LittératureL'entrevue éclair avec
Crédit photo : Frédérique Ménard-Aubin
Simon, à quel moment de ta vie as-tu eu le déclic pour l’écriture et, plus spécifiquement, pour la poésie?
«L’écriture a toujours été présente, d’abord en tant que cousine éloignée; on se rencontrait de temps en temps lors des grands moments de joie ou lors des épisodes de deuils, puis elle disparaissait de ma vie. Je crois que l’écriture a toujours été là pour moi, mais j’ai peu exigé de notre relation jusqu’à la mi-vingtaine. C’est à ce moment où le besoin de me comprendre est devenu criant, urgent même pour devenir un homme, et l’écriture s’est révélée un outil précieux; un peu comme un filet lancé à l’eau pour remonter à la surface de ce qui m’habite. C’est aussi le moment où la poésie s’est installée pour de bon dans mon quotidien grâce à une lecture acharnée et une pratique d’écriture quotidienne. Mon équilibre et surtout mon enracinement passent par là.»
Tu es le cofondateur de O’Dandy, une entreprise de création de contenu qui te permet de jongler entre les métiers de stratège, rédacteur et concepteur. Où trouves-tu la créativité et l’énergie nécessaires à la bonne réalisation de tes projets?
«J’essaie de distinguer ce qui prend de l’énergie de ce qui en génère. La création, sous toutes ses formes, est pour moi une grande source d’énergie, physique, mentale et émotionnelle. Du point de vue comptable, on pourrait dire que la création affiche toujours un bilan positif, même si le processus de création n’est pas toujours serein et qu’à certains moments le doute s’installe et devient une dépense énergétique. Je crois que pour lancer une entreprise et arriver à créer de la valeur, il faut être un bon généraliste, être prêt à faire de tout, tisser des liens entre les gens et les idées. En ce sens, la création prend plusieurs formes, pas seulement artistiques. Dans ma position, je dois être à l’écoute de ce qui me nourrit personnellement et de ce qui contribue à la croissance et à la quête de sens de l’entreprise.»
Ce 22 janvier, ton tout premier recueil de poésie, Nul si découvert, a été officiellement publié aux Éditions du Noroît. Peux-tu expliquer à nos lecteurs la signification du titre et les thèmes qui le traversent de part en part?
«Nul si découvert, c’est la prise d’un risque. Comme poète, d’abord; en ajoutant ma voix à celles des milliers de femmes et d’hommes qui, depuis des siècles, ont su explorer avec sensibilité et justesse les différentes facettes de la condition humaine. Et puis, comme homme; c’est la prise d’un risque en me déshabillant jusqu’à la faille: en retirant méticuleusement tous mes masques et en révélant l’insignifiance de l’être. Chaque poème est une lézarde de plus qui fera peut-être céder l’édifice amoureux que j’ai construit. Nul si découvert explore les limites de la vulnérabilité et du pardon à soi.»
Peux-tu nous en dire plus sur le processus de création des poèmes qui le constituent? Est-ce le fruit de longues années de tâtonnement et d’expérimentation ou, au contraire, tous tes textes te sont venus assez rapidement en tête?
«L’écriture de ce recueil s’est échelonnée sur sept ans et est le fruit d’une démarche que j’ai voulue intègre, intimement liée à ce que je vivais. Ce ne fut pas une écriture impulsive, mais plutôt un lent geste pour cartographier le territoire dévasté, retrouver de nouveaux points d’ancrage et laisser les sens reprendre leur droit. Tout au long du processus, la réécriture – parce qu’il y en a eu beaucoup – a permis de donner du relief au souvenir et d’ancrer ma parole dans le corps. Ce fut une longue quête pour tenter de trouver la tonalité de ma voix comme poète et ma fragilité comme homme.»
Pour un prochain projet en lien avec la création littéraire, qu’aimerais-tu explorer, et pourquoi?
«J’ai amorcé l’écriture d’un deuxième acte poétique, une suite au premier recueil dans le sens où je m’interroge sur ce que veut dire être un homme aujourd’hui, dans un contexte où il n’y a plus de transmission des savoirs passés et que le futur est plus qu’incertain. Pourquoi cette déconnexion avec mes ancêtres et mon sang, pourquoi cette vacuité de sens? Le corps devient alors le seul carrefour pour déjouer l’impasse. En passant par le corps, comme objet de mémoire et instrument relationnel, j’essaie de réhabiliter l’espoir d’avoir des enfants.»