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Crédit photo : Mathieu Pothier et Elisabeth Davids
Artiste multidisciplinaire aussi audacieux que dévoué à son œuvre, Ragnar Kjartansson se raconte en disant avoir été créé sur scène, avoir grandi dans le temple de la vanité (le théâtre) et avoir choisi d’étudier la peinture pour ainsi se réclamer des arts visuels pour la liberté artistique que cela lui procurait. Malgré ce choix académique, Kjartansson ne s’est jamais détourné de ses autres pendants créatifs, la musique et le jeu théâtral.
Fils de comédiens-dramaturges, il est le cousin de Björk avec qui il partage la même marraine, une excentrique aristocrate danoise qui aurait vécu de longues années dans le sous-sol de la famille Kjartansson, et qui aurait transmis aux deux jeunes gens la vaste étendue d’un savoir musical considérable. Dans une anecdote très révélatrice de sa démarche actuelle, il raconte avoir créé une de ses œuvres récentes dans le but de confronter sa vision rêvée de l’artiste qui ne fait que boire et fumer à la chaîne en créant. C’est ainsi qu’il en est venu à réaliser une performance d’une durée de six mois où, en état d’ébriété, il a peint sans relâche le portrait d’un ami.
À plusieurs égards, ses œuvres picturales sont rattachées à une forme ou une autre de performance. Le parcours de Ragnar Kjartansson est ainsi jalonné d’expérimentations remarquables par leur caractère aussi artistique que philosophique que ludique. L’art d’endurance, l’un des terrains de jeu de l’Islandais, lui permet ainsi d’accéder à une vérité profonde sur l’essence de l’artiste.
On retrouve dans les trois installations présentées à Montréal une réminiscence des concepts de reprise et de répétition développés par l’existentialiste danois Kierkegaard (où il n’y a que la répétition qui peut abolir la temporalité) et du leitmotiv dont Wagner a codifié l’usage. Malgré ces questionnements philosophiques, on ressort de l’expérience de ses œuvres avec une sensation d’élévation et, si la mélancolie et la réflexion sont très présentes, le souvenir qui domine nos impressions en est un de joie et d’allégresse qui correspond sûrement à la manière dont Kjartansson vit sa création: en pleine lumière, souvent en plein air dans son énorme Cadillac blanche où il fume cigare sur cigare, lorsqu’il n’ouvre pas le coffre pour y appuyer un canevas et peindre le panorama.
Découvrez les trois installations de l’expo à la page suivante!
L'événement en photos
Par Mathieu Pothier et Elisabeth Davids
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