SortiesDanse
Crédit photo : David Wong
«Paagos (Drift)» par Sarah Maria Samaniego
La salle verte nous attend avec une disposition bien particulière: des coussins formant un carré autour de l’espace de danse nous invitent à prendre place dans cette première pièce. De grandes descentes de rouleaux de plastiques agrémentent les quatre coins intérieurs de cette disposition, nous donnant l’impression d’être sur le point d’assister à quelque chose de très intime.
C’est en effet ce que Sarah Maria Samaniego parvint à nous transmettre lors de sa performance. Le corps de la danseuse venant s’installer au centre d’une vidéo projetée au sol la représentant dansant dans les vagues, donne le ton d’un cheminement personnel qui semble être le moteur de cette œuvre toujours en cours de création.
Une musique minimaliste emplit tranquillement la pièce et le corps de la danseuse se laisse hypnotiser par ces sons irréguliers. Alors que l’univers sonore se construit doucement et laisse sous-entendre un monde aquatique, Sarah Maria Samaniego s’anime de plus en plus et son corps se laisse emporter par la fluidité des dessous marins. Les mouvements ondulants et sa forte connexion au plancher nous permettent de l’imaginer dansant sur le sable, au fond d’une mer de plus en plus agitée.
Au zénith de sa pièce, elle nous fait plonger avec elle dans des profondeurs insoupçonnées en virevoltant dans ces lianes de plastique, parfois protectrices, parfois créatrices d’embarras, qui l’entourent. Elle s’y mêle et s’y débat avec une agilité remarquable. Des images fortes en ressortent et l’on devine la recherche derrière le mouvement.
Le retour de la vidéo au sol nous ramène avec elle sur le bord de l’océan Pacifique, où l’œuvre se termine en l’observant s’abandonner au vas-et-viens des vagues comme une algue, un débris, une âme à la dérive…
«La Soif» par Leticia Vera
En deuxième partie, Leticia Vera nous propose une tout autre vision de l’eau. Elle nous présente un monde où l’eau ne nous submerge plus, où elle devient chose rare et précieuse.
Le début de la pièce est visuellement fascinant. Les interprètes nous sont tout d’abord présentées sous un plastique vaporeux suggérant l’idée forte d’une goutte d’eau. Ivanie Aubin-Malo, Barbara Diabo ainsi que Mariana Minutti évoluent au ralenti dans l’enceinte de ce lieu restreint. La transformation de la goutte est graduelle et nous laisse le temps d’apprécier le magnifique environnement sonore de Moe Clark.
Le deuxième tableau est très rythmé et la tension que la soif peut créer dans le corps est bien représentée avec des répétitions de plus en plus agitées. On ressent l’urgence de s’abreuver. Des images très fortes de cette pénurie, de ce manque, nous sont aussi transmises grâce à la conception d’éclairages.
L’intérêt se perd, un peu, cependant, lors de la dernière partie où les trois interprètes offrent une chorégraphie moins imagée et plus dansée. Le niveau technique des danseuses n’étant pas uniforme, cela nous déconnecte peu à peu du propos.
On sort toutefois satisfaits de ce programme double très sensé. Les propositions d’une vision interne et externe de l’eau nous ayant placés en position de questionnement face à nous-mêmes, à nos remous intérieurs, mais aussi à l’environnement qui nous entoure et ce que nous en faisons socialement.
«Paagos (Drift)» de Leticia Vera + «La Soif» en images
Par David Wong
L'avis
de la rédaction