ThéâtreCritiques de théâtre
Crédit photo : David Mendoza Hélaine
J’te pète en mixte raconte l’histoire de Camille. À cette époque «éloignée» qu’a été 2010 (où le monde entier dansait le shuffle sur du LMFAO!), cette dernière commence ses années de cégep. Fraîchement arrivée du secondaire, elle cherche à laisser sa marque dans ce nouvel environnement.
Rapidement, elle se rend compte que les plus cool jouent au sein de l’équipe d’improvisation. Pour devenir populaire elle aussi, Camille s’intègre aussitôt à cet écosystème, incluant les soirées de fête et de premières découvertes que ça implique. Elle y vit même ses premiers émois amoureux avec Vince, le meilleur joueur de l’équipe d’improvisation.
Cependant, des relations toxiques se développeront à l’intérieur de son cercle d’ami et imprégneront, du même coup, sa vie de couple.
Les arénas dans lesquels on rit de tout
Deux premières particularités me viennent en tête après avoir vu la pièce: la disposition de la salle, imaginée par Marianne Lebel, coscénographe sur L’ŒIL, pièce que j’ai eu la chance de voir en février dernier de la compagnie Vénus à Vélo, est configurée en forme d’octogone comme dans un vrai match d’improvisation!
De cette manière, elle rappelle que les violences vécues par les femmes de ce milieu sont souvent perpétrées devant un public… qui n’agit pas.
Les lumières au plafond, quant à elles, sont disposées dans des verres beer pong en plastique rouge. Sur l’espace de jeu sont aussi projetées des vidéos de David B. Ricard, concepteur vidéo et réalisateur (notamment de l’essai-vidéo David contre Goliath), qui ponctuent la pièce en marquant l’enchaînement des différents chapitres de cette œuvre dramatique.
La performance de Clémence Lavallée, par ailleurs, est particulièrement marquante. Puisque l’œuvre est écrite sous la forme d’un one-woman-show, c’est elle qui tient le poids du spectacle sur ses épaules.
L’équilibre entre la construction et le punch
Parlant de one-woman-show, la pièce en elle-même est écrite au «tu». Elle engage ainsi le spectateur en le plaçant comme protagoniste de l’histoire.
Cela dit, il me semble qu’il manque un degré d’implication, à savoir une interaction directe où la salle aurait pu répondre à Clémence et où un lien direct aurait pu être établi. Après tout, le stand-up et l’improvisation exigent ce niveau de connexion avec le public.
Je dois cependant avouer que les rappels à propos des années 2010 m’ont bien fait rire. À l’époque où j’ai moi-même fréquenté le cégep, je ne me tenais pas tant que ça avec l’équipe d’improvisation, mais les clins d’œil à la vie de jeune adulte dans ces institutions m’ont fait sourire à plus d’un moment.
Sinon, je dois dire que la fin m’a un peu laissé sur ma faim (sans faire de mauvaise rime!) La pièce énonce des questions sur la place des femmes en humour, sur les limites de la comédie, ainsi que sur la représentation des violences conjugales sur scène. Elle se pose toutes ces grandes interrogations pour, au final, trouver bien peu de réponses…
À mon sens, une œuvre théâtrale qui parle d’enjeux sociaux se doit d’arriver avec un discours soutenu sur les questions qu’elle soulève. Mettre la tâche de la posture politique sur le dos du public me semble être une sortie facile envers son devoir d’artiste qui est, à mon sens, d’assumer ses convictions.
À qui va le point, finalement?
Maintenant, je dois quand même admettre que ce spectacle représente bien les défis propres à la place des femmes dans le milieu de l’improvisation. De plus, elle m’a davantage fait cogiter sur la place des femmes en humour que l’intégrale des monologues de Mariana Mazza, ce que j’accueille positivement!
En général, la forme de ce spectacle fonctionne plutôt bien. Certains punchs manquent un peu de spontanéité, mais sinon la plupart des gags fonctionnent très bien auprès du public.
Si vous voulez réfléchir à la place des femmes en improvisation ou encore observer la représentation des violences de ce milieu, le tout exposé avec une grande finesse, allez voir cette pièce pendant qu’il est encore temps!
La pièce «J'te pète en mixte» en images
Par David Mendoza Hélaine
L'avis
de la rédaction