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Crédit photo : Warner Bros. et Neil Krug
Sans refaire tout le bilan de leur discographie, qui est ingénieusement passée d’un punk hyperactif et progressif à une plongée d’une grande élégance dans la pop-rock soignée, les musiciens de Foals viennent ici confirmer que ce qu’ils ont perdu en folie, ils l’ont gagné en cohésion.
Effectivement, puisque leur plus court album en carrière, à quelques minutes près, ne lâchera que très peu les oreilles du spectateur. Que ce soit avec sa pièce-titre «What Went Down», servie comme une électrisante ouverture, jusqu’à «A Knife in the Ocean», son éprouvante mais ô combien crève-cœur pièce-fleuve de sept minutes en guise de clôture, le groupe a plus d’un tour dans son sac pour émerveiller.
Et si le titre indique une certaine chute abyssale, ce n’est certainement pas au niveau de la créativité! Toujours passé maître dans la façon de ne jamais laisser totalement ses pièces se dévoiler lors de ses premières secondes, le groupe s’amuse avec la même aisance à les faire évoluer, comme le prouve «Night Swimmers», qui rebondit avec rythme avant de délirer dans un subtil jam que les boîtes de nuit ne renieraient certainement pas.
Il en va de même pour la merveilleuse «Lonely Hunter», assurément aussi pop et sirupeuse que l’était la pièce tout aussi surprenante mais réussie «Milk and Black Spiders» de la veille, mais qui cache des paroles d’une brutalité qui décoiffe quand on s’y penche. Difficile de ne pas réagir lorsque le refrain entonne «Love is the Gun in Your Hand»… Et n’en déplaise à la touchante voix brisée, voire plaintive de Yannis Philippakis, c’est peut-être là que la vraie profondeur de l’album se retrouve. Si la mélancolie a toujours fait partie intégrante de l’essence du groupe, elle n’a jamais semblé aussi brute, vive et déchirante qu’ici, laissant peu de place à la douceur.
À ce titre, même la sublime et supra-romantique «Give It All» est d’une douleur qui foudroie, encore davantage puisqu’elle suit immédiatement la plus lumineuse «Birch Tree» et les sonorités orientales que le groupe aime bien ramener. Avec ingéniosité, en deux pièces, Foals semble avoir illustré la naissance et la mort d’un même amour, alors qu’ils chantent «Come Meet Me By The River, See How Times it Flows» avant de répondre «As You Look Back i’m Pulling Away, All That Remains are Words in the Rain».
La construction des pièces est toujours faite de façon inventive, mais moins ambitieuse au niveau des risques adoptés. Avec moins d’élans musicaux qu’auparavant, et ce, même si on se permet encore d’oser ici et là, on se plaît à trouver mille et une façon d’utiliser les guitares, leur accordant une sonorité propre à chaque pièce.
On se plaît encore d’espérer une autre «Spanish Sahara» un de ces jours, mais à défaut de cela, on remarque l’accrocheuse «Mountain at My Gates» qui, aussi excellente soit-elle, n’en a toutefois pas la même ampleur. On savoure ce brillant laboratoire en paroles, ces dernières s’avérant soignées et toujours avec ce doigté qui frôle le renouveau, alors qu’elles s’amalgament avec satisfaction à des airs qui ne voudront plus nous quitter.
Disque d’une confection admirable qui s’avère meilleur à chaque écoute, chaque pièce sait trouver le moment opportun pour nous conquérir. Un objet fort qui philosophe plus que jamais sur le pouvoir et la perte de pouvoir, prouvant que Foals, dans la plus grande possession de ses moyens, est un groupe qui est simplement incapable de décevoir.
Une édition de luxe est disponible en magasin et inclut un DVD avec le vidéoclip de la pièce-titre, deux versions inédites des pièces de l’album et un mystérieux documentaire expérimental intitulé «Crème anglaise». Il faut également visionner le clip de «Mountain at My Gates», un ambitieux projet complètement fou, soit un clip en 360 degrés tourné avec une GoPro sphérique.
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de la rédaction