remarqué que ces gens affichaient des motifs d’activation de leurs neurones différents de ceux du commun des mortels (c’est vous et moi, ça! Mais plus vous, en fait).»

Ce livre fait du bien, notamment en raison de sa lucidité et surtout de sa qualité à ne pas sombrer dans la moralisation. Il nous invite finalement à intégrer les technologies de manière intelligente et prudente dans nos vies.

En somme, ces trois œuvres essayistiques nous invitent à changer de perchoir afin d’observer notre monde avec les yeux et l’esprit plus disponibles. Pour reprendre les mots de Bernard Émond, «[formons] d’abord des lecteurs, des spectateurs, des auditeurs […], des gens qui seront sensibles à la beauté du monde […] et qui à cause de cela voudront la défendre». Car enfin, cela pourrait constituer un remède au cynisme ambiant?

Nos recommandations :

Vos commentaires

Revenir au début