Prophets of Rage avec AWOLNATION et Wakrat au Centre Bell de Montréal

Mais avant que la fête ne commence véritablement, les spectateurs ont dû «endurer» la prestation solo de DJ Lord, qui a offert un melting-pot de vieux succès pêle-mêle allant de Metallica à House of Pain, de Guns & Roses à Nirvana jusqu’à Jimi Hendrix. Certains remix ont davantage retenu l’attention d’un public semi-participatif, mais son DJ set s’est avéré ennuyeux et beaucoup trop long compte tenu la frénésie qui commençait à s’emparer des nerfs de certains. Et qu’on se l’avoue: nous étions là pour voir de nos yeux vus la nouvelle super-machine qu’est Prophets of Rage.

DJ Lord, lorsqu’il eût enfin fini, fut donc rejoint sur scène par B-Real (Cypress Hill), Chuck D (Public Enemy) et par trois membres de RATM, à savoir Tom Morello, Tim Commerford et Brad Wilk, histoire que le party commence pour de vrai. C’est la pièce «Prophets of Rage» qui a cassé la glace de belle façon, avec un riff-à-la-Morello très «rentre-dedans», et un hymne que plusieurs s’étaient déjà emparés, les poings brandis bien haut dans les airs. En quelques secondes à peine, on pouvait déjà sentir l’enthousiasme de la foule et le courant qui passait entre les musiciens et le public.

Le succès «Guerilla Radio» a suivi tout juste avant l’excellente «Bombtrack», qui a certes donné le ton à la soirée: le répertoire de Rage Against the Machine allait être mis de l’avant et ravir les nostalgiques de la formation. «People of the Sun» (les deux rappeurs ont ici excellé), «Take the Power Back», «Testify», «Sleep Now in the Fire», «Know Your Enemy», «Killing in the Name» (jouée en clôture du spectacle), notamment, ont été jouées avec brio, et on pouvait presque se croire dans un concert de RATM! Sauf que l’absence de Zack de la Rocha s’est fait sentir par moments, même si B-Real et Chuck D ont réussi à faire de la belle job.

Ces derniers se sont retrouvés dans leur élément, à la moitié du concert, lorsqu’un bloc hip-hop leur fut accordé et qu’ils ont pu rapper en formule «bain de foule» ou carrément en body surfing. Durant cet intermède où les gars de RATM en ont profité pour se rafraîchir, B-Real et Chuck D ont chanté «Hand on the Pump», «Insane in the Brain», «Bring the Noise» et «I Ain’t Goin’ Out Like That» entre autres. La transition fut réussie, mais on a quand même senti une légère cassure dans le rythme du concert, qui a démarré sur les chapeaux de roues. «(Rock) Superstar», jouée plus tôt, a reçu un vif accueil de la part des fans.

Prophets of Rage ont ce désir viscéral de créer, grâce à leur notoriété et le respect que les jeunes ont pour eux, une musique dénonciatrice et contestataire qui fait réfléchir. Démarche louable, certainement, mais soyons franc: les deux rappeurs américains n’ont aucunement dans leurs tripes cette hargne que seul de la Rocha sait si bien cracher dans la figure de qui veut bien l’entendre.

Sauf qu’avec la machine RATM en musique, surtout avec maître Morello qui vole la vedette tout au long du show, on a tout de même affaire à un pilier solidement ancré dans la réalité et qui risque de continuer à faire des vagues. Même si une seule pièce originale a été enregistrée jusqu’à présent, à savoir «The Party’s Over», et que l’enrobage ressemble comme deux gouttes d’eau à Rage Against the Machine, on se plaît à admirer la démarche du groupe, surtout lorsque Tom Morello a confié à la foule qu’ils encourageaient, grâce aux fonds recueillis, les sans-abri et les gens dans le besoin.

Même si on sent que ces stars n’ont rien perdu de leur verve, de leur ingéniosité et que Prophets of Rage risque de créer de belles vagues d’engouement aux quatre coins du globe, on reste quand même avec cette drôle d’impression que le supergroupe n’est pas là pour durer. Admirons-les, pour l’heure, surfer sur leur notoriété respective, interpréter les succès de Rage Against the Machine, Cypress Hill, Public Enemy et Beastie Boys sans anicroche, mais permettons-nous de douter de la saveur fraîche et originale de leur propre composition.

Cela dit, voilà de belles bêtes de scène à admirer dans une salle près de chez vous. Profitez-en pendant qu’il en est encore temps!

AWOLNATION et Wakrat

Ce sont les formations Wakrat et AWOLNATION qui avaient le défi de réchauffer l’ambiance en début de soirée, mission qui fut plus ou moins remplie. D’une part, Wakrat a ouvert le bal avec son rock rageur qui donnait davantage mal à la tête que du plaisir au ventre. C’est en fait la formation parallèle de Tim Commerford (que l’on préfère à la basse qu’au chant), qui nous a laissés assez de marbre. Puis ce fut le tour de la formation californienne AWOLNATION, dont l’énergie d’Aaron Bruno et ses musiciens a fait du bien après le passage pénible de Wakrat, mais le son était tellement atroce que leur prestation en a mangé la claque. «Run (Beautiful Things)», «Soul Wars», «Dreamers», «Burn It Down» et «Sail» ont néanmoins plu aux fans qui chantaient les paroles, mais l’acoustique du spectacle fut épouvantablement désagréable pour les tympans.