ThéâtreCritiques de théâtre
Crédit photo : Annie Éthier
Ce texte d’Émilie Lajoie, qui traite du deuil à faire lorsqu’on apprend qu’il nous est impossible de concevoir, est présenté ces jours-ci dans la Salle intime du Théâtre Prospero, dans une mise en scène intimiste de Sophie Cadieux.
Un euphémisme, sans doute, puisqu’il est difficile de tomber dans le grand déploiement dans cette sympathique petite salle qui dispose d’une trentaine de sièges à tout casser, et qui place les spectateurs et spectatrices si près de l’action qu’ielles pourraient presque y participer.
Le propos central du scénario est fort actuel dans un contexte de crise climatique et d’un futur incertain de notre planète, alors qu’il est pertinent de contester la nécessité de propulser un nouveau-né dans le brasier méphistophélique que devient progressivement notre monde.
Mais pas un mot sur cet enjeu dans les dialogues, étrangement.
On a plutôt droit à des tirades sur l’impuissance, à une femme infertile qui se referme sur elle-même, à un couple qui se déchire, et à une longue liste parfois amusante de toutes les activités que Pascale pourrait pratiquer en ne devenant pas mère.
Émilie Lajoie interprète avec conviction cette femme écorchée qui choisit le retrait et la fuite, et on la sent très investie dans son rôle.
Humour maternel
Un seul personnage extérieur au couple, la mère de Martin (Sylvie Potvin), vient percer la bulle hermétique de leur drame. Elle personnifie à elle seule le regard des autres qui change, les attentes familiales et le choc des générations.
Son personnage s’exprime presque uniquement avec des clichés, qui rappellent inévitablement à l’audience toutes les matriarches d’un certain âge et leur «sagesse de coin de table». Ce folklore tantôt hilarant est à peu près le seul élément proprement humoristique d’une trame narrative qui s’enfonce parfois dans la lourdeur.
Simon Rousseau, à mi-chemin entre Daniel Auteuil et Tim Roth, incarne le chum compréhensif et impuissant qui tente tant bien que mal de rassurer et d’épauler sa conjointe dans ce drame, sans pour autant que son personnage ne soit réellement approfondi. On a conséquemment du mal à s’attacher aux deux protagonistes, spécialement dans la conclusion un peu convenue.
Notre petite mort est un moment de théâtre qui cherche à être touchant et à faire réfléchir, et qui y parvient parfois, même si on ne peut s’empêcher de ressentir, quand tombe le rideau, qu’il lui manque un petit quelque chose pour être véritablement mémorable.
«Notre petite mort» d’Émilie Lajoie en images
Par Annie Éthier
L'avis
de la rédaction