«Guédailles» de Catherine Morrissette dans le cadre du Festival Fringe 2018 – Bible urbaine

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«Guédailles» de Catherine Morrissette dans le cadre du Festival Fringe 2018

«Guédailles» de Catherine Morrissette dans le cadre du Festival Fringe 2018

Autour d'elles

Publié le 15 juin 2018 par Pierre-Alexandre Buisson

Crédit photo : BenJ Master Photography

On pourrait facilement croire que le texte de Guédailles a été écrit en réaction aux multiples soulèvements et dénonciations qui ont suivi la vague #metoo, qu’il en est une manifestation, une suite logique, mais ça n’est pas le cas. L’indignation qui s’en dégage précède cet éveil massif et s’inscrit plutôt dans une optique de ras-le-bol généralisé de la «culture du viol», une problématique d’autant plus insidieuse que la plupart de ses adeptes n’y voient qu’une expression de leur masculinité virile.

Catherine Morrissette a écrit un texte actuel, qui reprend plusieurs préoccupations liées aux relations amoureuses et qui n’hésite pas à confronter de plein fouet des situations délicates.

On y fait la rencontre de trois personnages féminins, qui s’autoproclament «guédailles» et qui vivent pleinement leur sexualité. Sara Karel Chiasson interprète une femme tombée enceinte de son violeur; une autre (l’hilarante Marie-Laurence Marleau) est accro aux sites de rencontre et envoie des photos osées à un gars qu’elle n’a jamais vu en personne, et qu’elle a rencontré en faisant un faux numéro; et la plus enragée (Noémie Ribaut) préfère les gars qui la dominent au lit, même si leur violence sort parfois du cadre contrôlé de la chambre à coucher.

Leurs histoires sont superposées, et les dialogues incorporent – plutôt habilement – des extraits de King Kong Theorie, un essai de Virginie Despentes, paru en 2006, qui propose un nouvel angle sur le féminisme.

Sur la scène, trois toilettes, improbables trônes sur lesquels elles prennent la pose, se pavanent, font l’amour ou vomissent leur dégoût. Les vignettes s’imbriquent harmonieusement les unes dans les autres, venant tisser progressivement un propos dur et réaliste, qui est présenté avec une fluidité de bon aloi. Un constat livré avec une bonne touche d’humour, et une conviction admirable.

L’inclusion d’un homme (Gabriel-Antoine Roy) au sein de cette meute de louves est tout d’abord une heureuse nécessité. La menace malsaine qu’il exsude, alors qu’il tente de justifier ses abus conjugaux est à la base d’un des moments les plus forts de la pièce, avec sa confrontation d’un public muet, stupéfait par son immense déni.

Puis lorsqu’il avoue candidement avoir été lui aussi victime de violence verbale ou sexuelle de la part d’une ex-copine, devenant à son tour la cible d’un abus qui se perpétue bien souvent d’une génération à l’autre, comme s’il s’agissait d’un incontournable trait héréditaire, même si l’idée n’est pas nouvelle, on se retrouve frappés par l’esprit d’inclusion du discours qui est certes cru, mais qui a indubitablement quelque chose d’essentiel.

L'événement en photos

Par BenJ Master Photography

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