ThéâtreL'entrevue éclair avec
Crédit photo : Arach'Pictures - Najim Chaoui
Xavier, co-directeur artistique des Productions Menuentakuan et membre du collectif de direction artistique du Théâtre Aux Écuries (TAÉ), c’est un plaisir de faire ta connaissance! Dis-nous, est-ce que tu nous crois si on te dit qu’on est (presque) aussi excités que toi d’enfin connaître la programmation 2023-2024 du TAÉ? Ça fait quoi, en dedans, de dévoiler les fruits d’un travail de longue haleine à son public de fidèles?
«J’avais deux meilleur·e·s ami·e·s, et par ma faute, ces deux-là se sont rencontré·e·s et sont tombé·e·s en amour. Maintenant, ils attendent un enfant et c’est moi qui ai l’honneur d’être le parrain. Ça veut dire qu’à partir de maintenant, et pour toutes les années à venir, chaque fois que je vais faire un cadeau à mon filleul, au moment précis de sa découverte, je vais être hyper attentif à ses réactions, avec l’espoir d’à la fois déjouer ses attentes, tout en lui faisant vraiment plaisir.»
«C’est un peu la même chose avec notre public du TAÉ. Toutes nos réflexions et nos actions pointent dans cette direction, et c’est un honneur pour lequel on désire ardemment être à la hauteur. Ceci dit, le sentiment qui nous habite le plus, c’est la fierté. Les artistes qui œuvreront au TAÉ cette année ont de quoi nous rendre tous très fiers, ils sont fougueux et sensibles, candides et subversifs, ils nous attendent là où on n’avait pas prévu se sentir vivre.»
«Ils sont notre prolongement dans l’imaginaire.»
Les festivités seront lancées en grand dès le 19 septembre avec la comédie Providencia de l’autrice et comédienne Mariana Tayler au sein de laquelle les spectateurs et spectatrices seront catapultés – et le mot n’est pas si exagéré que ça! – en plein cœur d’une réunion de famille colombienne où l’intensité atteint son paroxysme. Par curiosité, est-ce que ce premier spectacle est à l’image de cette nouvelle saison qui promet de garder nos sens en éveil?
«Providencia est la figure de proue de cette caravelle, ou devrais-je plutôt dire, de ce caravansérail! Parce que le TAÉ est d’abord un endroit où les artistes vont se désaltérer dans leur liberté créative totale. Ce n’est pas une mince affaire, mais caché·e·s ici, entre les dunes lunaires de l’industrie du divertissement, il fait bon de se retrouver entre nous. Je n’ai pas choisi l’analogie du caravansérail parce que c’était des lieux qui comportaient tous leur propre écurie ;-), mais parce que c’était des oasis fréquentées par des voyageur·euse·s qui ne se connaissaient pas, et qui échangeaient. C’est pourquoi l’esprit des programmations de Aux Écuries sera toujours indomptable.»
Dans le cas de Providencia, ces artistes nous invitent à une soirée festive et comique au cœur d’une célébration mortuaire décalée. Déjà, ça m’amène plein de questions… sur le pouvoir de notre légèreté. Notre fragilité infinie serait-elle une force? La metteure en scène et l’autrice sont un duo à connaître absolument, et la distribution est vraiment solide.»
«Pour ma part, c’est certain que j’irai voir ce spectacle plus d’une fois!»
On peut dire que vous faites tout votre possible pour que le public et les créateurs et créatrices vous portent dans leurs cœurs: en plus de bosser dur sur une programmation inclusive et diversifiée, vous proposez aussi un éventail d’activités et de missions en parallèle. La preuve, cette année vous présenterez dix rencontres sectorielles dans cinq corps de métier, et le Centre de services, un projet innovant «qui permet aux compagnies de production théâtrale d’accéder à des ressources spécialisées à un tarif modulable selon leur niveau de financement public», poursuit sa mission de mise en commun des ressources humaines pour une deuxième année. Parle-nous de ces activités et initiatives qui font toute la différence!
«Les théâtres appartiennent à la collectivité, ils n’appartiennent pas aux directeur·trice·s ou aux conseils d’administration. C’est pour cette raison que, selon moi, un théâtre qui n’est pas inclusif est un théâtre qui manque de légitimité, simplement parce qu’il ne représente pas la collectivité dont il est issu. La beauté dans cette affaire? Elle survient lorsque des artistes se rencontrent et qu’il·elle·s proviennent de différentes générations, ou différentes nations, ou différentes réalités.»
«Personnellement, j’adore ça, et je dois dire que c’est une valeur très importante au sein de notre compagnie Les Productions Menuentakuan, et au TAÉ en général. C’est simplement la suite logique de rencontres qui existent déjà dans plusieurs milieux. Et je crois humblement que les artistes sont bien outillés pour que ces rencontres soient significatives et porteuses de sens. Quand on y pense, il y a eu des artistes de tous les temps, de tous les peuples, de toutes les nations, et ce, depuis toujours.»
«Cette universalité, combinée au doute et à l’acte intime de la création, est une force qui en motive beaucoup.»
L’an dernier, on annonçait la bonne nouvelle à nos lecteurs, à savoir que Les Productions Menuentakuan rejoignaient les rangs des six compagnies résidentes qui forment le collectif de direction artistique du TAÉ – parmi lesquelles on retrouve Jamais Lu, Les Porteuses d’Aromates, Système Kangourou, le Théâtre de la Pire Espèce, Les Productions Menuentakuan et le Théâtre I.N.K.! En clôture de saison, Xavier, ta compagnie présentera un festival d’art autochtone, Les Autochtoneries d’Aux Écuries, qui se veut un lieu de rencontres entre autochtones et allochtones, ouvert à tous les publics, du 11 au 21 avril 2024. Chouette initiative, vraiment! On t’écoute: qu’est-ce que vous nous réservez!
«Les Autochtoneries d’Aux Écuries, c’est un événement caustique et unique, une célébration d’œuvres théâtrales portées par des équipes mixtes, autochtones et allochtones. Si le contenu des œuvres qui sont présentées ne contourne aucunement le cœur des sujets traités, toute la place sera faite à l’humour, puisqu’il s’agit d’une dominante culturelle dans toutes les Premières Nations ainsi que chez les Inuits.»
«Il y aura plusieurs activités, par exemple: la première montréalaise de la pièce Mashinikan, et aussi une cérémonie du makusham avec notre aîné Omer St-Onges. Marco Collin et Charles Bender sont co-fondateurs et co-directeurs artistiques de cette compagnie avec moi, depuis 2015. Nos spectacles sont joués partout au Canada en français et en anglais, et comme on est trois co-directeurs très actifs, nous créons beaucoup de spectacles, dont plusieurs partent en tournée.»
«Les Autochtoneries d’Aux Écuries, ce sera notre chance de “jouer à la maison”, ce sera notre prise de possession du territoire écurien. En passant, ne vous inquiétez pas pour le drapeau qui sera planté devant le théâtre, c’est simplement notre lessive qui sèche…»
Il n’y a pas à dire, le TAÉ offre des tarifs très accessibles via sa billetterie en ligne! Votre super promo du Vendredi-dis-ton-prix permet aux spectateurs et spectatrices de payer la somme qui leur convient chaque vendredi de représentation (c’est vous qui décidez!), et le Forfait crinqué, c’est l’option rêvée d’obtenir ses billets à 20 $ seulement en achetant 3, 5 ou 8 spectacles! Qu’aurais-tu envie de dire à nos lecteurs et lectrices qui hésitent encore à se lancer? À part «Qu’attendez-vous!», bien sûr!
«Le théâtre, c’est l’fun d’y aller souvent, de se donner rendez-vous avant, d’inviter ses ami∙e∙s, des collèges, une date (pourquoi pas)? C’est ça qu’on aime, non? Prendre du temps de qualité avec celles et ceux qu’on apprécie; c’est le plaisir des arts vivants. En plus, quand on connecte vraiment avec une œuvre, ça nourrit notre âme! Ce n’est pas rien.»
«L’argent ne devrait jamais être un mur entre une personne et une bonne pièce, donc on fait de notre mieux pour répondre à ça. Il y a aussi certain·e·s spectateur·trice·s qui veulent démontrer concrètement leur engagement envers le théâtre en donnant plus. Je les remercie chaudement et j’ai envie de leur dire qu’il·elle·s auront toujours une place au TAÉ, peu importe leur réalité financière.»
«Notre public est statistiquement jeune, c’est vrai, donc c’est important de leur donner des options adaptées à leurs réalités, mais il n’y a pas que des jeunes Aux Écuries! Il y a aussi des jeunes de tous les âges! Personnellement, le TAÉ, c’est mon théâtre préféré, mais tu n’as pas besoin que ce soit ton théâtre préféré pour te réjouir de pouvoir en profiter à moindre coût!»
«J’aime bien l’idée, puisque, effectivement, à partir de là: “Qu’attendez-vous?”»