«Des promesses, des promesses» de Douglas Maxwell au Théâtre La Licorne – Bible urbaine

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«Des promesses, des promesses» de Douglas Maxwell au Théâtre La Licorne

«Des promesses, des promesses» de Douglas Maxwell au Théâtre La Licorne

Seule au combat

Publié le 29 mars 2018 par Pierre-Alexandre Buisson

Crédit photo : Suzane O'Neill

C’est l’auteur écossais Douglas Maxwell, lors d’un séjour à Montréal en 2014, qui a lui-même proposé à Micheline Bernard de tenir le rôle de Miss Brodie dans la traduction de Maryse Warda de sa pièce Promises promises. L’actrice tenait alors un rôle dans Une veuve respectable s’initie à la vulgarité à La Licorne, et sa performance a charmé le célèbre dramaturge.

Il faut dire qu’il est difficile de résister à son écrasante présence scénique; seule sur scène, en symbiose avec les mots de Douglas Maxwell, son pouvoir d’évocation pétrifie.

Miss Brodie incarne la droiture et les bonnes manières, et tire une satisfaction immense de la transmission de ses valeurs à ses jeunes élèves; elle les prend sous son aile, les protège, et le sous-texte de son long monologue laisse entendre qu’elle préfère leur compagnie à celle des adultes. Elle porte d’ailleurs rapidement un jugement très sévère sur ses collègues et les nombreux hommes qui ont traversé sa vie, étant vieille fille – par choix, obligation, nous ne le saurons pas – et en éprouvant une mordante amertume.

Elle a déjà pris sa retraite lorsqu’on lui demande d’être suppléante dans un groupe où sera intégrée Rosie, une jeune Somalienne, qui fait du mutisme sélectif, et qu’un prêtre viendra exorciser en classe. Une «aberration» qu’elle ne peut évidemment tolérer, agissant au péril de son emploi, et expulsant l’homme de dieu de sa classe.

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Cette manie des hommes de décider du sort du corps des femmes ne date pas d’hier, et est diablement d’actualité alors que la vague de dénonciations résultant de la vague #metoo fait rage.

Dans ce rafraîchissant portrait d’une femme complexe et nuancée, qui refuse de compromettre ses valeurs, Douglas Maxwell a créé un personnage fort, et son interprétation par Micheline Bernard lui a valu de remporter le Prix de la critique, décerné par l’Association québécoise des critiques de théâtre, en 2017.

Plusieurs thématiques sont explorées alors que Bernard nous régale de cet exigeant texte, évoluant sur une scène qui évoque une toute petite classe, parodiant et imitant ses interlocuteurs avec une extrême rigueur; on nous parle d’empathie, du choc des cultures, de tolérance, mais aussi de traumatismes réprimés, de transmission du savoir et des petites attentions qu’une grande femme porte à ses élèves, faisant tout ce qu’elle peut pour bien les intégrer au groupe.

Une grandeur d’âme qui nous hantera longtemps. Et une reprise amplement justifiée.

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