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Crédit photo : Pierre Charbonneau
Les ragots et rumeurs vont encore bon train aujourd’hui alors que Mike a purgé une peine de prison pour avoir mené sa femme au cimetière alors qu’il conduisait en état d’ébriété. Dans cette pièce écrite par le dramaturge britannique Martin McDonagh, reconnu notamment pour ses réalisations cinématographiques In Bruges ou Seven Psychopaths, Sébastien Gauthier, à la mise en scène, s’est attaché à adapter fidèlement une œuvre mêlant comédie noire et suspense à l’image de son auteur.
Dans une traduction signée Marc-André Thibault, la pièce nous emmène au détour d’un cimetière où Mike (Hugo Giroux) s’affaire à déterrer les ossements des disparus de la communauté pour les rejeter dans le lac. Celui-ci est accompagné, sur scène, de Danielle Proulx (la vieille Mary), Marc-André Thibault (Martin, le je-m’en-fichiste du village) et Pierre-Luc Brillant (l’agent municipal).
À coup de répliques marquantes parfois assassines, l’histoire laisse planer le doute sur la réelle implication de Mike dans la disparition de sa femme, ce qui laisse place aux commérages les plus acérés, notamment de la part de Martin. Piquantes, les répliques de ce dernier se révèlent drolatiques et repoussent Mike dans de sombres retranchements. Un peu bêta, il tente de dépasser sa naïveté en s’imposant dans le décor tout en envoyant balader quiconque le méprise.
Servi par une mise en scène efficace, le spectateur se voit offrir un décor d’intérieur d’une petite maison typique de ce coin de l’Irlande où trône évidemment sur la table une bouteille de Whisky que Mary la mégère ne refuse jamais de descendre, et un paysage lugubre et funèbre digne des plus sombres cimetières. Dans cette obscure atmosphère, l’humour grinçant de Martin McDonagh se révèle diablement efficace, et l’orgueil de chacun des personnages s’éveille jusqu’à l’éclatement final.
Si l’on ne connaîtra jamais les réelles intentions de chacun des protagonistes, le scénario prendra toute son ampleur dès lors que seront dépassés les on-dit pour qu’enfin la communauté sache ce qui s’est passé lors de ce sombre et flou accident. Sébastien Gauthier s’amuse ici à disséquer l’envers de chacun de ses personnages pour qu’il se révèle au plus proche de leurs vérités.
Comédie noire et nébuleuse, Les ossements du Connemara tient le spectateur de bout en bout par son humour chicanier et criard mais non moins puissant et tordant.
«Les ossements du Connemara» de Martin McDonagh, dans une mise en scène de Sébastien Gauthier, au Théâtre Prospero jusqu’au 26 novembre 2016.
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Par Pierre Charbonneau
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