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Crédit photo : PLON
À l’instar du roman à succès de Garth Risk Hallberg, qui présente d’ailleurs, ces temps-ci, un petit bijou illustré avec Vies et mœurs des familles d’Amérique du Nord, Tim Murphy, New-Yorkais assumé dans sa peau d’homosexuel libre, explore un pan de la société américaine à l’aube d’une décennie qui allait voir de francs chercheurs et scientifiques travailler à la sueur de leur front pour trouver des remèdes au sida, qui a terrassé et qui continue de faire ses ravages sur de nombreuses personnes encore aujourd’hui malgré les avancées scientifiques.
«Nous sommes les derniers fantômes des années sida. Nous avons gagné la guerre…»
Et l’auteur ne s’en cache pas: il a lu de nombreux ouvrages de référence sur la question en guise de préparation à cet Immeuble Christodora, et c’est peut-être ici l’unique reproche que l’on pourrait adresser à Tim Murphy. Certains aller-retour temporels auraient pu être abrégés, notamment ceux autour des conférences et recherches sur le sida, qui alourdissent de loin la traversée, notamment en raison du caractère très secondaire de plusieurs personnages.
Car la force du livre, ne l’oublions pas, c’est sa trame narrative complexe, truffée d’ellipses, et surtout la psychologie détaillée sur le long terme de ses personnages. C’est la raison pour laquelle il est primordial de conserver l’attention du lecteur coûte que coûte, autrement le lecteur décroche rapidement et peine à s’y replonger.
Magnifiquement écrit, L’immeuble Christodora tourne aussi autour de Mateo Mendes, un jeune latino dont la mère est morte du sida alors qu’il était poupon et qui sera adopté par un couple d’artistes-performeurs composé de Jared et Milly. On entre donc, à titre de témoin-voyeur, dans la vie de ceux-ci, des belles années bohèmes aux années plus glauques d’un New York où l’art fait vivre les chanceux, décourage les malchanceux et où la drogue fait ses ravages sur les esprits tourmentés sans guère de pitié pour les plus démunis.
«La vie file, elle s’échappe comme du sable dans des mains…»
Car la traversée sur la ligne du temps n’est pas chose aisée pour la plupart des personnages qui gravitent dans ce microcosme new-yorkais, de Jared, Milly, Mateo à Drew, Christian, Ava, Hector et bien d’autres.
Les fantômes du passé finissent souvent par nous rattraper, il n’en tient qu’à nous de poser les pieds à l’abri de nos pires démons.
«L’immeuble Christodora» de Tim Murphy, PLON, collection «Feux croisés», 444 pages, 32,95 $.
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de la rédaction